(Téhéran) L’Iran a annoncé mercredi le lancement d’un premier satellite militaire, aussitôt dénoncé par les États-Unis sur fond de nouvelle escalade de tensions dans le Golfe, où Donald Trump menace de « détruire » des embarcations iraniennes.

Les Gardiens de la Révolution, l’armée idéologique de la République islamique iranienne, se sont targués du lancement réussi du satellite « Nour » (« Lumière » en persan). Il s’agit d’un « nouveau développement dans le domaine spatial pour l’Iran islamique », ont-ils assuré sur leur site Sepahnews.

Le satellite a « orbité autour de la Terre à 425 km », après avoir été lancé depuis le désert de Markazi, dans le centre de l’Iran, ont-ils précisé.

La télévision d’État a diffusé des images de ce qu’elle a présenté comme étant le satellite monté sur une fusée au moment du lancement. Il s’agit d’une « grande réalisation nationale », s’est félicité le ministre iranien des Télécommunications, Mohammad Javad Azari Jahromi.

Ce lancement – dont le bon déroulé n’a pu être vérifié de manière indépendante – n’est qu’une « façade pour le développement par l’Iran de technologies balistiques avancées », a rapidement dénoncé Israël, disant y voir une violation de la résolution 2231 du Conseil de sécurité de l’ONU.

« Rendre des comptes »

Ce texte enjoint Téhéran à « ne mener aucune activité liée aux missiles balistiques conçus pour pouvoir emporter des charges nucléaires, y compris les tirs recourant à la technologie des missiles balistiques ».

Le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo a également jugé que le lancement était « contraire » à la résolution des Nations unies et démontrait que les États-Unis avaient « raison » en dénonçant des programmes des tirs de « missiles » masqués.

« L’Iran devra rendre des comptes », a-t-il prévenu.

« Il y a des limites et des lignes à ne pas franchir s’ils ne veulent pas en subir les conséquences », a aussi menacé le vice-ministre américain de la Défense David Norquist.

Cet épisode intervient dans un contexte à nouveau explosif entre les deux pays ennemis.

Tout récemment, un nouvel incident a mis face à face des navires américains et des vedettes des Gardiens de la Révolution dans les eaux du Golfe. Le Pentagone avait alors accusé Téhéran de « manœuvres dangereuses » en mer.

Mercredi, le président Trump a affirmé avoir donné l’ordre de « détruire » toute embarcation iranienne « harcelant » les navires américains dans le Golfe, qui fut déjà le théâtre d’un accès de tension l’été dernier sur fond de navires-citernes saisis et d’attaques contre des installations pétrolières imputées par Washington à Téhéran.

« Dissuasion »

« Au lieu d’intimider les autres, les Américains doivent faire de leur mieux pour sauver leurs troupes infectées par le coronavirus » et « sauver leur peuple de la grande crise qui a frappé ce pays », a répondu le porte-parole des forces armées iraniennes, le général de brigade Abdolfazl Shékarchi.

L’Iran a enregistré officiellement près de 5400 morts du nouveau coronavirus et environ 86 000 cas de contamination, soit le bilan le plus lourd du Moyen-Orient même si certains le jugent largement sous-estimé.

L’hostilité entre les deux pays a été exacerbée depuis que les États-Unis ont quitté il y a deux ans l’accord international de 2015 sur le nucléaire iranien et rétabli les sanctions économiques punitives contre l’Iran.  

Ces sanctions pèsent sur le secteur pétrolier iranien, mais aussi, selon Téhéran, sur sa capacité à faire face à la pandémie de nouveau coronavirus.

Les tensions ont atteint un nouveau pic après la mort du puissant général iranien Qassem Soleimani, tué dans une frappe de drone américaine à Bagdad le 3 janvier.

L’administration Trump avait alors assuré avoir « rétabli une capacité de dissuasion » à l’égard de la République islamique, mais les faucons de Washington, à l’instar de l’ex-conseiller présidentiel John Bolton, estiment que les derniers évènements sont « la preuve » d’une pression encore insuffisante.

Le 9 février, l’Iran avait échoué à mettre en orbite un satellite d’observation scientifique, baptisé « Zafar » (« Victoire » en persan). Son lancement avait été condamné par Paris et Washington, qui avaient accusé Téhéran de vouloir renforcer ses compétences dans le domaine des missiles balistiques par le biais du lancement de satellites.

Affirmant n’avoir aucun projet de se doter de l’arme atomique, Téhéran assure que ses programmes balistique et spatial ne vont pas à l’encontre de la résolution de l’ONU.