Véronique Lalonde a souri. Des clients comme moi, l'architecte paysagiste en a déjà rencontré. Des néophytes qui se mettent en tête d'avoir un beau jardin mais qui voudraient ensuite se contenter de l'admirer. Tout en me rappelant qu'un jardin exige un minimum de travail, elle a inspecté les lieux et étudié la psychologie de la propriétaire...

Véronique Lalonde a souri. Des clients comme moi, l'architecte paysagiste en a déjà rencontré. Des néophytes qui se mettent en tête d'avoir un beau jardin mais qui voudraient ensuite se contenter de l'admirer. Tout en me rappelant qu'un jardin exige un minimum de travail, elle a inspecté les lieux et étudié la psychologie de la propriétaire...

Envoyant le planque la jeune femme m'a fourni quelques semaines plus tard, en naviguant avec enthousiasme sur Internet pour découvrir l'apparence et les caractéristiques d'une spirée, d'une monarde ou d'un phlox, en lisant que telle ou telle plante était extrêmement rustique, simple d'entretien et résistait à peu près à tout, même aux jardiniers débutants et paresseux j'ai vu qu'elle avait compris.

Que vous décidiez de vous lancer tout seul dans l'aventure de l'aménagement paysager ou que vous confiiez la conception et peut-être même les travaux à un professionnel, il faut d'abord et avant tout répondre franchement aux bonnes questions: quels sont vos goûts? Quels sont vos moyens? Quelle vocation comptez-vous donner à votre jardin? Envisagez-vous d'y ajouter éventuellement une piscine, une balançoire, un jardin d'eau, etc.? Comptez-vous l'entretenir vous-même et, si oui, quels sont vos connaissances et votre intérêt pour la chose horticole?

«La principale erreur des gens inexpérimentés, et la plus coûteuse, c'est de ne pas avoir d'idée d'ensemble du projet, explique Chantal De Menezes, architecte paysagiste aux Serres Primavera de Boucherville. Ils commencent les plantations en se disant qu'ils feront la terrasse plus tard. Quand ils s'y mettent finalement, leur accès à la cour est bloqué et ils sont obligés de défaire ce qu'ils ont déjà fait.»

«Un bon plan, ou à tout le moins une consultation pour au moins s'assurer que ce qui va être fait sera bien fait, c'est un investissement. Après ça, le terrassement, vous pourrez toujours le faire vous-même. Mais partez au moins du bon pied en évitant les gaffes qui peuvent coûter très cher. Quand le patio et les constructions sont déjà en place et que, une journée de canicule, on se réveille en se disant qu'on aimerait bien ça avoir une piscine, c'est tout un casse-tête. Une plante, ça se change facilement de place, mais un cabanon ou un trottoir, c'est une autre paire de manches. Avec un plan en main, vous pourrez faire le terrassement vous-même et à votre rythme», renchérit Pierre Desrochers, architecte paysagiste aux Embellissements paysagers Laval.

Si on compte installer éventuellement un système d'éclairage, il faut au moins le prévoir pour mettre en place les manchons sous les constructions.

Il faut aussi trouver un moyen de canaliser toute l'eau qui vient des gouttières, qui risque de noyer les plantations ainsi que les sentiers et qu'il faut éviter de déverser chez le voisin. S'attaquer à l'aménagement paysager constitue aussi, rappelle Mme De Menezes, le moment idéal pour régler les problèmes d'accumulation d'eau sur un terrain.

Pour les paresseux, un bon système d'irrigation s'impose si on ne veut pas pester deux ou trois heures par jour, le tuyau en main, à tenter de sauver nos nouvelles plantes de la canicule. Ceux qui voyagent fréquemment l'été doivent aussi investir dans l'irrigation. «Même s'il vous l'a promis, attendez-vous à ce que votre voisin n'arrose que la veille de votre retour...» prévient M. Desrochers.

Si vous êtes prêt à vous renseigner et à vous documenter, vous pouvez évidemment prendre en main le projet en entier et même faire quelque chose de «très beau avec très peu», assure M. Desrochers. Mais attention: «La créativité n'est pas donnée à tout le monde. C'est comme en décoration, sauf que l'aménagement paysager, tout le monde le voit!»

