(Ouman) Des dizaines de milliers de juifs hassidiques se sont rassemblés dans la ville ukrainienne d’Ouman pour leur pèlerinage annuel, malgré les appels à renoncer à cause du conflit en cours, ont annoncé les autorités dimanche.

Chaque année, des pèlerins hassidiques viennent du monde entier à Ouman pour le Nouvel An juif, Rosh Hashana, sur la tombe de Rabbi Nahman de Breslev (1772-1810), une des principales figures du hassidisme, un courant orthodoxe du judaïsme.

Même si Ouman, ville du centre de l’Ukraine, se trouve relativement loin des fronts où s’affrontent les armées ukrainienne et russe, les autorités ukrainiennes et israéliennes avaient exhorté les pèlerins à ne pas venir pour les célébrations prévues de dimanche à mardi cette année.

Habitués aux sirènes

Les pèlerins citent souvent un texte religieux de Rabbi Nachman dans lequel il promet qu’il « sauvera de l’enfer » ceux qui viennent visiter sa tombe à Rosh Hashana.

« Il y a eu des sirènes, mais venant d’Israël nous sommes habitués aux sirènes, nous savons quoi faire. Nous nous sentons plutôt en sécurité », a déclaré M. Allen, médecin originaire de Yad Binyamin.

PHOTO SERGEI SUPINSKY, AGENCE FRANCE-PRESSE

De jeunes juifs soulignant la Rosh Hashana, le Nouvel An juif, à Ouman en Ukraine

Le voyage n’est pourtant pas sans risque. Située à environ 200 kilomètres au sud de Kyiv, Ouman a été touchée par des frappes russes dans les premières semaines de la guerre. Le mois dernier, un homme a été mortellement blessé par des éclats d’un missile russe abattu par la défense anti-aérienne.

La police a mis en place un vaste cordon pour contrôler l’accès au tombeau, vérifiant les identités et ne laissant passer que des habitants et des fidèles.

Durant Rosh Hashana, la vente d’alcool, de feux d’artifice, de pétards et d’armes factices a été interdite et un couvre-feu décrété de 23 h à 5 h locales, selon une porte-parole de la police régionale, Zoïa Vovk.

Malgré les restrictions, le sanctuaire abritant la tombe bourdonnait d’agitation dimanche. Des pèlerins – seulement des hommes et des garçons – priaient, appuyés contre les murs et colonnes blanches à l’intérieur du bâtiment.

À l’extérieur du temple résonnaient les prières simultanées de centaines de fidèles.

À quelques mètres de là, Yaniv Vakhnin, un autre pèlerin, explique à l’AFP que la guerre ne fait pas peur quand le rabbin Nachman vous protège.  

« Que les prières soient entendues »

« Le rabbin Nachman dit que même s’il y a la guerre dans un pays, celui qui l’écoute ne sera pas affecté par la guerre », assure cet homme de 48 ans originaire de Safed, dans le nord d’Israël.

« Nous sommes donc entièrement protégés » et « nous nous sentons très en sécurité et très heureux d’être ensemble », a dit le fidèle qui a mis 30 heures pour se rendre à Ouman : d’abord un vol vers la Roumanie voisine, puis 15 heures de trajet en bus jusqu’à la destination.  

Ferme sur sa foi, il n’a pas hésité de venir en Ukraine avec ses deux enfants, laissant cinq autres à la maison.

« Nous allons prier Dieu. Et j’espère que l’Ukraine ne sera pas blessée et gagnera la guerre parce que le rabbin Nachman est enterré ici, donc l’Ukraine est protégée », confie M. Vakhnin.

Selon la Communauté juive unie d’Ukraine, une ONG confessionnelle, plus de 23 000 juifs hassidiques sont déjà arrivés à Ouman, frappée à plusieurs reprises par la Russie depuis son invasion de l’Ukraine le 24 février.

La police a préféré ne pas donner le nombre de pèlerins jusqu’à la fin des festivités, craignant une attaque russe. « La seule chose que je peux dire, c’est des dizaines de milliers » de pèlerins déjà arrivés, a indiqué Zoïa Vovk.  

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky, lui-même d’ascendance juive, a félicité dimanche « tous les juifs du monde à l’occasion de la fête ».  

« Que toutes les prières pour la victoire, toutes les prières pour la paix en Ukraine soient entendues », a-t-il déclaré dans son adresse quotidienne tard le soir.