(Hérat) Les talibans ont ordonné aux vendeurs de vêtements à Herat, dans l’ouest de l’Afghanistan, de décapiter les mannequins de leurs magasins, qu’ils considèrent contraires à leur interprétation de la loi islamique.

La directive s’ajoute à une série de mesures des talibans pour imposer dans le pays leur vision rigoriste de l’islam, limitant les libertés publiques, surtout des femmes et filles.

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Un mannequin décapité et un autre la tête couverte dans un magasin de vêtements pour femmes à Herat le 5 janvier 2022. Les talibans ont ordonné aux commerçants de l’ouest de l’Afghanistan de couper la tête des mannequins, sous prétexte que des figures représentant la forme humaine violent la loi islamique.

« Nous avons demandé aux commerçants de couper la tête des mannequins, car cela va contre la charia » (la loi islamique), a confirmé mercredi à l’AFP Aziz Rahman, chef du département pour la Promotion de la vertu et de la Prévention du vice de Herat, troisième plus grande ville du pays avec environ 600 000 habitants.

« S’ils se contentent de recouvrir la tête, ou cachent le mannequin (entier), l’ange d’Allah ne rentrera pas dans leur magasin ou dans leur maison pour les bénir », a-t-il continué, ajoutant que les vendeurs de vêtements ont promis qu’ils obéiraient.

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Les têtes enlevées des épaules de mannequins dans un magasin de vêtements pour femmes à Herat le 5 janvier 2022. Les talibans ont ordonné aux commerçants de l’ouest de l’Afghanistan de couper la tête des mannequins, sous prétexte que des figures représentant la forme humaine violent la loi islamique.

Une vidéo montrant des hommes en train de couper à la scie les têtes de mannequins féminins en plastique circule largement depuis mardi sur les réseaux sociaux.

Plusieurs commerçants de Herat interrogés par l’AFP se sont dits mécontents. « Comme vous le voyez, nous avons coupé les têtes des mannequins dans le magasin », regrette Basheer Ahmed, se plaignant que chacun de ses mannequins lui a coûté 5000 afghanis (environ 42 euros).

« Quand il n’y a pas de mannequin, comment espérez-vous vendre vos produits aux consommateurs ? », a-t-il ajouté.

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Un commerçant posant avec des mannequins dont la tête a été couverte dans un magasin de vêtements pour femmes à Herat le 5 janvier 2022

Les talibans n’ont pour l’instant émis aucune directive nationale concernant ces mannequins en plastique, en conflit avec leur interprétation stricte de la loi islamique, qui interdit la représentation de figures humaines.

Lors de leur premier règne dans les années 1990, les talibans ont choqué le monde avec la destruction de deux statues du bouddha.

Depuis leur retour au pouvoir en Afghanistan, les talibans, qui cherchent à être reconnus par la communauté internationale et aimeraient le retour de l’aide humanitaire cruciale pour l’Afghanistan, se disent plus modérés.

Mais les islamistes ont depuis imposé plusieurs restrictions, notamment aux femmes et aux filles. Ils ont annoncé que les femmes désirant voyager sur de longues distances devaient être accompagnées par un homme de leur famille proche et appelé les conducteurs de taxi à n’accepter des femmes à bord de leur véhicule que si elles portent le « voile islamique ».

Les autorités talibanes ont également multiplié les perquisitions d’alcool et interdit la musique.