Le jardin endormi et les outils rangés, voici venu le temps de faire le bilan de la saison. Chaque année, je vis le même tiraillement: vaut-il mieux attendre en avril ou mai pour vous faire part de mes découvertes, quand la fièvre printanière est à son paroxysme, ou en décembre, quand ma mémoire est encore fidèle?

Le jardin endormi et les outils rangés, voici venu le temps de faire le bilan de la saison. Chaque année, je vis le même tiraillement: vaut-il mieux attendre en avril ou mai pour vous faire part de mes découvertes, quand la fièvre printanière est à son paroxysme, ou en décembre, quand ma mémoire est encore fidèle?

 À vrai dire, au printemps, les pépiniéristes vous diront qu'ils n'ont pas eu le temps de se renseigner, qu'ils ne connaissent pas les plantes suggérées et, évidemment, qu'ils n'ont pu les commander. À cet égard, décembre est plus intéressant car la période laisse le temps aux centres de jardin de s'ajuster, du moins ceux qui ont à coeur leur clientèle. Dans ce cas, vous devrez cependant conserver ces quelques suggestions jusqu'à la belle saison, comme plusieurs le font d'ailleurs régulièrement, ai-je pu constater dans le passé.

 Je vous présente donc mes stars de la saison estivale qui, j'espère, vous feront rêver jusqu'à la fonte des neiges.

Belle tête

 Ma plus grande vedette est une petite mais jolie primevère, qui était toujours en fleurs à la mi-novembre, après m'avoir charmé tout l'été. Curieusement, Primula capitata, de son appellation scientifique, ne répond à aucun nom particulier en français, ni même en anglais. Elle porte la dénomination commerciale, Primula «Noverna Deep Blue». Considérée comme une des primevères ayant la plus longue floraison, elle produit aussi des graines qui fleurissent dans les mois suivant le semis, et non pas deux ans plus tard comme c'est le cas la plupart du temps dans cette famille. Beauté plutôt discrète, si on peut dire, Primula capitata forme une rosette d'une trentaine de centimètres de diamètre d'où émergent deux ou trois tiges de même longueur surmontées d'un délicat bouquet de fleurs violettes. Capitata veut d'ailleurs dire «grosse tête», mais le terme «belle tête» lui conviendrait beaucoup mieux.

 Originaire des montagnes du Tibet et du Népal, Primula capitata est une vivace de courte durée, comme le sont malheureusement toutes les primevères. La plante est considérée rustique en zone 4. Sa résistance reste à démontrer au Québec. Au Jardin botanique de Montréal, le responsable du jardin des vivaces, l'horticulteur Michel-André Otis, explique qu'il a réussi à produire des plants à partir de semis. Ceux-ci ont fleuri un an plus tard, mais ils n'ont pas résisté à leur deuxième hiver. Même s'il fallait la considérer comme annuelle, la belle tibétaine mériterait une place au jardin.

Flamme d'ombre

 Plectranthus «Troy's Gold» s'est fait connaître aux États-Unis en 2006, mais il a fallu attendre cette année pour le découvrir ici. Une apparition bien timide sur le marché, puisque je n'ai pu me procurer d'autres plants en juillet. Espérons que les approvisionnements seront plus considérables l'an prochain. Ce lierre suédois présente un feuillage panaché très particulier. Ses feuilles gaufrées sont d'un jaune assez vif qui contraste avec leur centre verdâtre. Une autre beauté que j'ai placée en grand nombre dans un coin ombragé. L'effet est étonnant! Chaque plant d'environ 15 cm peut s'étendre sur 40 cm, formant autant de petits soleils. La plante d'origine sud-africaine aime l'humidité, mais n'a pas bronché les rares fois où elle a manqué d'eau. «Troy's Gold» a conservé sa belle allure jusqu'aux premiers gels. Par contre, les quelques plants installés en plein soleil ont dépéri lentement mais sûrement.

