(Beyrouth) Un juge libanais a ordonné samedi à la presse du Liban de ne pas mentionner des remarques de l’ambassadrice des États-Unis concernant le puissant mouvement du Hezbollah, une décision aussitôt dénoncée par la ministre de l’Information et les médias.

Lors d’un entretien vendredi avec la chaîne de télévision Al-Hadath, l’ambassadrice américaine Dorothy Shea a indiqué que les États-Unis avaient « de graves inquiétudes sur le rôle du Hezbollah, une organisation terroriste ».

Le mouvement chiite a « siphonné des milliards de dollars qui auraient dû aller dans les coffres du gouvernement afin que le gouvernement fournisse des services basiques à ses citoyens », a-t-elle affirmé.

« Il a entravé certaines réformes économiques dont le Liban a désespérément besoin », a accusé Mme Shea, alors que le pays est en proie une profonde crise économique.

« Les sanctions antiterrorisme (des États-Unis) s’appliquent non seulement au Hezbollah, mais à ceux qui lui fournissent un soutien matériel », a-t-elle rappelé.

Ces remarques ne doivent pas être retransmises par les médias locaux et étrangers au Liban, a déclaré un juge d’un tribunal à Tyr, dans le sud du pays, publiant un ordre en ce sens d’une durée d’un an.

« L’ambassadrice américaine a évoqué dans cet entretien un parti libanais qui est représenté au Parlement, au gouvernement et qui bénéficie d’un large soutien populaire », indique le juge.

« L’ambassadrice américaine n’a pas le droit de parler de ce parti », a-t-il ajouté, l’accusant de promouvoir la sédition.

Si Mme Shea est protégée par l’immunité diplomatique, ce n’est pas le cas des médias qui peuvent être passibles de sanctions s’ils passent outre cette interdiction, a-t-il affirmé.

La ministre libanaise de l’Information, Manal Abdel Samad, a cependant aussitôt balayé cette injonction, rappelant que « personne n’a le droit d’interdire aux médias de couvrir l’actualité ».

Plusieurs médias se sont indignés de la décision du juge. La chaîne locale LBC a ainsi estimé qu’elle était « non contraignante et impossible à mettre en œuvre », et qu’elle violait la liberté de la presse.

L’ambassade des États-Unis au Liban a pour sa part assuré sur Twitter « croire à la liberté d’expression et au rôle important joué par les médias libres aux États-Unis et au Liban ».