(Beyrouth) Le Liban a entamé jeudi le premier jour d’un confinement particulièrement strict imposé par les autorités pendant onze jours, afin de ralentir la progression exponentielle des cas de nouveau coronavirus et soulager un secteur hospitalier sous pression.

Un couvre-feu de 24 heures sur 24 est entré en vigueur jusqu’au 25 janvier après que certains hôpitaux ont commencé à manquer de lits pour traiter les patients atteints du nouveau coronavirus.

Depuis fin décembre, le Liban connaît une propagation exponentielle du virus, avec des pics quotidiens jamais observés depuis l’apparition de la pandémie en février 2020. Jeudi, un nouveau record a été rapporté avec 41 décès ces dernières 24 heures, tandis que 5196 nouvelles contaminations ont été enregistrées.

Toutefois, des habitants ont parfois bravé les restrictions dans certains quartiers de la capitale et les banlieues aux rues largement vides. Des supérettes, épiceries et boulangeries restent ouvertes pour servir les riverains, qui se déplaçaient malgré l’interdiction.

Les forces de sécurité intérieure ont toutefois estimé à 94 % le niveau de respect du couvre-feu à la mi-journée, alors que les forces de l’ordre et les polices municipales mènent des patrouilles régulières et ont aménagé des barrages mobiles pour contrôler les voitures et sanctionner les contrevenants.

En vertu des nouvelles mesures, les Libanais ne peuvent officiellement pas sortir de chez eux pendant ce confinement, même pas pour des courses alimentaires ou faire de l’exercice par exemple. Les supermarchés sont ouverts pour effectuer des livraisons uniquement.

Ces derniers jours, les habitants se sont rués sur les supermarchés et les pharmacies pour s’approvisionner.

Les Urgences « remplies »

Le durcissement intervient alors que des patients ont dû attendre pendant des heures aux services d’urgences avant d’obtenir un lit en soins intensifs. Certains ont même été contraints de se faire soigner à domicile ou dans leur voiture.

Jeudi, le directeur de l’hôpital Geitawi, le père Pierre Yared, a évoqué une « situation exceptionnelle », faisant état d’un afflux de nouveaux patients atteints de la COVID-19 dans la nuit.  

Il a indiqué à l’AFP que les admissions au service des urgences de l’hôpital avaient augmenté de « 30 à 40 % ».

« Le service des urgences est saturé de patients atteints du coronavirus, il n’y a plus de patients ordinaires », a-t-il ajouté.

Le pays de six millions d’habitants a recensé jusqu’ici 237 132 cas, dont 1781 décès.

Des attestations de déplacement-pour se rendre chez un médecin ou à l’aéroport par exemple-sont possibles à travers l’envoi d’un texto ou en remplissant un formulaire en ligne mis en place par les autorités.

Quelques exceptions sont en outre prévues pour le déplacement du personnel de santé, des journalistes et des employés du secteur alimentaire.

« Très préoccupés »

La flambée actuelle du virus est largement due à l’assouplissement des restrictions pendant les fêtes de fin d’année, avec notamment restaurants, bars et discothèques ouverts jusqu’à 3 heures du matin.

Et cette propagation exponentielle n’a épargné quasiment personne.

Mercredi, le ministre intérimaire de la Santé, Hamad Hassan, a été hospitalisé après avoir contracté la COVID-19.

Certains craignent que les mesures strictes désormais en vigueur n’aggravent les conditions de vie, déjà largement précaires, des familles vulnérables dans un pays en proie à sa pire crise économique depuis des décennies et où la moitié de la population vit sous le seuil de la pauvreté.

« Nous sommes très préoccupés par le fait que les familles vulnérables et leurs enfants seront livrés à eux-mêmes », a averti lundi l’ONG Save the Children.

Face à l’ampleur de la double crise sanitaire et économique, la Banque mondiale a approuvé mardi une aide d’urgence de 246 millions de dollars (202 millions d’euros) pour venir en aide à 786 000 Libanais.

Mais les modalités et la date de déboursement de cette aide ne sont pas encore claires.

Le Liban connaît depuis l’automne 2019 sa pire crise économique et financière depuis des décennies ayant entraîné une baisse de 19,2 % du PIB en 2020, une inflation à trois chiffres et une paupérisation à grande échelle, estime la Banque mondiale.

La crise économique a été aggravée par une instabilité politique qui perdure depuis octobre 2019 et la pandémie mondiale, qui a déjà contraint le pays à décréter plusieurs confinements depuis mars 2020.