(Téhéran) Un incident maritime qui a entraîné la mort de deux pêcheurs iraniens et la saisie d’un bateau émirati oppose Téhéran à Abou Dabi dans un contexte de tensions bilatérales après l’accord de normalisation entre les Émirats et Israël, ennemi juré de l’Iran.

Le ministère iranien des Affaires étrangères a annoncé avoir saisi lundi ce bateau après la mort de deux pêcheurs iraniens tués dans « la fusillade des embarcations des garde-côtes émiratis (survenue lundi) contre plusieurs bateaux de pêche iraniens ».

Le même jour, « un navire émirati a été saisi par les gardes-frontières de la République islamique d’Iran en raison du déplacement illégal dans les eaux » iraniens, a précisé le ministère dans un communiqué publié jeudi, ajoutant également que « son équipage a été arrêté », sans indiquer le nombre des personnes détenues.

Conséquence de ces incidents, le ministère des Affaires étrangères a convoqué le chargé d’affaires des Émirats pour protester.

Côté émirati, l’agence officielle WAM a mentionné lundi « huit bateaux de pêche en infraction après avoir pénétré dans les eaux territoriales des Émirats ». Étant donné que la tentative d’arrêter les navires a échoué, « les règles d’engagement ont été appliquées », a précisé WAM sans autres détails sur l’incident, notamment le pays d’origine des bateaux.

Concernant l’incident qui a coûté la vie à deux pêcheurs iraniens, « le gouvernement des Émirats a émis hier (mercredi) une note officielle exprimant son profond regret pour cet incident et annoncé sa volonté de compenser tous les dommages causés », a fait savoir le ministère iranien des Affaires étrangères.

« Menaces »

Quelques heures avant la publication du communiqué du ministère iranien, Téhéran a dévoilé deux nouveaux missiles, l’un balistique et l’autre de croisière, soulignant avoir augmenté la portée de ses missiles.  

Lors de la cérémonie télévisée d’inauguration des projets présentés comme « défensifs » à Téhéran, le président iranien, Hassan Rohani, a salué l’augmentation de la portée des missiles, rassurant les « pays voisins » que « la puissance de défense de l’Iran est dans leur intérêt ».

L’incident dans le Golfe survient alors que l’Iran a dénoncé lundi comme une « stupidité stratégique » l’accord de normalisation des relations entre son ennemi régional Israël et les Émirats arabes unis, conclu sous l’égide des États-Unis.

Donald Trump a fait de la coopération entre ses riches alliés du Golfe et Israël un objectif clé de sa politique au Moyen-Orient, afin d’affaiblir l’Iran, grand ennemi régional de Washington.

Les États-Unis ont par ailleurs formellement activé jeudi à l’ONU une procédure controversée, dite du « snapback » et à l’issue incertaine pour réclamer le rétablissement des sanctions internationales contre l’Iran, accusé d’avoir violé l’accord de 2015 sur le nucléaire.

S’exprimant sur l’accord Émirats-Israël, le président Rohani avait également qualifié de « grosse erreur » la décision d’Abou Dabi, la « mettant en garde contre l’ouverture pour Israël d’une voie d’accès à la région ».

Si cela devait arriver, « ce serait une autre histoire, et ils (les Émirats, NDLR) seraient traités d’une autre manière », a averti le président iranien.

De leur côté, les Émirats ont convoqué dimanche le chargé d’affaires iranien à Abou Dabi pour protester contre ces « menaces » de la République islamique, dénonçant un discours « inacceptable et provocateur », qui pourrait avoir selon eux « de graves répercussions sur la sécurité et la stabilité de la région ».

Abou Dabi a réduit en 2016 ses relations avec Téhéran dans un contexte de vives tensions entre les deux poids lourds de la région : l’Arabie saoudite, proche alliée des Émirats, et l’Iran.

Le chef de la diplomatie iranienne a néanmoins tenu début août avec son homologue émirati de rares discussions ayant porté notamment sur la coopération dans la lutte contre la pandémie de COVID-19.

La République islamique et les Émirats, deux pays riverains du Golfe, sont d’importants partenaires économiques, en particulier Dubaï, géant portuaire et plus grand hub aéroportuaire au monde pour les passagers étrangers.