(Alger) Des milliers de manifestants ont de nouveau défilé vendredi à Alger lors de la marche hebdomadaire du mouvement antirégime Hirak malgré un important dispositif policier. 

Pour la première fois depuis la reprise des marches du Hirak en février, les protestataires ont changé de parcours pour contourner les nombreux cordons et véhicules de police qui barraient l’accès à la grande artère Didouche Mourad, près de la Grande Poste, lieu emblématique de rassemblement des hirakistes, selon des journalistes de l’AFP sur place.

Après la prière du vendredi, le cortège venant du quartier populaire de Bab El-oued, un des fiefs de la contestation, s’est dirigé vers Belouizdad (ex-quartier Belcourt), autre bastion du Hirak, au lieu de rallier, comme chaque vendredi, le centre-ville.

« Pour contourner la répression, Belouizdad [est le] cœur du Hirak ce vendredi 116 sous haute tension », a écrit sur sa page Facebook Tayeb Belazoug, un habitué des marches à Alger, en référence au nombre de semaines passées depuis le début du soulèvement populaire le 22 février 2019.

« Quoi que vous fassiez, nous ne nous arrêterons pas », ont crié les manifestants à l’adresse des policiers déployés massivement dans le centre de la capitale.

Vendredi dernier, la police avait dispersé à coups de matraques la marche du Hirak à Alger et procédé à plusieurs arrestations. La plupart des personnes interpellées ont été relâchées.

« La répression n’a pour effet que d’affermir la volonté de lutte et de cimenter la solidarité de ceux qui la subissent », pouvait-on lire ce vendredi sur les pancartes des manifestants.

Ces derniers brandissaient aussi les portraits de détenus d’opinion – opposants politiques et militants du Hirak – dont ils réclament la libération.

Selon le Comité national pour la libération des détenus (CNLD), une association d’entraide, plus de 70 personnes sont actuellement incarcérées, poursuivies pour des faits en lien avec le Hirak et/ou les libertés individuelles.

Certains ont entrepris des grèves de la faim à Alger et Oran pour protester contre leurs conditions de détention, selon le CLND.

Les manifestants ont également réitéré leur rejet des élections législatives anticipées convoquées par le pouvoir le 12 juin.

« Il n’y a pas d’élections avec les bandes de mafieux [au pouvoir] », ont-ils répété.

Dans son message du 1er mai, le président Abdelmadjid Tebboune a lui évoqué « un enjeu vital que relèvera le peuple algérien » dans « un climat de tranquillité et de confiance en l’avenir ».

« Inacceptable »

Mais à l’approche du scrutin, la répression s’accroît en Algérie, selon les organisations de défense des droits humains.

Dans un communiqué publié vendredi, Amnistie internationale a qualifié d’« inacceptables le recours illégal à la force et les détentions arbitraires ».

« Il faut que les autorités algériennes permettent les manifestations pacifiques et ne recourent pas à la force ni à d’autres mesures punitives injustifiées », a plaidé Amna Guellali, directrice adjointe pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord à Amnistie.

Né en février 2019 du rejet massif d’un cinquième mandat du président Abdelaziz Bouteflika, le Hirak réclame un changement radical du « système » politique en place depuis l’indépendance en 1962.