Mme De Menezes rêve d'ailleurs d'une émission de télé sur le modèle de Décore ta vie, où un architecte paysagiste concevrait un aménagement à moins de 1000 $...

Même s'il navigue habituellement dans les projets de 300 000 $ et plus, M. Desrochers a tout de même quelques tuyaux beaux-bons-pas chers pour le commun des mortels: «D'abord, il s'agit de jouer avec la combinaison formes-couleurs-textures, dans cet ordre. Il y a des plantes-pas-de-troubles, simples et connues, mais qui sont quasiment délaissées par les horticulteurs qui recherchent toujours les nouveautés et l'extraordinaire. Les débutants, par contre, pourraient en tirer avantage.»

La spirée Flaming Mound, par exemple, estime-t-il, est une plante quasi parfaite. «Elle est belle, pas chère, ne demande aucun entretien à part la taille après la floraison, et je ne lui connais aucune maladie.»

D'autres suggestions comme ça? «Eh! oui, assure M. Desrochers. Les hémérocalles Stella de Oro, qui fleurissent pendant deux mois, les coréopsis Moonbeam, extrêmement florifères, qui se vendent en petits pots de 4 pouces à environ 2 $.»

Gare à la pizza all-dressed

Les pièges qui guettent l'apprenti jardinier sont nombreux. En tête des horreurs que s'empressent de pointer nos trois spécialistes: la pizza all-dressed, c'est-à-dire les dizaines de plantes pour lesquelles on a eu un coup de coeur et qu'on répartit également.

Notre collègue Pierre Gingras est formel: «On achète les plantes par groupe de trois (au minimum). Idéalement, même si c'est plus cher, on se procure des vivaces de grande taille, pour avoir un effet tout de suite. Dans le cas de certains arbres, on peut ainsi gagner 10 ans.»

Si vous sous-estimez l'entretien, le rêve pourrait virer au cauchemar: «Les topiaires, par exemple, sont de véritables sculptures, des bonsaïs grandeur nature qu'on doit tailler constamment. Sinon, au bout d'un an, c'est une abomination consommée.»

À toute autre chose, Pierre Gingras préfère l'effet naturel. «Mais pour l'obtenir, il faut mettre l'effort.»

«Un jardin a besoin d'un point d'attrait fondamental. Ça peut être une sculpture, un vase, un banc dans un coin, un bain d'oiseau, etc.» rappelle M. Desrochers.

À la pépinière Jasmin, on est souvent appelé à la rescousse par des jardiniers désemparés qui ont vu trop grand ou qui ont commis certaines erreurs de base. Au risque de vous servir quelques lapalissades, on vous rappelle donc, comme doivent le faire fréquemment Réjean Geoffrion, Jean Grenon ou François Dubois ce qui suit:

Une plante, ce n'est pas un bibelot, ça demande un minimum de soins;

Des plantes, ça pousse. Le joli petit arbre délicat peut devenir un gros monstre dont vous ne saurez plus que faire. C'est seulement avec le temps que votre plant va affirmer son caractère.

Plantes et insectes vont souvent de pair; alors développez un peu le scout en vous.

On ne peut pas planter n'importe quoi n'importe où; l'ensoleillement, la nature du sol, la zone où vous demeurez, les plantes environnantes, tout peut jouer...

Il ne faut planter ni trop profond ni trop en surface.

Les indications sur un emballage, on a le droit de les lire, et le conseiller, on a le droit de lui demander des conseils. On vous dit ça comme ça, pour éviter que vous ne coupiez les bourgeons en vous imaginant effectuer une taille salutaire.

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Pour plus de renseignements :

> Association des architectes-paysagistes du Québec: (514) 990-7731, info@aapq.org ou www.aapq.org

> Les Embellissements paysagers Laval: (450) 688-0971, epl@creation-paysage.com ou www.creation-paysage.com

> Serres Primavera: serres.primavera@videotron.ca

> Véronique Lalonde: veronique@hotmail.com

> Pépinière Jasmin: (514) 332-2978