Les champs sont en fleurs ! Pour le plaisir de vos yeux, La Presse a visité deux fermes florales situées à proximité de Montréal. Coup d’œil sur le marché québécois de la fleur coupée, un marché féminin, biologique… et en plein essor.

Par un mercredi matin du mois de juillet, c’est jour de récolte chez Picaflore, ferme florale de Saint-Marc-sur-Richelieu, en Montérégie. La fermière-fleuriste Valérie Goulet s’active dans l’allée des zinnias, un petit sécateur en main. Il y en a des rose pâle, des orangées, des pêche et crème, des dorées, des lime, des lilas…

Valérie Goulet a lancé sa production officielle en 2019. Cette année-là, au ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation au Québec (MAPAQ), l’agronome Caroline Martineau a vu apparaître plusieurs fermes florales dans la province. En 2019, elle en avait recensé une quarantaine en fouillant sur l’internet et les réseaux sociaux. L’hiver dernier, elle en comptait plus de 100. « Après la COVID-19, ça a commencé à augmenter en flèche », souligne la conseillère en agroenvironnement et en horticulture ornementale au MAPAQ.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Valérie Goulet, fermière-fleuriste et fondatrice de Picaflore

Tout m’attire du métier de fermière-fleuriste. Les fleurs, le fait de travailler à mon rythme, dehors, dans toutes sortes de conditions, le partage sur les réseaux sociaux, les rencontres que je fais dans les marchés fermiers, la fabrication de bouquets…

Valérie Goulet, fondatrice de Picaflore

Quelques fleurs de Picaflore
  • Zinnia

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    Zinnia

  • Dahlia

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    Dahlia

  • Rudbeckia

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    Rudbeckia

  • Rang de zinnias

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    Rang de zinnias

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Derrière cet engouement, on trouve l’influence du mouvement slow flower, qui a émergé en 2014, aux États-Unis, et qui encourage une production locale et responsable de fleurs coupées. « Plusieurs producteurs du Québec ont suivi une formation et en ont fait un mode de production, un mode de vie », explique Caroline Martineau, qui souligne que le mouvement est surtout porté par des femmes.

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Le champ de Picaflore

Les réseaux sociaux ont popularisé la tendance, si bien que d’autres entrepreneurs – dont des producteurs maraîchers – se sont mis eux aussi à cultiver des fleurs, sans nécessairement épouser la philosophie du slow flower.

Quelques fleurs d’Yvanne fleurs paysannes
  • Ammi magus

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    Ammi magus

  • Ancolie géante

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    Ancolie géante

  • Digitale

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    Digitale

  • Pois de senteur

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    Pois de senteur

  • Centaurée

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    Centaurée

  • Immortelle

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    Immortelle

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Le slow flower

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Yvanne Maurel, fondatrice d’Yvanne fleurs paysannes

Yvanne Maurel est une autre digne représentante du slow flower. Formée en arts plastiques, forte de 17 années d’expérience comme entrepreneure dans une ferme agricole, elle voit dans la production de fleurs coupées la réunion de ses deux passions. Elle a lancé son entreprise Yvanne fleurs paysannes en 2019 et produit aujourd’hui une cinquantaine de variétés dans son champ de Saint-Jean-de-Matha, dans Lanaudière. Sa production est écologique, comme celle de la majorité des fermières-fleuristes.

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Un pierrot blanc… et une sauterelle

Ce qui me plaît le plus, c’est d’avoir l’impression de faire partie d’un tout. Quand on travaille en biologique, il faut être vraiment à l’affût : observer, ne rien perdre, tout redonner à la terre. C’est une logique qui a d’autant plus de sens aujourd’hui.

Yvanne Maurel, fondatrice d’Yvanne fleurs paysannes

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Zinnia

Les fermières-fleuristes vendent leurs fleurs dans des marchés fermiers, à la ferme même ou en abonnement, et aussi chez certains fleuristes. Chez Binette et filles, au marché Jean-Talon, 80 % des fleurs offertes en été sont de provenance locale. « C’est ma nature, d’abord, et la clientèle le demandait, explique la copropriétaire du magasin, Myriam Binette. J’adore quand on reçoit nos fleurs locales. À chaque période de la saison, on se sent comme des enfants devant un comptoir de crème glacée. Ce sont des fleurs magiques. »

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Des fleurs fraîchement cueillies

Se fleurir de saison, c’est comme manger de saison ; ça nécessite de changer un peu notre perception des choses. Il y a un travail à faire auprès de la clientèle, mais les gens sont hyper prêts. Je les sens touchés par la fleur locale, par la fleur lente, qui a quelque chose à exprimer et qui est loin de la fleur importée, botoxée, sans vie, qui ne touche plus l’âme des gens.

Yvanne Maurel, fondatrice d’Yvanne fleurs paysannes

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Muflier (à gauche)

Énorme défi

Caroline Martineau, du MAPAQ, voit elle aussi une conjoncture favorable pour les fleurs coupées locales, qu’elle se plaît à appeler les « Belles du Québec ». « Maintenant, il va falloir conserver l’intérêt de la clientèle et viser la qualité du produit », dit-elle. Selon l’agronome, il faudra aussi réfléchir à la difficulté d’assurer une production à longueur d’année. Au Québec, cela nécessite bien sûr une production en serre. « Il y en a déjà eu dans les années 1980, 1990, mais avec les coûts de chauffage et la concurrence outre-mer, ça a beaucoup diminué », explique Caroline Martineau, selon qui on pourrait impliquer des producteurs maraîchers qui cultivent déjà des légumes en serre pendant l’hiver.

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Valérie Goulet

Les fleurs du Québec, ce ne sont pas des fleurs figées qu’on retrouve souvent dans la fleuristerie traditionnelle. Ce sont des fleurs champêtres, rustiques, qui ont du mouvement et qui sont adaptées à notre climat. Des fleurs que vous avez peut-être déjà vues dans les jardins de votre grand-mère.

Valérie Goulet, fondatrice de Picaflore

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Nigelle

C’est d’abord une fleur naturelle, qui a une histoire à raconter, parce qu’elle a eu ses accidents de parcours, elle a courbé, elle s’est tordue. Tout ça s’inscrit dans la fleur et c’est comme ça qu’on arrive à faire de la création. C’est une fleur lente, qui a développé sa propre magie, sa propre poésie.

Yvanne Maurel, fondatrice d’Yvanne fleurs paysannes