(Beyrouth) La vaccination contre la COVID-19 de députés en dehors du circuit officiel a suscité mardi une forte indignation au Liban, la Banque mondiale allant jusqu’à menacer de suspendre son financement de la campagne en raison de cette « violation ».

Seize députés et quatre employés du Parlement ont été vaccinés dans les locaux de l’institution, a reconnu mardi son secrétaire général Adnane Daher.

« Ce qui s’est passé aujourd’hui est une violation, nous ne pouvons pas nous taire » a fustigé devant la presse le président de la commission gouvernementale chargée de la vaccination, Abdel Rahmane Bizri.

« C’est une tentative de favoritisme […] Personne n’a le droit d’outrepasser le plan », a-t-il déploré, précisant avoir renoncé à démissionner après avoir discuté avec son équipe et la Banque mondiale.

« Pas de passe-droit »

L’information a suscité une vague d’indignation sur les réseaux sociaux, le mot-dièse #NoWasta (« pas de passe-droit » en arabe) caracolant en tête des tendances Twitter au Liban.

Les députés sont notamment accusés de ne pas s’être enregistrés sur la plateforme en ligne dédiée à la vaccination pour prendre rendez-vous dans un centre spécialisé.

« Ma mère a 84 ans, elle est inscrite et n’a toujours pas eu son tour […] Tous les politiciens, familles et amis, seront vaccinés avant elle », s’est emporté un internaute.

Dans un pays rongé par la corruption et le clientélisme, frappé par une grave crise économique, la classe politique est régulièrement fustigée pour sa gestion désastreuse des affaires publiques.

Le Liban a lancé le 14 février sa campagne de vaccination grâce à une aide de 34 millions de dollars de la Banque mondiale, qui avait assuré que des observateurs garantiraient « un accès équitable » au vaccin.

La première phase est réservée au personnel médical et aux personnes âgées de plus de 75 ans, inscrites sur la plateforme dédiée.

Quelque 17 000 personnes ont été vaccinées, tandis que le pays (six millions d’habitants a recensé plus de 355 000 cas de COVID-19, dont 4340 décès.

La vaccination des députés, qui ont tous moins de 75 ans, « n’est pas conforme au plan national convenu » et pourrait constituer « une violation des conditions » de l’accord, a réagi sur Twitter le directeur régional de la Banque mondiale, Saroj Kumar Jha.

« Dès confirmation de la violation, la Banque mondiale pourrait suspendre le financement des vaccins », a-t-il ajouté. « J’en appelle à tout le monde […] attendez votre tour. »

Dans ce contexte, le bureau presse de la présidence de la république a annoncé mardi soir que le président Michel Aoun (86 ans) et la première dame se sont fait vacciner « ainsi que 10 membres de l’entourage immédiat du président qui avaient, comme il se doit, inscrit leurs noms sur la plateforme en ligne dédiée à la vaccination ».