Oubliez le bambou japonais, le phragmite, la salicaire pourpre et ses cultivars ou encore l'hydrocharide-grenouilette, une plante aquatique vendue souvent pour les jardins d'eau. Toutes ces végétaux peuvent être extrêmement envahissants et dans certains cas, ils occupent déjà d'immenses surfaces au Québec.

Oubliez le bambou japonais, le phragmite, la salicaire pourpre et ses cultivars ou encore l'hydrocharide-grenouilette, une plante aquatique vendue souvent pour les jardins d'eau. Toutes ces végétaux peuvent être extrêmement envahissants et dans certains cas, ils occupent déjà d'immenses surfaces au Québec.

De concert avec la Fédération interdisciplinaire de l'horticulture ornementale du Québec (FIHOQ), deux groupes voués à la protection de l'environnement entreprennent une campagne de sensibilisation auprès du public, des producteurs et vendeurs de plantes de même qu'auprès des écoles d'horticulture afin de limiter la dissémination de plantes exotiques envahissantes dans le bassin du Saint-Laurent.

Nature-Action Québec, un organisme de gestion de projets en environnement et Union Saint-Laurent/Grands-Lacs, une coalition regroupant environ 200 organismes environnementaux du Québec, de l'Ontario et des huit États américains, invitent donc les jardiniers amateurs à ne pas cultiver ces plantes envahissantes.

Si tel est le cas, on recommande de les éliminer de votre jardin, du moins là où elles semblent manifester des ambitions territoriales. Par contre, si elles sont bien confinées dans vos platebandes, comme c'est le cas de la salicaire par exemple, il suffit de veiller à ce que la plante ne fugue pas. Mais si on décide de procéder à l'élimination des indésirables, il faut éviter à tout prix de les déposer dans le tas de compost. On conseille plutôt de les brûler, si cela est possible, ou encore de les jeter aux ordures ménagères où elles auront peu de chances de survivre à la compaction des béliers mécaniques dans les dépotoirs. Les deux organismes insistent notamment auprès des sociétés d'horticulture pour que ces plantes ne fassent pas partie des échanges traditionnels de végétaux entre leurs membres. On recommande aussi de ne jamais jeter des plantes aquatiques problématiques dans les égouts.

Haro sur la renouée

 Biologiste à Environnement Canada et responsable notamment de l'évolution de la végétation en milieu humide le long du Saint-Laurent, Martin Jean explique que les végétaux qui posent problème sont ceux qui envahissent l'environnement et non pas ceux dont le pouvoir d'invasion est limitée seulement au jardin. La renouée japonaise ou bambou japonais (Fallopia japonica), encore vendue en pépinière est un bon exemple à cet égard. Sa capacité d'invasion est exceptionnelle dans certains pays, notamment l'Angleterre, où des dizaines de milliers d'hectares sont aujourd'hui occupés par cette plante. Originaire d'Asie, introduite en Nouvelle-Angleterre, on a découvert récemment que la plante avait formé quelques petites colonies sauvages le long du Saint-Laurent dans la région de Québec et qu'elle s'était fortement implantée sur les pentes des plaines d'Abraham. Dans certains cas, elle domine entièrement le milieu après avoir fait disparaître toute autre végétation.

Or, la renouée est extrêmement coriace et il faut souvent des années d'efforts (coupe, déracinement, traitement avec des herbicides) pour en venir à bout, comme de nombreux jardiniers ont pu le constater. Même le populaire cultivar panaché, Fallopia japonica «Variegata» manifeste un comportement invasif après quelques années au jardin.

 La salicaire pourpre (lytrhum salicaria), qui a été l'objet de grandes campagnes d'éradication dans l'Ouest canadien parce qu'elle avait comblé de nombreux marais propices à sauvagine, manifeste un comportement étonnant, du moins en terre québécoise. D'origine eurasienne, importé vraisemblablement dans le ballast des navires ou dans le fourrage il y a plus de 150 ans, elle a envahi progressivement le nord du continent, le long des cours d'eau et des endroits humides. Au Québec, elle était omniprésente dans plusieurs régions notamment à Baie-du-Febvre, sur la rive sud du lac Saint-Pierre, mais sa population a chuté radicalement au cours des années sans qu'on sache pourquoi. Toujours considérée comme une plaie, la salicaire et ses cultivars sont vendus à grande échelle en pépinière.

     



L'invasion des cours d'eau

 Offert comme plante aquatique pour les bassins d'eau, le butome à ombelle produit de jolies fleurs bleues. Présent le long du Saint-Laurent depuis 1897, il s'est installé en masse entre les lacs Saint-Louis et Saint-Pierre, et souvent le long du Richelieu. Pour l'instant, sa présence ne semble pas encore poser de problème à la diversité végétale.

Tout aussi méconnue mais vendue aussi pour les jardins d'eau, l'hydrocharide grenouillette est une plante flottante aux petites fleurs blanches. Son pouvoir d'invasion est considérable et déjà, à plusieurs endroits, elle est considérée comme une nuisance importante, explique Martin Jean. Originaire d'Europe et d'Asie, elle a été introduite à des fins ornementales dans un étang de la région d'Ottawa en 1932. Elle est présente aujourd'hui le long du Saint-Laurent et plusieurs de ses tributaires. Sa progression se poursuit toujours. Au lac Saint-François, par exemple, elle couvre entièrement plusieurs canaux au cours de l'été. La campagne de sensibilisation de Nature-Action Québec (www.nature-action.qc.ca et d'Union Saint-Laurent/Grands-Lacs (www.glu.org) vise aussi l'alpiste roseau (dissémination importante entre les lacs Saint-Louis et Saint-Pierre), la châtaigne d'eau, le phragmite et le myriophylle à épi, toutes des plantes rarement cultivées au jardin. Mais le myrioplylle a déjà été offert, il y a quelques années, comme plante d'aquarium. Cette espèce est surtout transportée par les embarcations de pêche sportive ou de plaisance et a maintenant envahi une foule de lacs au Québec où elle est une nuisance majeure.

Quant au roseau commun (Phragmite australis), il est rarement présent dans les platebandes parce qu'il existe une foule de graminées décoratives beaucoup plus belles. Fait intéressant, le phragmite est présent depuis trois millénaires au Québec et il est considéré comme une des plantes à fleurs les plus abondantes sur la planète. Au Québec, son invasion a commencé vers les années 60 lors des grands chantiers routiers. Mais voilà quelques années à peine, indique Martin Jean, on a découvert que les grands champs de phragmites qui parsèment une partie de la vallée du Saint-Laurent sont d'origine européenne, probablement à la suite d'une introduction accidentelle et récente.

Signalons que le groupe Nature-Action Québec offre gratuitement un dépliant sur les plantes envahissantes et même une fiche sur chacune d'elle. On peut les obtenir gratuitement en communiquant avec l'organisme: 450- 536-0422. Version électronique imprimable sur le site web.

 

Photo : Pierre McCann, La Presse

Le phragmite commun rencontré un peu partout au Québec est d'origine européenne et d'introduction récente.