(Jérusalem) Le travailliste Isaac Herzog, 60 ans, a été élu président de l’État d’Israël mercredi par les députés, en pleine crise politique et à quelques heures d’un ultimatum pour former un gouvernement de coalition en Israël.

Autrefois chef du parti travailliste et président de l’Agence juive, Isaac Herzog devient le onzième président de l’État hébreu et remplace Reuven Rivlin à cette fonction largement honorifique, a indiqué la chaîne parlementaire.

Il a été élu avec 87 voix contre 26 pour son adversaire Miriam Peretz, une éducatrice sans expérience en politique, mais figure populaire dans la société israélienne, mère de deux fils tués au combat.

La fonction de chef de l’État en Israël est apolitique et largement cérémonielle alors que le pouvoir exécutif reste entre les mains du premier ministre. Le président peut toutefois accorder des grâces.

« Je prends sur mes épaules la lourde responsabilité que vous me donnez », a déclaré M. Herzog, surnommé « Bouji », dans un discours télévisé après l’annonce des résultats. « Je serai le président de tous, je construirai des ponts entre les différents pans de notre société ».

L’avocat de formation a remercié son adversaire Miriam Peretz, « héroïne israélienne », « d’être un symbole et une inspiration pour tous les citoyens israéliens ».  

« Je lui tends la main avec l’espoir d’une collaboration fructueuse pour le bien de la société israélienne », a-t-il ajouté.

Le premier ministre Benyamin Nétanyahou, qui a autrefois été l’adversaire du travailliste,  l’a félicité et lui a souhaité « une grande réussite au nom de tous les citoyens israéliens ».

L’élection du président israélien intervient dans un contexte de vives tractations politiques.  

Les adversaires à M. Nétanyahou, premier ministre le plus pérenne de l’État d’Israël, ont jusqu’à mercredi 23 h 59 (20 h 59 GMT) pour surmonter leurs différences idéologiques et annoncer un accord de coalition, en vue de mettre un terme à deux ans de crise politique.

En cas d’échec du centriste Yaïr Lapid à former un gouvernement avant l’échéance, les députés pourront demander au président de mandater de nouveau un parlementaire.  Ou, ce sera le retour aux urnes, pour la 5e fois en un peu plus de deux ans.

Isaac Herzog, travailliste policé

Isaac Herzog, le nouveau président de l’État d’Israël, a été chef du parti travailliste et est l’héritier d’une des plus grandes familles israéliennes, parfois comparée aux Kennedy.

Élu président mercredi par les députés israéliens, il marche dans les pas de son père, Chaïm Herzog, chef d’État de 1983 à 1993.

« Toute ma vie a été au service de l’État, ce sera un honneur de vous servir comme président de notre État que nous aimons tous », affirmait Herzog fils, dans son clip de campagne diffusé ces dernières semaines sur les réseaux sociaux.

Celui qui occupera pour les sept prochaines années une fonction – en grande partie symbolique – avait convoité, en 2015, le poste de premier ministre, doté de beaucoup plus de pouvoirs.

L’avocat de formation, né en 1960, avait alors en face de lui un adversaire redoutable : un certain Benyamin Nétanyahou.

« Quand je me suis porté candidat à la tête du parti travailliste, ils ont dit : “il n’a pas de charisme, aucune chance”. Et quand j’ai affirmé, l’année dernière, que je serai l’alternative au gouvernement de Nétanyahou, ils ont ri », avait-il déclaré à la presse avant les élections de 2015.

Raillé pour sa voix fluette, l’homme aux yeux clairs avait choisi en 2015 pour slogan de campagne : « Ce n’est pas ma voix qui compte, c’est la vôtre ».

Modeste, diplomate, Isaac Herzog remplace l’ancien président Reuven Rivlin et apparait comme l’exact opposé de Benyamin Nétanyahou.

Hasard du calendrier, il a été élu président le jour où les adversaires du premier ministre le plus pérenne de l’histoire du pays pourraient annoncer un accord de coalition pour chasser ce dernier du pouvoir.

Filiation

M. Herzog, surnommé « Bouji », a été élu pour la première fois au Parlement en 2003. Il a passé la décennie suivante dans des ministères, avant de prendre la tête d’un parti travailliste en crise en novembre 2013.

Son père, d’origine irlandaise, a été chef des services de renseignement de l’armée, avant de devenir ambassadeur aux Nations unies, puis président.

Son oncle, Abba Eban, est un diplomate renommé en Israël. Il a été en poste à Washington et aux Nations unies, puis a endossé le costume de chef de la diplomatie israélienne, poste qu’il occupait lors de la guerre des Six Jours en 1967.

Et son grand-père, Isaac Halevi Herzog, fut le premier rabbin ashkénaze de l’État d’Israël.

« Herzog porte sur ses épaules le lourd poids de son héritage familial », écrivait en 2015 le quotidien Haaretz, parlant d’une version israélienne des Kennedy.

Isaac Herzog a passé plusieurs années aux États-Unis, au gré des postes de son père, avant de servir comme officier dans les renseignements militaires, puis d’étudier le droit à l’université de Tel-Aviv.

Il a ensuite été secrétaire du gouvernement travailliste d’Ehud Barak, avant de détenir plusieurs portefeuilles ministériels entre 2005 et 2011.

Par le passé, M. Herzog a milité pour que la résolution du conflit avec les Palestiniens redevienne un élément central du parti travailliste, qui s’en était éloigné. À peine 10 jours après sa prise de fonction en 2013, il rencontrait le président palestinien Mahmoud Abbas à Ramallah, en Cisjordanie occupée.

Pendant la campagne de 2015, il avait promis de relancer le processus de paix, interrompu en avril 2014, et même affirmé être prêt à « évacuer » des colonies israéliennes si besoin.

Sa dernière mission en date était à la tête de l’Agence juive, une organisation paragouvernementale qui s’occupe notamment de l’immigration juive et des relations avec la diaspora juive. Il a quitté ce poste, qu’il occupait depuis 2018, pour être candidat à la présidence.

Père de trois enfants et marié à une avocate, il vit à Tel-Aviv, sa ville natale.