(Dubaï) Les Émirats arabes unis et Israël ont convenu jeudi de normaliser leurs relations, dans le cadre d’un accord historique négocié par les États-Unis et qui, une fois signé, ferait d’Abou Dabi la troisième capitale arabe seulement à suivre ce chemin depuis la création de l’État hébreu.

Annoncé en premier par le président américain Donald Trump sur Twitter, cet accord verra Israël mettre fin à ses récents projets d’annexion en Cisjordanie occupée, selon les Émirats. Mais le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou n’a pas confirmé, loin de là : l’annexion de pans de ce territoire palestinien occupé est « reportée » mais Israël n’y a « pas renoncé », a-t-il précisé.

« Une ÉNORME avancée », a de son côté tweeté M. Trump, qui a loué un « accord de paix historique » entre « deux GRANDS amis » de Washington.

L’établissement de relations diplomatiques entre Israël et les alliés des États-Unis au Moyen-Orient, y compris les riches monarchies du Golfe, est un objectif clé de la stratégie régionale de M. Trump pour contenir la République islamique d’Iran, ennemi intime de Washington et de l’État hébreu.

Depuis sa fondation en 1948, Israël a de son côté eu des relations tumultueuses avec le monde musulman et arabe, et la signature de cet accord, dénoncé par l’Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas, ferait des Émirats le troisième pays arabe seulement à entretenir des liens diplomatiques avec lui, après les traités de paix conclus avec l’Égypte (1979) et la Jordanie (1994).

« Nouvelle ère »

Pour Benyamin Nétanyahou, il s’agit d’un « jour historique », d’un accord qui représente une « nouvelle ère » pour le monde arabe et Israël.

À cette heure, cette annonce constitue aussi un accomplissement majeur en politique étrangère pour M. Trump, alors que la campagne pour sa réélection en novembre s’annonce difficile.

Dévoilé en janvier, un plan de M. Trump pour le Proche-Orient, immédiatement rejeté par les Palestiniens et critiqué par la communauté internationale, avait offert à Israël la possibilité d’annexer des territoires et colonies juives de Cisjordanie, considérées comme illégales au regard du droit international.

Aux yeux des Émirats, en échange de cet accord, Israël a accepté de « mettre fin à la poursuite de l’annexion des territoires palestiniens ».

« Lors d’un appel entre le président (américain Donald) Trump et le premier ministre (israélien Benjamin) Nétanyahou, un accord a été trouvé pour mettre fin à toute annexion supplémentaire », a affirmé le prince héritier d’Abou Dabi, cheikh Mohammed ben Zayed Al-Nahyan
e sur son compte Twitter.

L’accord est une « victoire » pour la diplomatie, a commenté l’ambassadeur des Émirats à Washington, Youssef al-Otaïba sur Twitter.

« C’est une avancée pour les relations entre Israël et les pays arabes », a-t-il ajouté, soulignant que l’accord « préserve l’option de deux États (israélien et palestinien), défendue par la Ligue arabe et la communauté internationale ».

Dans le même sens, le ministre d’État aux Affaires étrangères des Émirats, Anwar Gargash, a souligné que l’accord ouvrait la voie à l’option de deux États.

« La plupart des pays y verront une initiative courageuse pour garantir une solution à deux États, à l’issue de négociations », a-t-il déclaré en conférence de presse.

Il n’a pas voulu donner de date précise pour l’ouverture d’ambassades entre Abou Dabi et Israël, précisant toutefois que cela interviendrait « prochainement ».

L’option de deux États a été ignorée jusqu’ici par le président Trump dont le plan de paix ne comporte aucune référence à un État palestinien vivant aux côtés d’Israël.

Et M. Nétanyahou a tenu un autre discours que les dirigeants émiratis jeudi soir : « J’ai apporté la paix, je réaliserai l’annexion », a-t-il proclamé.

« Continuation du déni »

Pour sa part, le secrétaire d’État américain, Mike Pompeo, a salué « un pas en avant significatif pour la paix au Moyen-Orient ».

« Les États-Unis espèrent que cette étape courageuse sera la première d’une série d’accords qui mettront fin à 72 ans d’hostilités dans la région », a déclaré M. Pompeo, ajoutant que l’accord serait signé à la Maison-Blanche à une date ultérieure.

De son côté, le président égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, dont le pays est un allié des Émirats et des États-Unis, a sobrement salué l’accord, et estimé lui aussi que cela empêcherait une annexion de pans de la Cisjordanie.

Mais l’Autorité palestinienne de Mahmoud Abbas a, elle, qualifié de « trahison » l’accord de normalisation et a appelé à une « réunion d’urgence » de la Ligue arabe pour le dénoncer. En guise de protestation, elle a aussi ordonné le rappel « immédiat » de l’ambassadeur palestinien à Abou Dabi.

« Les dirigeants palestiniens rejettent ce que les Émirats arabes unis ont fait. Il s’agit d’une trahison de Jérusalem et de la cause palestinienne », a indiqué dans un communiqué la direction palestinienne appelant à une « réunion d’urgence » de la Ligue arabe pour dénoncer le projet soutenu par les États-Unis.

Le Hamas palestinien l’a aussi condamné. Cet accord « ne sert pas la cause palestinienne mais est considéré comme une continuation du déni des droits du peuple palestinien », a dit à l’AFP Hazem Qassem, porte-parole du mouvement islamiste au pouvoir dans la bande de Gaza.