Les toits verts sont-ils une tendance passagère ou vont-ils vraiment s'implanter?

D'abord, le phénomène de toitures jardins s'observe surtout dans les centres-villes, là où la qualité de l'air, la rareté des espaces verts, l'intensité du bruit et la surchauffe estivale sont problématiques. Or, les toitures végétalisées, dont on ne parlait presque pas il y a une dizaine d'années, font maintenant partie du paysage urbain.

En 2007, les toits verts occupaient une superficie d'environ cinq millions de pieds carrés en Amérique du Nord, dont 35 000 pieds carrés dans la région de Québec, soit sensiblement la même proportion qu'à Montréal, selon des statistiques compilées par Green Roof. Trois ans plus tard, les jardins- terrasses et les toits potagers se sont multipliés. Ainsi juste pour l'année 2009, les projets de toitures végétalisées ont augmenté de 16 % en Amérique du Nord.

L'agronome Marie-Anne Boivin, conférencière et coordonnatrice du développement chez Soprema - une entreprise spécialisée dans les toits verts - explique la hausse par une meilleure connaissance du produit et des avantages qu'il procure.

«En ce sens, les expériences réalisées sur plusieurs bâtiments ont clairement démontré, dit-elle, que l'ajout d'une terrasse jardin entraînait des économies d'énergie, une plus-value de la propriété et une meilleure qualité de vie. Non seulement la présence de végétation abaisse-t-elle la température de la maison en été, mais elle contribue aussi à mieux isoler la résidence en hiver tout en réduisant de moitié les bruits extérieurs.»

Toutefois si l'envie vous prenait de couvrir la totalité de votre toiture de plantes, de fleurs, de graminées ou d'arbuste, il faudra au préalable demander les conseils d'un expert. Heureusement, vous aurez tout l'hiver pour concocter votre projet, lire la documentation et étudier les diverses possibilités.

Marie-Anne Boivin explique qu'en effet il existe trois types de toitures végétalisées : les extensives, les semi-intensives et les intensives.

«Or, dans les projets résidentiels, on recommande très souvent la formule du jardin- terrasse, explique-t-elle, parce qu'ainsi les occupants peuvent profiter d'une section pour le jardinage et d'une autre pour installer les meubles de patio, les chaises longues et le barbecue.»

De plus, comme ces types de projets sont dans la catégorie extensive ou semi-intensive, ils sont de faible poids - environ six pouces de terreau - , ils exigent peu d'entretien et ont un faible coût d'immobilisation. Toutefois, la catégorie semi-intensive offre une végétation plus variée tout en demeurant abordable.

La dernière catégorie, soit les intensives, est recommandée pour les entreprises, les édifices publics, les restaurants, les hôtels et les nouveaux bâtiments parce qu'ils exigent, selon Mme Boivin, des systèmes d'irrigation et de drainage plus sophistiqués ainsi que des toits à structure renforcée capable de supporter plus d'un pied de terre et la neige en hiver.

Points à considérer

Mais avant d'envisager l'installation d'une toiture végétalisée, encore faut-il répondre à certains préalables : avoir un toit plat ou légèrement incliné (garage, résidence, grosse remise), une bonne charpente de maison et une membrane d'étanchéité. Si ces conditions sont remplies, les étapes de construction peuvent alors s'enclencher. Toutefois, avant de mettre le substrat, il faudra installer un panneau de drainage, une barrière antiracine, le terreau et pour finir la couche végétale. On estime que le poids total de cette installation devrait se situer entre 25 à 45 livres par pied carré. Ce qui inclut la charge de neige en hiver. Au-delà de ces poids, il sera sans doute nécessaire de renforcer la structure.

Quant aux prix des toitures végétalisées, ils varient en fonction du type de toit choisi, de la sorte de végétaux et s'il y a nécessité ou non d'effectuer des travaux de renforcement. Ainsi, un article paru dans le magazine Urbanité de septembre 2006 souligne que la réfection d'une toiture traditionnelle de bitume à Montréal coûtait de 54 $ à 97 $ le mètre carré, il y a cinq ans, alors que l'installation d'un toit vert extensif, selon les modifications requises, pouvait coûter de 162 $ à 194 $ le mètre carré.

Eau et entretien

Un des points qu'il est important de ne pas oublier dans ce type de projet, c'est d'avoir de l'eau à proximité. «Il peut s'agir d'un robinet sur le toit, mentionne Mme Boivin, ou d'un simple boyau d'arrosage connecté plus bas. Mais l'eau, c'est vraiment indispensable surtout les deux premières années notamment parce que les vivaces, les graminées et les fines herbes auront besoin d'eau pour s'enraciner.» Autrement, l'entretien reste minimal et ressemble à celui que l'on fait dans un jardin ordinaire, soit enlever les mauvaises herbes, remplacer les plants morts, fertiliser, veiller à retirer les semis d'arbres charroyés par le vent ainsi que nettoyer la surface au printemps et à l'automne. Généralement pour les plantations en terrasse, on recommande des vivaces adaptées à la zone 2 ou 3, alors qu'habituellement les plantes de zone 4 sont la norme pour la région de Québec, mais vu la faible épaisseur du terreau, les plantes plus nordiques s'adaptent très bien.

Au nombre des inconvénients, il faut retenir que l'efficacité énergétique et la rétention des eaux pluviales dépendent du modèle de toiture. Les plus performants, mais aussi les plus dispendieux, étant les toits verts de type intensif. Ceux-ci coûtent aussi plus cher d'entretien et d'immobilisation. Enfin pour certains, les jardins terrasses et toits verts auront toujours le défaut d'être laids en hiver. Conseil pratique, évitez de trop les regarder de novembre à avril.

Sur Internet : www.soprema.ca; document Lignes directrices de conception de toits verts de la SCHL à www.cebq.org; www.urbainculteurs.org