La vie de couple est faite de compromis. Mais après cinq ans de fréquentation assidue, bien que mouvementée, j'annonce aujourd'hui ma réconciliation.

La vie de couple est faite de compromis. Mais après cinq ans de fréquentation assidue, bien que mouvementée, j'annonce aujourd'hui ma réconciliation.

J'ai finalement accepté, non sans peine parfois, ma vie avec «Tiger Eyes». Plus encore, malgré son défaut - son immense défaut, devrais-je dire - que j'ai tenté en vain de corriger, je l'aime plus que jamais. Et quand arrive la fin d'octobre, je défie quiconque de ne pas tomber sous son charme. Le vinaigrier «Tiger Eyes» est une beauté qu'il faut tout simplement domestiquer.

Je l'ai rencontré pour la première fois à la foire horticole de Columbus, en Ohio, en 2003. Imaginez un vinaigrier au feuillage délicat comme l'est celui de ses parents, le vinaigrier lacinié, mais doté de feuilles jaunes. Dès le mois d'août, il commence à se colorer puis, au cours de l'automne, son feuillage devient orange vif, comme un feu qui réchauffe tout le jardin. Il atteint environ 2 m et son envergure est du même ordre. Il résiste en zone 4 sans protection hivernale, n'est pas sujet aux maladies, se contente d'un sol ordinaire et d'un endroit ensoleillé.

J'ai vite été conquis, surtout que son producteur américain, la maison Bailey, du Minnesota, assurait que «Tiger Eyes» n'était pas envahissant, contrairement aux autres vinaigriers. Difficile de demander mieux à un arbuste.

L'année suivante, «Tiger Eyes» était installé au jardin, fidèle à ses promesses. Il a fallu attendre trois ans, en juin 2006, pour que sa vraie personnalité apparaisse au grand jour. Des bébés «Tiger Eyes» ont fait leur apparition partout dans la platebande à 2 ou 3 m du tronc. Quelle déception! Mon vinaigrier était aussi envahissant que les autres.

Vendu sous de fausses représentations, il a cependant attendu trois ans avant de se manifester, comme s'il était de connivence avec le producteur. Hypocrite, va! Au cours de cet été inoubliable, il a produit tellement de rejetons que j'aurais pu me lancer en affaires. J'ai songé à maintes reprises à mettre un terme à notre relation. Puis est venu l'automne...

En désespoir de cause, il y a deux ans, nous avons littéralement encerclé ses racines avec une plaque d'aluminium. Ses ambitions territoriales se sont calmées. Mais, dès qu'il y avait 2 ou 3 cm de terre par-dessus la barrière de métal, il se lançait à nouveau à la conquête de la platebande. Un manège qu'il poursuit toujours. Pas plus tard que la semaine dernière, j'ai découvert encore une racine de 1,5 m qui serpentait sous terre, discrètement, presque à la surface, prête à donner un nouveau bébé. L'appendice a été prestement coupé sans douleur. Voilà pour la domestication.