(Washington) Les États-Unis ont appelé lundi l’Arabie saoudite à « démanteler » l’unité d’élite saoudienne proche du prince héritier, déjà sanctionnée, pour son rôle dans l’assassinat du journaliste Jamal Khashoggi.

« Nous exhortons l’Arabie saoudite à démanteler ce groupe et à adopter des réformes institutionnelles systémiques ainsi que des mécanismes de contrôle pour faire en sorte que les activités et opérations contre les dissidents cessent, et cessent totalement », a déclaré le porte-parole de la diplomatie américaine Ned Price devant la presse.

PHOTOS MOHAMMED AL-SHAIKH ET OSCAR DEL POZ, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Jamal Khashoggi et Mohammed bin Salman.

Dans un rapport déclassifié du renseignement américain publié vendredi, les États-Unis accusent le puissant prince héritier Mohammed ben Salmane d’avoir « validé » l’assassinat du journaliste saoudien en 2018.

Mais ils n’ont pas sanctionné le jeune dirigeant pour éviter une rupture dans les relations avec Riyad.

Washington a en revanche pris des sanctions contre des proches du prince et contre la Force d’intervention rapide, une unité d’élite chargée de sa protection, accusée d’être largement impliquée dans le meurtre.

Face aux critiques pour l’absence de mesures punitives visant Mohammed ben Salmane, l’administration de Joe Biden a assuré vouloir « recalibrer » les relations avec l’Arabie saoudite pour éviter qu’un tel meurtre puisse se reproduire.

Ned Price a aussi appelé les autorités saoudiennes à aller plus loin sur les droits humains.

« Nous exhortons l’Arabie saoudite à prendre des mesures supplémentaires pour lever l’interdiction de voyage » qui cloue sur place des militants récemment libérés, a-t-il dit.

Le prince doit être « puni »

Par ailleurs, la fiancée turque de Jamal Khashoggi a appelé lundi à « punir sans délai » le prince Mohammed ben Salmane.

« Il est impératif que le prince héritier, qui a ordonné le meurtre brutal d’une personne innocente, soit puni sans délai », a déclaré Hatice Cengiz dans un communiqué. « Cela pourrait non seulement rendre justice pour Jamal, mais aussi éviter que des actes semblables ne soient commis à l’avenir ».

« Je salue la publication du rapport américain. La vérité, qui était déjà connue, a été réaffirmée et est désormais définitive. Mais ce n’est pas assez, car la vérité n’a de sens que si elle sert l’accomplissement de la justice », a déclaré Mme Cengiz.

PHOTO ARND WIEGMANN, ARCHIVES REUTERS

La fiancée turque du journaliste saoudien assassiné Jamal Khashoggi, Hatice Cengiz, affirme qu’il est « impératif que le prince héritier (Mohammed ben Salmane), qui a ordonné le meurtre brutal d’une personne innocente, soit puni sans délai ».

« Si le prince héritier n’est pas puni, cela enverra un signal pour toujours que le principal coupable peut tuer en toute impunité », a-t-elle estimé. « Les gouvernements du monde entier, à commencer par l’administration (du président américain Joe) Biden, doivent se demander s’ils sont prêts à serrer la main d’une personne dont la culpabilité […] a été attestée, sans avoir été punie ».

Critique du pouvoir saoudien après en avoir été proche, Jamal Khashoggi, résident aux États-Unis et chroniqueur du quotidien Washington Post, a été assassiné le 2 octobre 2018 dans le consulat de son pays à Istanbul par un commando d’agents venus d’Arabie saoudite.

Son corps, démembré, n’a jamais été retrouvé.

Après avoir nié l’assassinat, Riyad a fini par dire qu’il avait été commis par des agents saoudiens ayant agi seuls. À l’issue d’un procès opaque en Arabie saoudite, cinq Saoudiens ont été condamnés à mort et trois autres à des peines de prison. Les peines capitales ont depuis été commuées.

Cette affaire a terni l’image du jeune prince héritier, véritable homme fort du royaume rapidement désigné par des responsables turcs comme le commanditaire du meurtre malgré les dénégations saoudiennes.