(Mascate) Le secrétaire d’État américain, Mike Pompeo, a achevé jeudi une tournée au Moyen-Orient sans convaincre apparemment d’autres pays arabes de normaliser, du moins dans l’immédiat, leurs relations avec Israël à l’instar des Émirats arabes unis.

Avant de s’envoler pour Washington, M. Pompeo s’est entretenu à Mascate avec le sultan Haitham ben Tarek. Aucune mention n’a été faite des relations avec Israël.

Se disant « optimiste » au début de sa tournée lundi quant à la possibilité de voir d’autres pays suivre l’exemple des Émirats, M. Pompeo a essuyé un refus du Soudan et une objection de Bahreïn.

L’accord historique entre les Émirats et Israël a été parrainé par les États-Unis, soucieux de capitaliser sur un succès diplomatique au Proche-Orient à l’approche de l’élection présidentielle américaine en novembre.

Il fait des Émirats le troisième pays arabe à établir des relations avec Israël après l’Égypte (1979) et la Jordanie (1994).

Dénoncé comme un « coup de poignard » dans le dos par les Palestiniens, il a été plus ou moins bien accueilli dans les capitales arabes.

« L’absence de tout engagement public supplémentaire (à normaliser les relations avec Israël) durant la tournée du secrétaire d’État Pompeo ressemble à un revers », souligne à l’AFP Hugh Lovatt, de l’European Council on Foreign Relations.

Cela est d’autant plus clair que « les responsables américains et israéliens ont passé des jours à faire miroiter la perspective que d’autres pays arabes vont suivre bientôt les Émirats », selon cet analyste.

À Khartoum, les autorités soudanaises ont expliqué au responsable américain qu’elles n’avaient pas de « mandat » pour prendre une telle décision durant la période de transition qui a suivi la chute de l’ancien président Omar el-Béchir et qui s’achève en 2022.

Pour le Soudan, qui cherche à sortir d’une liste américaine de pays soutenant des organisations « terroristes », se rapprocher d’Israël permettrait de bénéficier de l’influence de l’État hébreu auprès de son allié américain.

Prochaine tournée de Kushner

Bahreïn, petit royaume du Golfe qui partage avec Israël une grande animosité à l’égard de l’Iran, a souligné à M. Pompeo la nécessité de créer un État palestinien avant toute normalisation.

« La politique étrangère de Bahreïn est étroitement alignée sur celle de l’Arabie saoudite », rappelle Elham Fakhro, de International Crisis Group.

« Du moment que l’Arabie saoudite a affirmé la semaine dernière son attachement à l’initiative de paix arabe, il est devenu évident que la position de Bahreïn suivrait celle de son grand voisin », selon elle.

Sans critiquer ouvertement l’accord entre Israël et les Émirats, Riyad a dit s’en tenir au plan de paix arabe qui conditionne toute normalisation avec Israël à son retrait des territoires occupés en 1967, selon le principe de l’échange de « la terre contre la paix ».

« Les calculs internes jouent également un rôle », estime Mme Kakhro en faisant remarquer que pour Bahreïn comme pour Oman, des franges sociales peuvent s’y opposer, et que les dirigeants des deux pays ne « veulent pas prendre ce risque ».

Pour M. Lovatt, « les réticences (à la normalisation avec Israël) sont tout autant liés aux politiques régionale qu’interne et peut-être à la position de l’Arabie saoudite », un poids lourd moyen-oriental.

« Mais à long terme, il s’agit peut-être plus d’un ralentisseur (du processus de normalisation) que d’un changement de cap », analyse-t-il.

Et de souligner que « les pays en question (Bahreïn, Soudan, Oman, etc…) ont renforcé leurs relations discrètes avec Israël ces dernières années » et que « ce processus se poursuivra avec ou sans normalisation formelle ».

Dans ce contexte, le conseiller à la Maison-Blanche Jared Kushner va tenter d’entretenir la « dynamique » en se rendant dans la région la semaine prochaine.

Un haut responsable de la Maison-Blanche a indiqué que M. Kushner allait prendre le premier vol commercial direct entre Israël et les Émirats (Tel Aviv-Abou Dabi), à l’occasion de sa visite.

« Je suis très concentré sur mon voyage de la semaine prochaine au Moyen-Orient, j’espère que nous pourrons consolider très fortement cet accord de paix », a déclaré le gendre du président américain Donald Trump.

« J’espère que nous pourrons utiliser cette percée pour avoir plus de dynamique »,  née de la normalisation des relations entre ces deux pays, a encore dit M. Kushner en référence au processus de paix au Proche-Orient.