 Prince géant

 «Prince» est un nouveau pennisetum choisi pour faire partie du groupe des Exceptionnelles 2008 (des plantes sélectionnées à la fois par le public et des experts québécois). J'ai pu mettre la main sur quelques spécimens cet été. Si vous avez un grand terrain ou un endroit privilégié pour une plante inusitée mais de grande envergure, n'hésitez pas au printemps prochain. Ce pennisetum est d'une rare beauté. Ses feuilles sont de couleur pourpre et leur coloris devient encore plus foncé quand le soleil et la chaleur sont de la partie. Mais attention! Si vous utilisez des plants de belle taille lors de la plantation, comme ce fut le cas chez moi, ils dépasseront facilement les 2 mètres à la fin de l'été. Un grand spectacle que voudront sûrement mettre à l'affiche plusieurs municipalités et institutions. Par ailleurs, si le monstre vous effraie un peu, optez pour sa soeurette «Princess», qui atteint une taille plus raisonnable, de 100 à 150 cm, ce qui est néanmoins considérable.

Jaune kangourou

 Les pattes de kangourou faisaient partie des Exceptionnelles 2007. Mais le cultivar retenu par le groupe sélect était le «Kanga Red» aux fleurs rouges, comme son nom l'indique. Par ailleurs, des centres de jardin vendaient aussi une version jaune, souvent sous le même nom bien qu'il s'agissait probablement de «Bush Gold», un cultivar à mon avis encore plus attrayant que «Kanga Red». Ses fleurs sont veloutées, jaunâtres ou verdâtres. Les plants, qui atteignaient un bon 70 cm, sont restés beaux jusqu'à la fin septembre, en meilleure forme que «Kanga».

 Le phénix et les autres

 D'ailleurs, en parlant des Exceptionnelles, le penstemon «Phoenix Red», aux fleurs rouges dotées d'une gorge blanche, a tenu ses promesses tout l'été. Une plante promise à un bel avenir.

 Par contre, une autre Exceptionnelle, le Cléome «Senorita Rosalita» a péché par excès. Ce cultivar très florifère sans épines, aux fleurs rose violacé, devait atteindre 90 cm, tout au plus. La dernière mesure avant le grand ménage d'automne indiquait 1,63 m, presque le double. Voilà qui change la perspective. Aussi vaut-il mieux le placer à l'arrière des platebandes.

Même si la beauté a été négligée par les clients de la Jardinière du Nord, à Saint-Félix-de-Valois, le centre de jardin où je l'ai découverte, l'hibiscus acetosella «Haight Ashbury» est une splendeur, à mon avis. Ce cultivar, qui tient son nom d'un quartier à la mode de San Francisco, est une annuelle de 1,50 à 2 mètres, dotée de feuilles semblables à l'érable japonais ou au cannabis, mais de couleur rouge panaché de rose. Cet hibiscus d'origine africaine peut toutefois passer l'hiver dans la maison où il pourrait même donner quelques fleurs, ce qui n'est pas le cas à l'extérieur, du moins au Québec. On le cultive uniquement pour son feuillage, soit dit en passant, il est très facile à bouturer.

 Une autre vivace qui m'a ravi: le chrysanthème blanc de la série «Mammoth». Fleurs délicates et abondantes, d'un blanc pur éclatant, au port plus dressé que les autres membre de la famille. Rappelons que les «Mammoth» sont des chrysanthèmes extrêmement rustiques, et cela sans protection, du moins en zone 5.

 Un dernier mot sur la nouvelle tomate «Tomatoberry», produite par Jonny's Selected Seed. Ce cultivar de tomate cerise donne en abondance des fruits ayant la forme d'un minuscule poivron. Très mignon! Le hic, c'est qu'il faut les cueillir lorsqu'ils sont à maturité. Évident! direz-vous. Mais voilà, contrairement aux autres variétés similaires, si la cueillette s'effectue une ou deux journées trop tôt ou trop tard, elles sont plutôt fades.

 

Photo Bernard Brault, La Presse

L'hibiscus acetosella «Haight Ashbury» est une splendeur, à mon avis.