(Doha) Le secrétaire d’État américain Mike Pompeo a appelé samedi au Qatar les talibans et le gouvernement afghan à accélérer les pourparlers de paix qui piétinent, au moment où Donald Trump a décidé malgré la violence persistante d’aller de l’avant avec le retrait des troupes d’Afghanistan.

Au moins huit personnes ont été tuées et 31 autres blessées samedi par des roquettes qui se sont abattues sur le centre de Kaboul. Des responsables du gouvernement afghan ont accusé les talibans, mais le groupe djihadiste État islamique (EI) a revendiqué l’attaque.

Mike Pompeo a rencontré gouvernement et talibans séparément à Doha, la capitale qatarie où se tiennent depuis plus de deux mois les négociations interafghanes.

« Il a appelé à une réduction significative de la violence et a encouragé une accélération des discussions sur une feuille de route politique et un cessez-le-feu permanent et global », a dit le département d’État américain dans un communiqué à l’issue des entretiens avec les insurgés.  

Abdullah Abdullah, qui dirige le processus de réconciliation en Afghanistan, a confirmé des progrès pour sortir les pourparlers de l’impasse.

« Très proches »

« Nous sommes proches, nous sommes très proches. Nous espérons passer cette phase et aborder les questions majeures », y compris la sécurité, a-t-il assuré à l’AFP lors d’une visite en Turquie.

Les premières négociations directes entre le gouvernement afghan et les talibans ont démarré mi-septembre, mais ont presque immédiatement failli capoter pour une mésentente sur les simples règles de discussions. Après deux mois sans réelles avancées, plusieurs sources ont déclaré à l’AFP vendredi que les deux parties semblaient avoir résolu ce point-clé.

Le 29 février, Mike Pompeo avait assisté à Doha à la signature d’un accord historique entre les États-Unis et les talibans pour mettre fin à la plus longue intervention militaire américaine de l’histoire.

M. Pompeo termine ce week-end dans le Golfe une tournée dans sept pays d’Europe et du Moyen-Orient alors que Donald Trump, tout en refusant de reconnaître la victoire du démocrate Joe Biden à l’élection présidentielle américaine, accélère ses priorités de fin de mandat.

Le Pentagone vient ainsi d’annoncer le retrait de quelque 2000 soldats supplémentaires d’Afghanistan d’ici le 15 janvier : cinq jours avant la prise de fonctions du président élu Biden, il n’en restera plus que 2500.

Le calendrier établi fin février entre Washington et les talibans prévoit un départ complet des troupes mi-2021, mais en échange de garanties de sécurité, d’une réduction de la violence et de progrès dans les pourparlers de paix – des conditions que plusieurs observateurs ne jugent pas remplies à ce stade.

Craintes pour le retrait

Les violences ont augmenté dans tout le pays, les rebelles multipliant les attaques quotidiennes contre les forces de sécurité afghanes.

Les alliés européens de Washington, mais aussi certains ténors républicains, ont exprimé leur préoccupation face à ce retrait que beaucoup jugent prématuré.

Il a également été critiqué par les habitants de Kaboul, qui craignent que cela n’encourage les talibans à déclencher une nouvelle vague de combats, alors que les civils sont depuis longtemps les principales victimes du conflit.

Les autorités de Kaboul redoutent, elles, que les insurgés ne durcissent leurs positions dans les négociations, où sont en jeu des sujets-clés comme les droits des femmes.

Donald Trump a promis à plusieurs reprises de mettre fin aux « guerres sans fin » des États-Unis, notamment en Afghanistan où l’armée américaine est intervenue après les attentats du 11 septembre 2001.

Joe Biden, sur un rare terrain d’entente avec M. Trump, souhaite également mettre fin au conflit, même si les modalités du retrait peuvent varier entre les deux hommes.

Signe d’une possible continuité, plusieurs voix appellent le démocrate à garder le négociateur américain Zalmay Khalilzad une fois à la Maison-Blanche.

A Doha, le chef de la diplomatie américaine a également rencontré l’émir du Qatar, cheikh Tamim ben Hamad Al-Thani, avec lequel il a évoqué la nécessité d’union au sein des pays du Golfe pour contrer l’Iran, bête noire de Washington dans la région.

Il terminera dimanche sa tournée en Arabie saoudite, où il doit rencontrer le prince hériter Mohammed ben Salmane, proche allié de Donald Trump qui pourrait être moins choyé par la future administration Biden.