C'est surtout vers la fin août que le spectacle commence chez les graminées. La mise en scène varie selon chaque groupe, mais c'est en septembre et octobre qu'elles atteignent le sommet de leur art, alors que le soleil et le vent jouent un rôle majeur. Impossible de ne pas être subjugué par une touffe de miscanthus dansant au soleil couchant.

C'est surtout vers la fin août que le spectacle commence chez les graminées. La mise en scène varie selon chaque groupe, mais c'est en septembre et octobre qu'elles atteignent le sommet de leur art, alors que le soleil et le vent jouent un rôle majeur. Impossible de ne pas être subjugué par une touffe de miscanthus dansant au soleil couchant.

 Voilà une bonne dizaine d'années que les graminées sont à la mode au Québec, mais cet engouement a pris une ampleur considérable depuis trois ou quatre ans, selon les pépiniéristes interrogés sur le sujet. Les amateurs de jardinage constatent qu'en raison de leur diversité (on en compte près de 9000 espèces dans le monde et les cultivars vendus commercialement se chiffrent par centaines), les graminées se prêtent à toutes les fantaisies horticoles. D'ailleurs, les jardiniers se montrent de plus en plus connaisseurs dans ce domaine et exigent des variétés particulières en fonction de leur taille, de leur couleur, de leurs feuilles, de la forme de leurs inflorescences ou encore de leur rusticité même si bon nombre s'adaptent bien en zone 4.

 «Le monde des graminées est extrêmement vaste et les amateurs commencent à se rendre compte à quel point ces plantes sont polyvalentes et de peu d'entretien. Ils découvrent aussi que certaines espèces méconnues rivalisent de beauté et de délicatesse avec les variétés plus populaires comme le fameux calamagrostis "Karl Foerster" par exemple», dit Fred Oehmichen. Souvent considéré comme un des pionniers en matière de graminées au Québec, l'architecte paysagiste est aussi copropriétaire de la pépinière Oka fleur qui en tient des dizaines de variétés (1945, chemin Oka; ouvert jusqu'à la fin octobre, sauf le dimanche).

Un scandale écologique

 L'expert rappelle que le mois d'octobre est propice à la plantation des graminées même si le choix est habituellement plus limité qu'en mai. Par contre, c'est souvent à cette époque de l'année qu'elles sont à leur apothéose. Cela permet d'avoir une meilleure idée de leurs caractéristiques même si elles sont normalement de plus petite taille quand elles poussent en pot. Fred Oehmichen conseille néanmoins de planter des gros sujets qui seront moins affectés par les périodes de gel et de dégel au cours de l'hiver, un phénomène qui fait émerger les plantes du sol et les exposent mortellement aux grands gels. Soulignons que s'il existe un certain nombre de graminées qui peuvent résister sans peine en milieu sec, la plupart des grandes espèces, notamment les miscanthus, exigent un arrosage régulier en période de canicule ou de sécheresse. Sinon, leur taille sera réduite et la floraison moins exubérante, parfois même absente chez les variétés qui fleurissent tardivement.

 Certains miscanthus, notamment le magnifique et populaire «Variegatus» au feuillage panachée ou le «Zebrinus» aux feuilles striées de jaune ont besoin d'une longue saison ensoleillée et chaude pour fleurir, ce qui se produit très irrégulièrement chez moi, sur la Rive-Sud.

 Fred Oehmichen estime par ailleurs que couper les graminées au cours de l'automne est un véritable «scandale écologique». Non seulement, les plantes restent en beauté une bonne partie de l'hiver mais elles servent de refuge à une foule de petites bêtes utiles, notamment les coccinelles. Un point de vue que je partage en partie seulement, car j'ai vécu plusieurs mésaventures à ce sujet. En effet, si vous possédez une touffe de graminées d'assez grande dimension, l'endroit peut devenir un excellent refuge hivernal pour les mulots. Ceux-ci profiteront alors de leur abri pour manger goulûment l'écorce des arbres et arbustes voisins.

 Pour cette raison, au grand regret de ma tendre moitié, je rase bon nombre de graminées sur mon terrain vers la mi-octobre et je les recouvre de quelques centimètres de compost. Mais si les mulots ne sont pas un problème, vous pouvez les conserver tout l'hiver et les tailler à 30 cm de hauteur en mars (du moins chez les miscanthus) pour éviter que le feuillage ne s'envole chez tous les voisins. Pourquoi 30 cm? Parce que la nouvelle pousse qui est logée dans la veille tige atteint déjà cette hauteur au cours de l'automne. Je dois toutefois admettre que mes plantes n'ont jamais souffert du traitement automnal que je leur fais subir. Cette saison, elles étaient particulièrement vigoureuses et en beauté.

 Faites comme moi, mettez en scène des graminées pour égayer vos automnes.

QUELQUES SUGGESTIONS...

 > Calamagrostis «Karl Foerster»: probablement la graminée la plus utilisée dans les parcs et espaces publics. Et pour cause. Elle fleurit tôt, parfois en juillet, et devient dorée des mois durant, parfois jusqu'à la fin de l'hiver. Elle n'est pas envahissante et n'a pas besoin d'être arrosée.

 > Calamagrostis brachytricha: floraison en septembre, plumeau argenté, très délicat légèrement teinté de rose. Hauteur: 1,5 m.

 > Chasmanthium latifolium: floraison estivale et fruits dorés en forme de petites écales. Très joli. Sol humide et mi-ombre. Hauteur: 1 m.

 > Miscanthus: on en compte plusieurs espèces et plus de 100 cultivars. Tous produisent des plumeaux plus ou moins argentés.

 > Miscanthus «Malapartus»: tige rougeâtre au cours de l'automne. Hauteur: 2 m.

 > Miscanthus sacchariflorus: attention! Même s'il est magnifique à la fin août en raison de son plumeau argenté, il est extrêmement envahissant. Il vaut mieux utiliser le cultivar "Silberfeder", très semblable et beaucoup plus sage, sans visées expansionnistes. Il atteint 2 m.

 > Miscanthus purparescens: le coloris automnal de son feuillage tire sur le rouge. Mais l'intensité varie considérablement et le coloris peut être parfois presque absent, du moins si je me fie aux plants qui poussent chez moi. Hauteur: 1,5 m.

 > Miscanthus «Berlin»: floraison rougeâtre, plumeau plutôt doré. Hauteur: 2 m .

 > Mischanthus «Nippon»: floraison très hâtive, très compact. Hauteur: 1,5 m.

 > Molinia «Sky Racer»: feuillage de 60 cm, hampe florale de 2,2 m, unie, sans noeud. Tige très ferme de couleur dorée l'automne.

 > Panicum «Shenandoeah»: le feuillage devient rougeâtre l'automne. Inflorescence minuscule, délicate, aérienne. Hauteur: 1,2 m. Une de mes préférées.

 > Panicum «Dallas Blue»: feuillage bleuté, 1,5 à 2 m. Panicule plus dense que "Shenandoeah".

 > Spodiopogon sibericus: ressemble à un bambou délicat. Le feuillage tourne au rouge l'automne. Hauteur 1,5. Très rustique.

 > Sesleria autumnalis: floraison en septembre, inflorescence semble aux pennisetum. Feuillage vert lime. Hauteur: 45 cm.

 

Photo Armand Trottier, La Presse

Panicum «Dallas Blue».