(Téhéran) Téhéran a mis en service ou commencé à tester samedi plusieurs centaines de centrifugeuses interdites aux termes de l’accord sur le nucléaire iranien de 2015, au risque de compliquer les discussions en cours à Vienne pour tenter de relancer ce pacte.

Au cours d’une cérémonie en visioconférence retransmise en direct par la télévision d’État, le président Hassan Rohani a lancé la production d’une ligne de 164 centrifugeuses dites IR-6 installées au sein du complexe nucléaire de Natanz (centre de l’Iran) et devant servir à augmenter le stock d’uranium enrichi produit par son pays.

Il a dans le même temps lancé l’alimentation en gaz d’uranium de deux autres cascades à Natanz, une de 30 IR-5 et une autre de 30 IR-6, en vue de les tester.

Le président a également donné le coup d’envoi de tests visant à vérifier la « stabilité mécanique » de la toute dernière génération de centrifugeuses iraniennes : l’IR-9.

PHOTO FOURNIE PAR LA PRÉSIDENCE IRANIENNE VIA AFP

Toutes ces machines permettent d’enrichir de l’uranium plus vite et en quantité plus abondante que les centrifugeuses « de première génération » IR-1, les seules que l’accord de Vienne autorise l’Iran à utiliser à des fins de production.

En matière de recherche et développement, l’accord de Vienne autorise à ce stade l’Iran à ne tester qu’un nombre très limité d’IR-5 et d’IR-4. Ces nouveaux tests vont donc à l’encontre des engagements pris par Téhéran.

Selon les ingénieurs de l’Organisation de l’énergie atomique iranienne, les IR-6 et IR-9 sont respectivement 10 et 50 fois plus puissantes que les IR-1.

Le président iranien a aussi inauguré à distance une usine d’assemblage de centrifugeuses devant remplacer celle ayant été gravement endommagée par une explosion, d’origine « terroriste » selon la télévision d’État, en juillet 2020.

Purement « pacifique »

Ces annonces interviennent alors que des discussions ont lieu à Vienne entre la République islamique et les autres États parties à l’accord de 2015 (Allemagne, Chine, France, Grande-Bretagne et Russie) sur la façon de réintégrer les États-Unis au sein de ce pacte conclu dans la capitale autrichienne.

Vendredi, un responsable américain a déclaré sous le couvert de l’anonymat que Washington avait fait, indirectement, des propositions « très sérieuses » à l’Iran pour relancer cet accord et que les Américains attendaient une certaine « réciprocité » de la part de la République islamique.

Les mesures mises en œuvre samedi par l’exécutif iranien ne vont pas dans ce sens.

La télévision d’État n’a pas diffusé d’images de la mise en service ou de test des nouvelles cascades, mais a montré à l’écran plusieurs rangées des différentes centrifugeuses concernées.

M. Rohani a répété à l’occasion de cette cérémonie organisée pour la « Journée nationale de la technologie nucléaire » que le programme nucléaire de son pays était purement « pacifique ».

L’accord de Vienne est moribond depuis que les États-Unis en sont sortis unilatéralement en 2018, sous la présidence de Donald Trump, rétablissant une avalanche de sanctions économiques et financières contre l’Iran.

En riposte, Téhéran a commencé à s’affranchir de ses engagements à partir de mai 2019 et le rythme s’est accéléré ces derniers mois.

« Dynamique positive »

Le nouveau président américain Joe Biden a déclaré qu’il était prêt à réintégrer l’accord, donc à lever les sanctions après négociations.

De son côté, l’Iran dit être prêt à revenir à l’application pleine et entière du texte, à condition que les États-Unis lèvent d’abord toutes les sanctions qu’ils ont réimposées ou instaurées contre Téhéran depuis 2018.

Téhéran refuse aussi de discuter directement avec les États-Unis à ce stade.

Jusque-là, les échanges qui ont eu lieu cette semaine à Vienne entre l’Iran et ses partenaires sur une relance de l’accord ont été jugés « productifs » par l’Union européenne, qui coordonne les discussions.

Selon la Russie, afin de « maintenir la dynamique positive », les diplomates des pays toujours parties à l’accord de Vienne « se réuniront à nouveau la semaine prochaine » dans la capitale autrichienne.  

Selon Téhéran, cette rencontre doit avoir lieu mercredi, au niveau des vice-ministres des Affaires étrangères.