(Washington) Téhéran et Washington ont mis en scène leur confrontation lundi à l’occasion du 40e anniversaire de la prise d’otages de l’ambassade des États-Unis en Iran, avec des manifestations anti-américaines d’un côté et, de l’autre, de nouvelles sanctions, visant cette fois l’entourage du guide suprême iranien.

L’administration de Donald Trump a placé sur sa liste noire neuf membres de l’entourage de l’ayatollah Ali Khamenei, qui occupent des postes-clés dans plusieurs institutions de la République islamique, dont un de ses fils, son directeur de cabinet ou encore le chef du système judiciaire iranien.

Le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo a par ailleurs appelé les autorités iraniennes à «libérer immédiatement tous les Américains portés disparus et détenus injustement», citant nommément l’ex-agent du FBI Robert Levinson, le chercheur sino-américain Xiyue Wang et l’homme d’affaires irano-américain Siamak Namazi.

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Robert Levinson

Le département d’État a annoncé pour l’occasion une récompense pouvant atteindre 20 millions de dollars pour toute information qui permettrait de retrouver et rapatrier Robert Levinson, disparu en Iran en mars 2007.  

Même si Téhéran assure n’avoir aucune information sur son sort, Washington accuse le régime iranien et considère qu’il s’agit du «plus ancien otage de l’histoire américaine».

La Maison-Blanche a de son côté exhorté l’Iran à «choisir la paix plutôt que les prises d’otages, les assassinats, les actes de sabotage et de piraterie maritime, et les attaques contre les marchés mondiaux du pétrole».

444 jours

Le 4 novembre 1979, moins de neuf mois après le renversement du dernier chah d’Iran, un groupe d’étudiants partisans de la Révolution islamique avait pris d’assaut l’ambassade des États-Unis à Téhéran, accusée d’être un «nid d’espions».

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Un des otages américains photographié le 8 novembre 1979.

Les étudiants avaient exigé, pour libérer les otages, que les États-Unis extradent le chah afin qu’il soit jugé en Iran.

La crise ne s’achèvera que 444 jours plus tard, après la mort du souverain déchu en Égypte, avec la libération de 52 diplomates américains.

Cette prise d’otages reste un traumatisme profond pour la diplomatie américaine.

Elle est, au contraire, célébrée en Iran, où l’anniversaire a été marqué lundi à grand renfort de bannières étoilées brûlées ou piétinées ou d’effigies moquant Donald Trump.

À Téhéran, des milliers de personnes se sont rassemblées devant l’ancienne représentation diplomatique américaine, dans le centre de la capitale.

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Les autorités iraniennes avaient dévoilé samedi de nouvelles fresques anti-américaines sur les murs de l’ex-ambassade des États-Unis à Téhéran.

Hommes, femmes – principalement en tchador – et enfants agitaient des pancartes en anglais et en persan, sur lesquelles on pouvait lire : «Mort à l’Amérique, mort à Israël, victoire pour l’islam».

«Nos vies pour le Guide»

«Les États-Unis sont comme un scorpion au venin mortel qui ne cesse de vous agacer que lorsqu’il est écrasé», a lancé aux manifestants le général Abdolrahim Moussavi, commandant en chef de l’armée iranienne.

«Leur hostilité à notre égard va continuer», a-t-il ajouté, estimant, à l’instar de l’ayatollah Khamenei, que discuter avec Washington reviendrait à accepter «la soumission et la défaite».

«Nous sacrifierons nos vies et notre être pour le guide et [la République islamique] et nous ne nous laisserons pas intimider par notre ennemi, l’Amérique», a déclaré Sajad Chirazi, tailleur de pierre venu manifester à Téhéran.

La télévision d’État a diffusé en direct des images de manifestations similaires dans de nombreuses villes iraniennes, qui ont réuni, selon l’agence Mehr proche des conservateurs, «des millions de personnes».

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Dans la foule à Téhéran, de nombreux drapeaux jaunes frappés des mots «À bas l’Amérique» étaient brandis.

Rompues en pleine crise des otages, les relations diplomatiques entre Téhéran et Washington n’ont jamais été rétablies et les tensions se sont aggravées ces derniers mois.

Les sanctions de lundi s’ajoutent à une longue liste de mesures prises par les États-Unis pour couper les vivres au régime de Téhéran depuis que le président Trump a claqué la porte, en mai 2018, de l’accord international censé empêcher la République islamique de se doter de la bombe atomique.  

Le milliardaire républicain jugeait ce texte insuffisant, mais se dit prêt à négocier un «meilleur accord», ce que l’Iran refuse de faire sous la pression des sanctions.

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En riposte à cette «pression maximale», l’Iran a annoncé lundi avoir nettement accéléré en deux mois son rythme de production d’uranium faiblement enrichi, à la veille de l’annonce attendue d’une nouvelle réduction de ses engagements pris dans le cadre de l’accord de 2015.  

Les autorités avaient dévoilé samedi de nouvelles fresques anti-américaines sur les murs de l’ex-ambassade des États-Unis à Téhéran, dénonçant «l’arrogance» d’une Amérique présentée comme assoiffée de guerre pour asseoir son emprise sur le monde.