(Moscou et Istanbul) La Russie s’est dite vendredi favorable à la formation d’une « administration » intérimaire incluant les talibans pour diriger l’Afghanistan, à l’heure où les efforts se multiplient pour aboutir à un accord de paix avant un possible retrait américain.

Ces déclarations interviennent moins d’une semaine avant le déroulement, à Moscou, de pourparlers auxquels participeront les autorités de Kaboul et les insurgés, en présence de plusieurs délégations internationales.

Parallèlement, la Turquie a annoncé vendredi vouloir accueillir des négociations de paix interafghanes à Istanbul en avril.

« La formation d’une administration de transition inclusive serait la solution logique au problème de l’intégration des talibans à la vie politique » afghane, a dit aux journalistes la porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, Maria Zakharova, relevant que c’était « aux Afghans de décider ».

Le temps presse pour parvenir un accord, à l’approche de la date butoir du 1er mai à laquelle les États-Unis pourraient retirer tous leurs militaires d’Afghanistan. En conséquence, les Américains tentent de donner un coup de fouet aux discussions en vue d’un règlement pacifique.

« Nous saluons les efforts des partenaires internationaux pour accélérer le processus de paix et favoriser une résolution politique et un cessez-le-feu global permanent », a déclaré vendredi le porte-parole de la diplomatie américaine, Ned Price.

Il a estimé que la Russie avait « un intérêt important à garantir un Afghanistan stable et sûr », mais n’a pas confirmé « à ce stade » une participation américaine aux discussions de Moscou.

Washington a soumis récemment un projet d’accord de paix aux autorités de Kaboul et aux talibans, prévoyant entre autres la création d’un « nouveau gouvernement inclusif », selon une lettre du chef de la diplomatie américaine Antony Blinken révélée par des médias afghans.

Lundi, les États-Unis ont appelé à une « accélération » du processus de paix en Afghanistan, estimant que des progrès étaient « possibles ».

Discussions à Istanbul

Afin d’y parvenir, Washington a proposé de relancer les pourparlers à ce sujet entre Kaboul et les insurgés « dans les prochaines semaines » en Turquie, tout en instaurant pendant ce temps une période de « réduction de la violence » de 90 jours pour éviter la traditionnelle offensive de printemps des talibans.

En réponse à cette proposition, le ministre turc des Affaires étrangères Mevlüt Cavusoglu, cité par l’agence de presse étatique Anadolu, a confirmé que les discussions auraient lieu à Istanbul en avril, soulignant que leur « date précise » et leur « contenu » étaient en discussion.

Ces pourparlers « ne seront pas une solution alternative […], mais viendront en appui » des négociations de paix interafghanes qui ont commencé en septembre au Qatar, a insisté M. Cavusoglu.

« Quel est notre but ? C’est de prolonger les discussions entre les talibans et le gouvernement (afghan) en nous concentrant sur l’obtention de résultats concrets », a-t-il ajouté.

Un des négociateurs afghans au Qatar, Nader Naderi, a toutefois déclaré à l’AFP que les Afghans étaient « les seuls qui peuvent décider du type de gouvernement » à mettre en place « et des moyens pour arriver à la paix ».

« Nos voisins lointains et proches doivent respecter le droit souverain de notre peuple », a-t-il martelé.

Évoquant la réunion du 18 mars à Moscou, Mme Zakharova a expliqué vendredi que le Qatar en était l’invité d’honneur, les discussions ayant selon elle pour but de « promouvoir les négociations interafghanes de Doha, de réduire la violence et de mettre fin au conflit armé en Afghanistan ». La Chine et le Pakistan sont également attendus.

En vertu d’un accord séparé avec les talibans conclu en février à Doha, les États-Unis ont accepté de retirer toutes leurs troupes d’Afghanistan d’ici à mai 2021 en échange de garanties en matière de sécurité et d’un engagement des talibans à discuter avec Kaboul.

L’armée américaine ne compte plus, depuis le début de l’année, que 2500 hommes sur le territoire afghan, le chiffre le plus bas depuis 2001 et son intervention à la suite des attentats du 11-Septembre.

Le départ des États-Unis inquiète toutefois le régime en place à Kaboul, les talibans ayant intensifié leurs attaques contre les forces gouvernementales afghanes ces derniers mois.

Le président américain Joe Biden n’a pas encore confirmé le retrait.