Il a l'air artificiel, et il l'est, du moins en partie. C'est qu'on a utilisé une teinture spéciale pour colorer ses bractées, une teinture qui porte d'ailleurs bien son nom: Fantasy Colors. Une dizaine de coloris sont offerts et on peut en utiliser deux sur le même plant.

Il a l'air artificiel, et il l'est, du moins en partie. C'est qu'on a utilisé une teinture spéciale pour colorer ses bractées, une teinture qui porte d'ailleurs bien son nom: Fantasy Colors. Une dizaine de coloris sont offerts et on peut en utiliser deux sur le même plant.

Une fois les bractées teintes, il suffit tout simplement de vaporiser sur la plante une colle diluée contenant des «brillants.» La plante perd de son authenticité, mais l'effet est spectaculaire.

Certains n'apprécient guère, et je suis du nombre, ce qui n'empêche pas les nouveaux venus d'être très populaires. Par exemple, vendredi le 25 novembre, une grande surface de la Rive-Sud a vendu son arrivage de 60 plants en une heure. Les coloris les plus appréciés sont le bleu, le doré et le violet... avec paillettes, bien entendu.

D'abord mis en marché en Europe au tournant du siècle, les poinsettias colorés artificiellement ont fait leur apparition l'an dernier aux États-Unis. Le succès fut immédiat. Présenté en juillet à la grande foire horticole de Columbus, en Ohio - la plus grande exposition du genre sur le continent avec ses 10 000 visiteurs -, ils ont attiré tous les regards. La conférence donnée à leur sujet a été l'une des plus populaires de l'événement, dit Éric Brisebois, conseiller en serriculture qui y assistait pour le compte de l'Institut québécois du développement de l'horticulture (IQDHO), une organisation professionnelle bien connue dans le milieu horticole.

«La grande majorité des participants à la conférence avait déjà essayé la teinture. Tous semblaient très satisfaits des résultats et des ventes, poursuit-il. Aux États-Unis, le commerce des poinsettias commence à la fête de l'Action de grâce américaine, fin novembre. Maintenant des jardineries organisent même des sessions de "coloriage" de poinsettias à l'intention des parents et de leurs enfants. Dans certains cas, la teinte du poinsettia est même devenue une activité scolaire.»

Cette teinture spéciale ne nuit d'aucune façon aux feuilles, ni aux bractées qui absorbent le produit. La coloration se maintient donc tant que les feuilles colorées persistent aux branches et l'entretien de la plante ne change pas. Pour des raisons évidentes, c'est le poinsettia à bractées blanches qui est le plus souvent utilisé, au point d'ailleurs qu'on en a manqué cette année, dit Julie Francoeur, de Foliera, la maison de distribution qui vend le poinsettia nouveau au Québec. Mais l'usage des Fantasy Colors ne se limite pas à notre euphorbe de Noël. Les primevères, les chrysanthèmes et les lis de calla se prêtent bien aussi à la teinture. On n'arrête pas le progrès!

La situation est pour le moins ironique puisque les hybrideurs de poinsettias ont réussi à produire des dizaines de nouveaux cultivars au cours des dernières décennies, du blanc pur au jaune en passant par tous les tons de rouge et de rose, sans oublier les variétés panachées. On en compte d'ailleurs près de 200 cultivars dont une centaine est vendue plus ou moins régulièrement. Mais la génétique a ses limites. Difficile, en effet, de produire un hybride doté de bractées dorées et violettes en plus d'être couvertes de brillants.

Mais la nature aura au moins le dernier mot. Si vous tentez de faire refleurir votre poinsettia, inutile de dire que c'est le coloris original de la plante qui réapparaîtra.

La plante en pot la plus populaire au monde

Le poinsettia est la plante en pot la plus vendue au monde: autour de 200 millions d'unités par année, dont plus de la moitié issue de boutures provenant des États-Unis.

À elle seule, l'entreprise Paul Ecke Ranch, en Californie, produit 100 millions de boutures. Près des trois quarts des plants vendus sur le marché international sont rouges. Les Américains achètent environ 75 millions de poinsettias, ce qui représente un chiffre d'affaires annuel de l'ordre de 260 millions de dollars américains, le double des ventes d'orchidées, deuxième plante en pot la plus populaire.

Au Canada, l'Ontario produirait environ neuf millions de plants, mais une bonne partie est écoulée sur le marché limitrophe américain. Le Québec compte une dizaine de producteurs et les quatre ou cinq plus importants vendent de 600 000 à 700 000 plants, la totalité sur le marché québécois. Mais la province importe beaucoup de l'Ontario, comme c'est le cas notamment de la plupart des poinsettias teints.