Au chalet, mieux est maintenant synonyme de moins. L'aménagement paysager est de plus en plus écologique. Des municipalités comme Saint-Faustin, près du Mont-Tremblant, ont même interdit la coupe de végétation à moins de cinq mètres des berges. Au bout du compte, les lacs et rivières du Québec, particulièrement fragiles, obtiennent un répit. Les propriétaires, eux, ont congé de pelouse!

Au chalet, mieux est maintenant synonyme de moins. L'aménagement paysager est de plus en plus écologique. Des municipalités comme Saint-Faustin, près du Mont-Tremblant, ont même interdit la coupe de végétation à moins de cinq mètres des berges. Au bout du compte, les lacs et rivières du Québec, particulièrement fragiles, obtiennent un répit. Les propriétaires, eux, ont congé de pelouse!

 Il fut un temps où le summum de l'aménagement paysager aux abords d'un chalet, c'était un beau gazon qui descendait jusqu'au lac ou encore mieux, jusqu'à la petite plage qu'on avait aménagée en nettoyant la «fardoche» au bord de l'eau. Autour de la résidence secondaire, quelques platebandes donnaient au tout un air de proprette banlieue, question de ne pas être trop dépaysé durant les week-ends ou les vacances.

Cette époque est révolue. Pour ceux qui suivent les tendances actuelles et qui sont le moindrement respectueux de l'environnement, mieux est maintenant synonyme de moins. Moins d'arbres coupés, moins de frayères et d'herbiers aquatiques détruits, moins de pelouse et de plantes étrangères à la région, moins de grands dérangements pour la faune locale, moins d'artificiel en somme et plus de naturel.

Pour Robert Lapalme, détenteur d'une maîtrise en administration et gestion de l'environnement, spécialiste d'écologie aquatique et défenseur des lacs depuis des années, c'est une simple question de bon sens.

«En milieu urbain, la nature doit s'adapter et les oiseaux boivent dans les flaques d'eau. Mais en milieu sauvage, il faut s'insérer sans trop transformer pour garder le cachet. Les lacs, particulièrement, sont fragiles. Leur vieillissement (eutrophisation pour les scientifiques) est un processus naturel, mais en brisant leur équilibre et en "artificialisant", on leur donne le coup de grâce.»

L'exemple de Saint-Faustin

À Saint-Faustin, la municipalité a édicté un règlement interdisant la coupe de végétation des berges à moins de cinq mètres d'un plan d'eau. On y a même embauché des stagiaires pour dépister les contrevenants. Mieux encore, on a mis sur pied un programme de «renaturalisation» des rives.

La municipalité offrait ainsi aux citoyens qui s'engageaient à revitaliser leurs berges plus de 300 plants, des arbres et arbustes principalement, dont elle assumait la moitié des coûts. Le programme a connu un immense succès. Selon Évodie Levert, technicienne en horticulture, designer d'extérieur chez Levert Paysage et membre du comité consultatif en environnement de la région, les gens sont de plus en plus ouverts à accepter une vision plus naturelle de l'aménagement paysager.

Alors que M. Lapalme craque littéralement pour la magnifique sagittaria latifolia, une superbe résidente aquatique aux délicates fleurs blanches à coeur jaune, Mme Levert ne tarit pas d'éloges pour le l'iris versicolor, notre emblème, et surtout, pour le myrique baumier, un arbuste «qui adore se mettre les pieds dans l'eau et qui retient le sol comme pas un, en plus de courber gracieusement ses branches au-dessus de l'eau pour empêcher son réchauffement». À notre aménagement, elle suggère d'intégrer un bain ou des cabanes d'oiseaux.

