Le détail architectural le plus étonnant du Château de cartes se voit en entrant. Attention, l'une des deux parois du vestibule, qui contient un banc, est en acier oxydé. Il se poursuit même à l'extérieur. On jurerait de la rouille.

Le détail architectural le plus étonnant du Château de cartes se voit en entrant. Attention, l'une des deux parois du vestibule, qui contient un banc, est en acier oxydé. Il se poursuit même à l'extérieur. On jurerait de la rouille.

Dans le salon, la cheminée - magnifique - est aussi couverte d'acier oxydé. Sa couleur? Un superbe orangé. «Attention, vous pourriez tacher vos vêtements», m'avertit gentiment le propriétaire. Je me recule et admire chaque motif abstrait du matériau. J'ai l'impression d'être devant un tableau.

Cet acier patinable, connu sous la marque de commerce Cor-Ten, est inusité dans une maison. Il sert plutôt à construire des ponts et on le trouve, notamment, dans la structure du rond-point de l'Acadie, à Montréal. Mais voilà, Sylvie Boulanger, directrice générale de l'Institut canadien de la construction en acier (ICCA) au Québec, reçoit des appels d'architectes. «Ils aiment beaucoup ce matériau et me demandent des conseils pour certaines applications», dit la spécialiste.

Cet acier a aussi la cote auprès des artistes sculpteurs. Marie-Claude Hamelin et Loukas Yiacouvakis sont des adeptes de l'acier patinable depuis longtemps. Ils l'ont d'ailleurs utilisé pour leur maison. Le balcon de la façade, l'espace entre les fenêtres d'acajou et la porte du jardin sont en acier patinable. Mais d'où vient cette fascination? «Sa couleur est riche, il évolue avec le temps et ses dessins dus à l'oxydation se comparent aux veines du bois», explique Loukas Yiacouvakis.

Cet architecte préfère toutefois utiliser l'acier Cor-Ten avec modération dans une habitation. Le principe de l'acier patinable est le suivant : sa surface s'oxyde en fonction des cycles de temps secs-humides et se recouvre d'une couche protectrice contre la corrosion. Il n'a donc pas besoin d'être peint et son entretien est minimal. Il faut compter deux ans pour que la patine se créée.

Pendant cette période, les eaux de ruissellement de la partie supérieure produisent des stries ou des motifs d'oxyde rouge sur la partie inférieure de la structure d'acier. «Il faut éviter que ces coulisses ne tachent d'autres surfaces à proximité», met en garde Sylvie Boulanger de l'ICCA Québec.

Une accumulation d'eau sur l'acier retarderait les cycles humide-sec indispensables à l'acier patinable. De la corrosion pourrait alors faire son apparition. Voilà pourquoi les architectes ont laissé un dégagement de plusieurs centimètres entre le sol et la cheminée du Château de cartes. Après deux années environ, la couleur de la patine se stabilise et adopte une nuance brun rougeâtre.

Dans le cas de la maison de campagne, un mélange d'eau et de vinaigre a été posé à l'éponge sur l'acier patinable situé à l'intérieur de la résidence. L'objectif? Accélérer le processus d'oxydation. Ainsi, la teinte de l'acier des structures intérieures s'est harmonisée à celle de l'acier exposé à l'extérieur. «C'est le fabricant du fer ornemental qui a appliqué l'eau et le vinaigre», précise l'occupant. Celui-ci prévoit apposer un enduit sur la patine de l'acier du vestibule. Ainsi, les visiteurs pourront le contempler sans avoir peur de se tacher.

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Sur Internet: quebec.cisc-icca.ca