(Sotchi) Le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo a réfuté mardi toute volonté de guerre avec l’Iran de la part des États-Unis, dont les manœuvres militaires font craindre une escalade dans le Golfe.

L’envoi par l’administration du président américain Donald Trump d’un porte-avions et de bombardiers dans le Golfe a avivé les tensions, rallongeant encore la liste des sujets de discorde entre les États-Unis et la Russie, où le secrétaire d’État s’est rendu pour tenter de renouer le contact.

« Fondamentalement, nous ne cherchons pas une guerre avec l’Iran », a affirmé M. Pompeo lors d’une conférence de presse avec son homologue russe Sergueï Lavrov après plus de trois heures d’entretiens à Sotchi, dans le sud de la Russie, avant de retrouver Vladimir Poutine.

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Mike Pompeo et Sergueï Lavrov.

« Nous voulons que l’Iran se comporte comme un pays normal », a expliqué le diplomate américain. « Nous voulons que le régime cesse de mener des campagnes d’assassinats en Europe, cesse son soutien au Hezbollah qui menace les intérêts de tout le Moyen-Orient, son soutien aux (rebelles yéménites) Houthis qui lancent des missiles dans des zones où voyagent des Russes et des Américains ».

Lui faisant écho, le guide suprême de la République islamique d’Iran, Ali Khamenei, a affirmé qu’« il n’y aurait pas de guerre » avec les États-Unis, selon son site internet, expliquant l’épreuve de force actuelle par une manière de tester la détermination de chacun : « Ni nous, ni eux, ne cherchons la guerre, ils savent qu’elle ne serait pas dans leur intérêt ».

Les relations déjà tendues entre Washington et Téhéran se sont envenimées depuis une semaine : l’Iran a suspendu certains de ses engagements pris en vertu de l’accord de 2015 encadrant son programme nucléaire, un an après le retrait américain de ce texte, tandis que l’administration Trump a renforcé ses sanctions contre l’économie iranienne.

Accusant Téhéran de préparer des « attaques » contre les intérêts américains au Moyen-Orient, le Pentagone a dépêché dans la région un porte-avions, un navire de guerre, des bombardiers B-52 et une batterie de missiles Patriot.

Donald Trump, qui avait adressé une ferme mise en garde lundi à l’Iran, a démenti mardi tout projet d’envoyer 120 000 soldats au Moyen-Orient pour contrer l’Iran, une hypothèse évoquée la veille par le New York Times.

« Si nous devions le faire, nous enverrions beaucoup plus d’hommes que ça », a-t-il ajouté. « C’était où, cette histoire, dans le New York Times ? Eh bien le New York Times, c’est des infox ».

Région « en surtension »

Lundi soir, le quotidien new-yorkais avait rapporté que le ministre américain de la Défense par intérim, Patrick Shanahan, avait présenté la semaine dernière, lors d’une réunion avec des conseillers à la sécurité nationale de M. Trump, un plan selon lequel jusqu’à 120 000 hommes pourraient être envoyés au Moyen-Orient si l’Iran attaquait des forces américaines.

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Donald Trump et Vladimir Poutine à Helsinki le 16 juillet 2018.

Ce plan, qui n’en est qu’à un stade préliminaire selon le journal, n’appelle pas à une invasion terrestre et le chiffre évoqué est le plus élevé de la fourchette envisagée, précise le New York Times.

« Nous avons été clairs avec les Iraniens sur le fait que si les intérêts américains sont attaqués, nous répondrons certainement de la manière appropriée », a martelé Mike Pompeo en Russie.

« J’espère que le bon sens va l’emporter », a plaidé de son côté Sergueï Lavrov. « La région est déjà en surtension en raison des différents conflits […] Nous allons contribuer à faire en sorte que la situation ne dégénère pas en scénario militaire ».

La Russie, comme les Européens, est favorable à un maintien de l’accord de 2015 sur le programme nucléaire iranien. Mike Pompeo a déjà eu lundi à Bruxelles des entretiens difficiles avec des responsables européens inquiets d’un possible conflit « par accident ».

La crainte d’une escalade dans le Golfe a été alimentée ces derniers jours par de mystérieux « actes de sabotage » contre quatre navires de commerce, dont deux tankers saoudiens, même si aucun lien n’a été établi officiellement.

Les tensions ont monté encore d’un cran avec des attaques de drones revendiquées par des rebelles yéménites provoquant la fermeture d’un oléoduc majeur mardi en Arabie saoudite.

Principale rivale de l’Iran au Moyen-Orient, l’Arabie saoudite intervient militairement au Yémen depuis 2015, ainsi que les Émirats arabes unis, aux côtés des forces gouvernementales contre les rebelles Houthis soutenus par Téhéran, qui dément néanmoins leur fournir des armes.