Paysagiste et enseignante à l'Horizon, centre de formation professionnelle du secteur Saint-Jovite de Mont-Tremblant, Ginette Lefebvre estime que la tendance aux aménagements intégrés n'est pas encore assez répandue, sauf dans les secteurs les plus cossus, où l'on semble avoir acquis ce réflexe. Mais encore là, rares sont ceux qui respectent l'idéal de 10-15 mètres de berges naturelles. Et encore moins se donnent la peine de «renaturaliser» les berges si le terrain est déjà gazonné. Certaines espèces de plantes, pourtant très bien adaptées et très jolies, sont sous-utilisées, les cornouillers par exemple, les kalmias, le thé du Labrador ou les rhododendrons indigènes. Avant d'aménager, Mme Lefebvre conseille fortement d'observer ce qui existe déjà.

Exit la copie d'une courde banlieue

Technicien en aménagement paysager chez F.J. Richer paysagiste, de Mont-Laurier, Jonathan Richer travaille surtout au bourdonnant Mont-Tremblant. Selon lui, la demande d'aménagements plus naturels va en grandissant: «Les gens ne veulent plus une copie de leur aménagement urbain. Ils veulent quelque chose de plus adapté et qui ne les forcera pas à passer la tondeuse alors qu'ils veulent se reposer! Ils nous demandent de couper le moins possible. C'est la forêt et non la ville qui s'amène maintenant au chalet.» Même les matériaux inertes subissent ce virage. Plus question de pavé uni, d'asphalte ou de béton pour les branchés. On opte plutôt pour la pierre naturelle ou taillée.

Informés par les associations de riverains, les gens sont de plus en plus sensibilisés à l'environnement: «Si on arrive au bord d'un lac, en moins d'une heure, on a la visite d'un inspecteur de la faune ou de la ville.» C'est toutefois en montagne surtout qu'il travaille.

«Si les gens plantent eux-mêmes, ils doivent être conscients du type de sol auquel ils ont affaire: alors que le bord des rivières peut être très argileux, comme à Mont-Laurier, le mont Tremblant est essentiellement rocheux. En hauteur, c'est plus sablonneux.» S'il a un penchant pour l'amélanchier, qu'il trouve particulièrement adapté, M. Richer a eu un coup de foudre récent pour une graminée, la calamagostide, qui fait de magnifiques et immenses massifs.

Si votre chalet est ombragé ou mi-ombragé, optez pour des variétés de plantes qui ne craignent pas ces conditions, comme les hostas ou les astilbes. Selon lui, les erreurs les plus fréquentes des non-initiés (cela vaut aussi bien au chalet qu'en ville) est de ne pas avoir d'idée d'ensemble et d'acheter trop de variétés en les éparpillant ici et là pour un effet «pizza» plutôt médiocre et assez choquant. Trente belles plantes différentes, ça ne fait pas nécessairement un beau massif, conclut-il. Enfin, il rappelle que contrairement à l'ancien credo, on peut planter tout l'été à condition de bien arroser.

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À consulter:

PROTÉGER ET RESTAURER LES LACS

Robert Lapalme

Éditions Bertrand Dumont


Robert Lapalme est une sorte de gérontologue des lacs, habitué à se pencher sur leur vieillissement, qu'il soit naturel ou dramatiquement accéléré par l'intervention humaine. Depuis des décennies, l'agriculture et l'intervention humaine sur les berges et les plans d'eau ont accéléré leur eutrophisation.

Dans Protéger et restaurer les lacs, il nous incite à nous pencher sur ce phénomène de vieillissement en nous proposant de nouvelles façons de concevoir notre aménagement paysager pour nous intégrer sans heurts à la nature environnante.

Si certaines parties sont un peu scientifiques, d'autres sont beaucoup plus pratiques. L'auteur nous donne ainsi des idées de renaturalisation des berges, proposant des plantes indigènes et des types d'aménagements divers. Il nous suggère aussi d'aménager un marais filtrant (eh oui, ça peut être très joli) et nous rappelle que non seulement les riverains, mais tous les proprios, à des kilomètres à la ronde, peuvent avoir un impact négatif sur les lacs et cours d'eau s'ils ne prennent pas des précautions minimales pour respecter la nature.