France Fleury est de Beauceville. Elle a quelque 50 années de vie dans le dos. Délicate et d'une grande civilité, elle n'en est pas moins énergique. Sa passion : les maisons en pièce sur pièce plusieurs fois centenaires de chez nous qu'on laisse derrière, sans maître parfois.

Elle les déniche avant qu'elles ne tombent en ruine, qu'on ne les démolisse ou que les pompiers ne les emploient comme «foyer» d'entraînement.

 

Son entreprise, Maison Ancestrale, les achète, les démonte, numérote chaque pièce et les entrepose. Ensuite, elle les vend à des gens qui sont épris des bois de construction «gorgés» de vécu et d'authenticité et chez lesquels elle remonte les maisons.

Ces gens sont tantôt à l'aise, tantôt à revenu modeste. Tandis que Mme Fleury se félicite que, sur le marché, existe un nettoyant (Techni-Seal) qui restitue au bois d'antan ses propriétés objectives et esthétiques.

«Des structures aussi massives témoignent de l'ingéniosité de nos lointains aïeux dans la précision et la finesse de la coupe de sorte que les poutres s'imbriquent les unes dans les autres sans le moindre clou», plaide-t-elle.

Les chevilles de bois, par exemple, prenaient part à l'intégrité des ouvrages puisque réagissant pareillement aux variations de température et d'humidité. Elles tenaient fermement, mieux que les clous.

Sauvegarde

France Fleury professe, par ailleurs, que la récupération et la reconstruction de maisons d'autrefois viennent au secours du patrimoine. Elles contribuent à leur sauvegarde et en perpétuent le souvenir.

La facture, les entailles, l'usure, les combles, la superficie, la présence de chevilles ou de clous, les traits de hache ou de scie infèrent l'identité et l'époque de chaque habitation. Pour y voir plus clair, elle consulte des historiens, des cartographes et même des archéologues tel Yves Chrétien. Car, avant 1870, les maisons, au pays, n'étaient pas enregistrées.

«À moins de référer aux contrats et testaments dans lesquels les bâtiments étaient décrits jusque dans le détail», précise Mme Fleury, férue d'histoire des maisons de chez nous, encore qu'elle détienne un baccalauréat en communication et marketing de l'Université Laval.

Sa passion, elle l'a opposée à celle de René, son mari, qui, de son vivant, connaissait la construction et ses métiers. Ensemble, ils se sont épris de ces maisons au bois lézardé et raviné du temps jadis. Ils en ont acquis une qu'ils ont déconstruite, entreposée dans le but de la remonter et l'habiter. Leur projet fut différé. Il n'en fut pas moins fécond puisque France Fleury a résolu d'en faire profession.

Quelques maisons entreposées

Elle en a quelques-unes d'entreposées. «Je peux vous en vendre une et vous constaterez qu'elle est moins chère que vous ne pensez», défie-t-elle.

Déjà, elle a essaimé à Mont-Tremblant. Puis, à Saint-Eustache. Tandis qu'elle a été au premier rang des exposants au salon Chalets et maisons de campagne de Québec, l'an dernier. «Julie Cantin, sa présidente, et son équipe ont cru en mes idéaux et surtout partagent ma passion pour les maisons ancestrales», trouve-t-elle. Elle y avait exposé une maison en pièce sur pièce, vieille d'au moins 200 ans.

À Mont-Tremblant, la maison en pièces numérotées a servi à l'agrandissement d'une maison semblable qu'un particulier avait hérité. «Il n'a pas voulu agrandir suivant une technologie et des matériaux actuels. Il a tenu à conserver à sa maison son caractère d'autrefois», explique-t-elle.

Celle de Saint-Eustache provient d'une grande résidence de Bellechasse datant des années 1730. Telle qu'implantée, elle est tout simplement spectaculaire. Elle donne lieu à un «hall commercial» pour la mise en valeur de la lavande et ses sous-produits.

Petites

Les maisons du Régime français étaient petites, pour ne pas surpasser le seigneur et pour l'impératif de se garder au chaud. «Autour de l'âtre central», souligne Mme Fleury.

Certaines ne mesuraient que 10 pieds sur 12 pieds. La plupart, 20 X 24, 24 X 26 ou 24 X 30. En revanche, le dégagement en hauteur était moindre car les gens étaient petits.

Les combles, eux, étaient habités pour une part, servaient de lieu d'entreposage des grains et céréales pour une autre. C'est par une petite ouverture carrée, dépareillée par rapport aux fenêtres elles-mêmes, qu'on passait le grain.

Autrement, dans la maison, on accédait à l'étage par une échelle de Meunier qui s'apparente à un escalier rudimentaire à pic et «économe» d'espace.

Renseignements : Maison Ancestrale, 418 774-3773; courriel : francbois@sogetel.net