La lumière joue sur notre moral. Tantôt sa présence nous apaise, tantôt son absence nous désole. Ce n'est pas pour rien qu'elle prend autant de place dans le travail des architectes au cours de la conception d'une résidence.

La lumière joue sur notre moral. Tantôt sa présence nous apaise, tantôt son absence nous désole. Ce n'est pas pour rien qu'elle prend autant de place dans le travail des architectes au cours de la conception d'une résidence.

 Le Petit Robert définit la lumière comme étant un «agent physique capable d'impressionner l'oeil, de rendre les choses visibles». Et il est vrai que la lumière a parfois le don de nous surprendre, de nous éblouir.

 Les architectes la vénèrent depuis longtemps et s'évertuent à lui donner la place qui lui revient dans la maison.

 Mies Van der Rohe et Le Corbusier, entre autres, ont passé leur carrière à poursuivre, de façon quasi obsessionnelle, la lumière. Les chefs-d'oeuvre architecturaux qu'ils ont réalisés témoignent de cette quête.

Ainsi, en construisant la Villa turque à la Chaux-de-Fonds, en Suisse, Le Corbusier a su capter la lumière du Jura. La fenestration abondante du côté sud de la maison à deux étages fait pénétrer avec splendeur toute la luminosité.

 On peut aussi penser au Seagram Building, un bloc de verre de 38 étages, érigé en 1958 à New York par Mies Van der Rohe ou bien à la Glass House (une maison vitrée sur les quatre côtés) de l'Américain Philip Johnson.

 Ces architectes ont fait l'apologie de la transparence aux dépens des façades en pierre ou en brique. Une démarche dans laquelle s'inscrit l'architecte mexicain Bernardo Gomez-Pimienta. Il n'hésite même pas à comparer la lumière à un matériau qui s'emploie comme si c'était du béton ou du fer.

 «On parle beaucoup des matériaux physiques, mais pas assez de la lumière, alors que c'est ce qu'il y a de plus important. C'est bien plus important que les matériaux qu'on choisit pour les murs», explique l'architecte en entrevue téléphonique depuis Mexico.

 Il est d'ailleurs fasciné par la qualité de la lumière dans cette ville. «La lumière a des caractéristiques très particulières à cause de l'altitude de la ville de Mexico (2000 mètres), ce qui lui confère une teinte étrange avec laquelle je joue beaucoup», ajoute-t-il.

Luminosité nordique

 La lumière est différente d'une ville à l'autre, d'un endroit à l'autre, souligne M. Gomez-Pimienta. Lors de ses visites au Québec, il a constaté la différence de luminosité qui varie selon les saisons.

 Les architectes de la firme ABCP Architecture et Urbanisme de Québec ont décidé de profiter au maximum de ce passage des saisons en intégrant la lumière dans leur nouveau bureau du boulevard Langelier.

 Dans leurs locaux actuels (anciennement l'Armée du Salut), ils sont baignés de lumière grâce à de grandes fenêtres orientées au nord. Bernard Serge Gagné, l'un des deux patrons du bureau, a vite mesuré la différence sur le moral de ses troupes.

 «La lumière est une composante essentielle qui nous permet de bien vivre, qui nous influence», explique-t-il.

Dans tout projet, la lumière est un élément important que l'architecte évalue et avec lequel il travaille. Il s'organise pour tirer le meilleur profit des effets bénéfiques de la lumière selon le site et le type d'éclairage désiré. Ainsi la lumière du nord est idéale pour les bureaux où les gens ont à utiliser des appareils informatiques, mais l'isolation doit être adéquate. Des grandes fenêtres au sud vont réchauffer agréablement un séjour en hiver, mais cela peut vite devenir étouffant en été si on n'utilise pas de pare-soleil.

 À la construction d'une maison, les propriétaires peuvent choisir l'emplacement de leurs fenêtres pour profiter du point de vue, bien entendu, mais aussi de la luminosité. Bernard Serge Gagné suggère de rapprocher les fenêtres d'un mur latéral. Ce décentrage permet de gagner en effet de réflexion et de lumière ainsi qu'en énergie.

 Gagner en clarté

 Que peut-on faire pour gagner plus de luminosité dans une maison déjà existante ? On peut jouer avec la couleur des murs. Les teintes plus pâles vont sur les murs là où la lumière est projetée, et les couleurs plus foncées devraient être ailleurs.

 À l'opposé, si une pièce est trop éclairée, on fait l'inverse en plaçant le foncé sur les murs éclairés qui vont ainsi moins réfléchir la lumière.

 Bernardo Gomez-Pimienta donne l'exemple d'un bâtiment construit par Le Corbusier à Chandigarh, en Inde, où le contraste entre l'extérieur et l'intérieur est fascinant. «Les murs et les planchers sont noirs, alors que dehors le soleil plombe.

 Quand on entre à l'intérieur, nos yeux ont besoin de quelques instants pour s'habituer. Et ensuite, on a l'impression que la lumière colle sur les murs avec une certaine consistance», raconte-t-il.

 Cette fascination pour la lumière est le fil conducteur qui lie toutes les oeuvres de Bernardo Gomez-Pimienta. Il affirme que la lumière lui permet de créer des espaces dans lesquels les hommes sont en mesure de s'exprimer pleinement.

 Celui qui est qualifié d'architecte mexicain le plus important de sa génération aime se concentrer sur des formes simples et épurer l'espace. «Je cherche toujours à en dire plus avec moins de moyens, et la lumière est le matériau le plus approprié pour arriver à ce résultat», dit-il.

 

Photo fournie par BGP Arquitectura

Cette maison conçue par l'architecte mexicain Bernardo Gomez-Pimienta possède de grands panneaux de verre qui filtrent la lumière pour faire varier la coloration de l'espace tout au long de la journée. De plus, en faisant coulisser la baie vitrée, le salon de la Casa GDL se transforme en terrasse intérieure.