(Jeddah) Le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken s’est entretenu dans la nuit de mardi à mercredi à Jeddah avec le prince héritier Mohammed ben Salmane au premier jour de sa visite en Arabie saoudite, et a évoqué les droits de la personne ainsi qu’une potentielle normalisation des relations entre Riyad et Israël.

Les deux hommes ont eu une « conversation ouverte et sincère » et M. Blinken a soulevé auprès de Mohammed ben Salmane la question des droits de la personne « d’une manière générale et concernant des problèmes spécifiques », a dit un responsable américain sous le couvert de l’anonymat.

La rencontre, qui a débuté vers minuit heure locale au palais royal et duré une heure et 40 minutes, a permis de trouver un certain nombre de points « de convergence […] tout en reconnaissant là où nous avons des différences », a-t-il ajouté.

« Ils ont discuté d’une potentielle normalisation des relations avec Israël et se sont mis d’accord pour poursuivre le dialogue à cet égard », a encore dit le responsable américain.

Conflit au Soudan

Les discussions ont également porté sur le conflit au Soudan où les États-Unis et l’Arabie saoudite, médiateurs, ne parviennent pas à faire respecter plusieurs trêves entre les généraux belligérants.

Les États-Unis se sont dits prêts à reprendre les discussions à Jeddah avec les émissaires des deux camps s’ils sont « sérieux » dans leur volonté de respecter le cessez-le-feu, qui permettrait d’aider à acheminer l’aide humanitaire.

Depuis le 15 avril, la guerre au Soudan entre l’armée, dirigée par le général Abdel Fattah al-Burhane, et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) du général Mohamed Hamdane Daglo a fait plus de 1800 morts et plus d’un million et demi de déplacés et réfugiés.

MM. Blinken et ben Salmane ont réaffirmé leur « engagement envers la stabilité, la sécurité et la prospérité à travers le Moyen-Orient et au-delà », y compris pour mettre fin au conflit au Yémen, a précisé dans un communiqué le porte-parole du département d’État Matthew Miller.

Le secrétaire d’État américain était arrivé mardi en fin de journée à Jeddah, sur la mer Rouge, au premier jour d’une visite en Arabie saoudite destinée à réchauffer les relations avec le royaume.

L’allié saoudien, à qui Washington a fourni quantité d’armes, joue un rôle clé dans la région et les responsables américains ne cachent pas leur volonté de maintenir des liens forts.

Coalition anti-EI

Après Jeddah, M. Blinken se rend mercredi à Riyad, pour participer à une réunion des ministres des Affaires étrangères du Conseil de coopération du Golfe.

Jeudi, toujours dans la capitale saoudienne, il coprésidera avec son homologue saoudien une réunion de la coalition des pays luttant contre le groupe djihadiste État islamique (EI), créé en 2014 et qui regroupe des dizaines de pays.

Cette visite de trois jours survient sur fond de rapprochement historique entre l’Arabie saoudite et deux ennemis des États-Unis, l’Iran et la Syrie, amorçant un changement de la donne géopolitique dans la région.

La République islamique, ennemi juré des États-Unis et d’Israël depuis des décennies, a d’ailleurs rouvert son ambassade en Arabie saoudite mardi, après une rupture de sept ans.

Les relations entre Washington et Riyad sont compliquées alors que l’administration de Joe Biden a accusé le riche État du Golfe de violations des droits de la personne et d’influencer les prix du brut.

Des militants des droits de l’homme avaient appelé mardi le chef de la diplomatie américaine à soulever cette question avec les autorités saoudiennes.  

Parmi eux, Abdallah Al-Qahtani, un citoyen américain sans nouvelles de son père, Mohammad Al-Qahtani, qui a purgé une peine de 10 ans de prison en Arabie saoudite pour avoir fondé un groupe de défense des droits civiques.  

M. Blinken « doit évoquer la situation de mon père. Est-il en vie ? Est-il torturé ? Nous ne savons pas », a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse virtuelle.  

Quant à la normalisation avec Israël, le sujet est ultra-sensible et constituerait un nouveau chamboulement dans la région après le récent rapprochement entre Riyad et Téhéran, sous l’égide de la Chine, mais aussi entre Riyad et Damas, après des années de froid.

Dans un discours devant le lobby pro-Israël AIPAC lundi à Washington, M. Blinken a affirmé que son pays avait « un vrai intérêt de sécurité nationale à promouvoir une normalisation entre Israël et l’Arabie saoudite ».  

Ces dernières années, les Émirats arabes unis, Bahreïn et le Maroc ont normalisé leurs relations avec Israël, rompant avec des décennies de consensus arabe conditionnant l’établissement de relations avec Israël avec la résolution de la question palestinienne.