Six générations de Paquin se sont succédé, depuis 1882, dans la maison Joseph-Albert-Paquin, située dans l'arrondissement historique du Vieux-Saint-Eustache. La résidence a conservé une étonnante authenticité.La décision fut importante pour Lyette Rousille et Armand Paquin d'acquérir la grande maison familiale, en 1998, de la mère de M. Paquin. « Nous étions très bien installés, à Oka, explique Lyette Rousille. Et nos enfants, Arnaud et Sara, alors âgés de 10 ans et 7 ans, y avaient leurs amis. »

Mais le couple voulait d'une part se rapprocher de Mme Paquin, qui entrait dans l'âge fragile, et d'autre part faire en sorte que la maison reste dans la famille. 

L'HISTOIRE SE RÉPÈTE 

Armand Paquin avait lui-même habité cette maison dans sa jeunesse. « L'histoire s'est répétée par trois fois, raconte-t-il. Mon grand-père, né dans cette maison, l'a quittée en 1914 lorsqu'il s'est marié, puis il y est revenu pour veiller sur ses parents, alors que son fils - mon père ­ - avait 10 ans. Puis mon père a quitté la maison en 1947, année de son mariage, pour y revenir des années plus tard, lorsque j'avais 10 ans. Je suis moi-même parti de la maison à 23 ans, pour y revenir lorsque mon aîné a eu 10 ans. »

HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

À l’arrière, le terrain descend jusqu’à la rivière du Chêne.

Déracinés dans un premier temps, Arnaud et Sara ont ensuite été contents d'en apprendre sur l'histoire, à travers cette maison, avec leurs amis.

UN AN DE RÉNOVATIONS 

La première année suivant l'acquisition, les Rousille-Paquin sont demeurés à Oka avec la mère d'Armand Paquin, le temps d'effectuer quelques rénovations. La cuisine a été dénudée et refaite, de même que la petite salle d'eau du rez-de-chaussée, qui occupe un ancien fumoir. La salle de bains à l'étage a été agrandie, tout en conservant son bain d'origine. 

« Quand j'étais petit, il y avait un gros poêle à bois dans la cuisine, raconte Armand Paquin. Cette cuisine est d'ailleurs visiblement un ajout, puisqu'elle sort du carré principal. Elle fut probablement construite du temps de Joseph-Albert, qui habita la maison jusqu'à sa mort, en 1927. » 

Dans la foulée des travaux, l'ardoise qui couvre les toits a été restaurée, avec le soutien, à parts égales, de la municipalité de Saint-Eustache et du ministère de la Culture du Québec. Un maçon spécialisé s'est attaqué à la restauration de la maçonnerie extérieure. En y consacrant ses fins de semaine, il y a mis quatre ans ! 

Les anciens calorifères à eau chaude fonctionnent toujours, pas au charbon, comme à leurs débuts, ni à l'huile, comme à partir des années 50, mais bien avec une chaudière électrique, depuis 2005.

VITRES ROUGES

C'est justement pour moins voir la suie du charbon que la mode était aux vitrages colorés, comme le « cranberry glass » ornant les fenêtres. Les hauts plafonds de plâtre (12 pi au rez-de-chaussée, 11 pi à l'étage), les portes ouvragées, les boiseries au faux fini de chêne semblable à celui des églises, tout indique que les Paquin étaient des gens à l'aise. 

À preuve, ils aimaient voyager, comme le montrent des documents conservés dans une ancienne boîte à cigares : un passeport unique pour J.-A. Paquin et sa femme, Emma Savard, datant de 1920, une vieille carte de Paris, le menu du petit déjeuner de l'Hôtel Danidi à Venise, etc.

Les murs extérieurs font de 33 à 36 po d'épaisseur. Le plancher, en sapin de Douglas, est très bien conservé, pour avoir été couvert de moquette pendant 110 ans. Au plafond du salon, le lustre, dont les touches de rouge s'harmonisent avec la teinte des vitres, date de 1910 environ, l'époque de Joseph-Albert Paquin. Même chose pour les tentures de velours rouge, que Lyette Rousille teint de temps en temps, pour contrer l'effet décolorant de la lumière. 

« Une architecte consultée pour la décoration a dit que c'était l'une des maisons les plus authentiques qu'elle avait vues », rapporte Lyette Rousille. 

À Noël, des générations de Paquin se réunissent dans la grande maison familiale. Au mur du salon, un portrait à l'huile du père de Joseph-Albert Paquin. L'aïeul a vécu dans cette maison à la fin de sa vie.

HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Toit mansardé recouvert d’ardoise de trois couleurs, corniche ornementée et mur en pierre grossièrement équarrie orné de faux joints.