(Téhéran) La Marine iranienne a perdu mercredi l’un de ses plus gros bâtiments, le Kharg, qui a coulé en mer d’Oman, après des heures de lutte contre un incendie d’origine obscure et l’évacuation de son équipage.

Sans qu’on puisse faire un lien entre les deux accidents, un immense incendie s’est déclaré en soirée dans une raffinerie du sud de Téhéran, attribué par les autorités à une explosion consécutive à une fuite de gaz. Vers 22 h 30 (14 h HE), le feu était toujours en cours, selon des images de la télévision d’État.  

Selon un communiqué de la Marine, le Kharg a sombré dans la matinée au large du port de Jask, dans le sud de l’Iran. Il n’y a pas eu de victimes, d’après un porte-parole régional de la Marine, Behzad Jahanian, cité par l’agence iranienne Tasnim.

PHOTO MARINE IRANIENNE, VIA ASSOCIATED PRESS

Cette photo non datée diffusée par la marine iranienne montre le navire de soutien Kharg. Le seul seul pétrolier ravitailleur de la marine iranienne, a pris feu et a coulé le mercredi 2 juin 2021 dans le golfe d’Oman dans des circonstances obscures,

Les forces navales de la République islamique d’Iran présentent le Kharg comme un « navire-école de soutien », en service depuis « plus de quatre décennies ».

Mais selon GlobalSecurity.org, site américain spécialisé dans les questions militaires, il s’agit d’un pétrolier « ravitailleur » et « porte-hélicoptères » construit en Grande-Bretagne.

Commandé sous le règne du dernier Chah, le bâtiment, long de 207 mètres a été livré en 1984, soit après la révolution islamique iranienne de 1979 et alors que la jeune République islamique était en guerre contre l’Irak, ajoute le site.

La télévision d’État iranienne a diffusé des images apparemment prises du rivage et montrant une épaisse colonne de fumée s’élevant au large, au-dessus d’une mer turquoise, indiquant qu’il s’agissait du Kharg en train de brûler.

400 personnes à bord

Selon la Marine iranienne, le feu s’est déclaré mardi dans l’« un des systèmes » du navire. Elle ne précise pas la cause de l’incendie.

Les secours ont lutté en vain « pendant 20 heures » après l’évacuation des marins vers la côte, d’après la même source.

M. Jahanian a précisé que le feu avait pris à bord du bâtiment mardi vers 11 h (2 h 30 HE) et que le bateau avait fini par couler vers 8 h 30 (0 h HE) mercredi alors qu’il se trouvait dans les eaux iraniennes, non loin des eaux internationales.

Selon lui, le bateau effectuait « une mission d’entraînement avec environ 400 hommes d’équipage et élèves-officiers à bord », mais « heureusement », il n’y a eu « aucune perte », « seulement 20 blessés légers souffrant de brûlures ».

La Marine a indiqué, elle, que le bâtiment avait appareillé il y a quelques jours pour une « mission d’entraînement » dans les eaux internationales.

Selon Jeremy Binnie, du cabinet spécialisé dans la défense et le renseignement Janes, le Kharg était le plus gros navire de la Marine iranienne jusqu’à ce que soit lancé en janvier le Makran, ancien pétrolier converti en navire de soutien avancé.  

« Représailles »

En 2020, 19 marins iraniens avaient été tués lors de manœuvres après qu’un bâtiment de guerre a été touché par un tir ami.

En avril, Téhéran avait annoncé qu’« un navire commercial » iranien, le Saviz, avait été endommagé en mer Rouge par une explosion d’origine indéterminée.

Le New York Times avait lui rapporté que le Saviz avait été visé par une attaque de « représailles » israélienne après « des frappes antérieures de l’Iran contre des navires israéliens ».

Le gouvernement iranien a annoncé il y a quelques jours que son projet d’oléoduc à destination de Jask avait été achevé et que du pétrole avait été acheminé via ce pipeline jusqu’à ce port.

Pour l’Iran, le but est d’exporter du pétrole à partir de Jask, ce qui ferait gagner quelques jours de navigation par rapport au port pétrolier de Kharg, dans le Golfe, et permettrait aux navires-citernes d’éviter le détroit d’Ormuz, au cœur de vives tensions entre l’Iran et les États-Unis, dont les navires de guerre sont présents en force dans la région.

Compte tenu des sanctions américaines contre l’Iran mises en place sous la présidence de Donald Trump (janvier 2017-janvier 2021) en vue de tarir les exportations pétrolières du pays, Téhéran est particulièrement discrète sur ses expéditions de brut à destination des quelques rares clients qui osent encore lui en acheter.