Des centaines de femmes, d'enfants et d'hommes, dont des blessés, ont quitté mercredi l'ultime réduit du groupe État islamique (EI) en Syrie, où des forces soutenues par les États-Unis attendent de pouvoir reprendre leur assaut contre les derniers djihadistes acculés.

Une nouvelle fois, les combattants kurdes et arabes des Forces démocratiques syriennes (FDS) ont dû ralentir dimanche leurs opérations sur le terrain, après être repartis à l'offensive contre l'ultime poche de l'EI dans le village de Baghouz.

Car des milliers de femmes et d'enfants, mais aussi de nombreux blessés ont abandonné ces derniers jours le dernier réduit où sont acculés les combattants jusqu'au-boutistes de l'organisation ultraradicale, dans la province orientale de Deir Ezzor.

Mercredi, des centaines de personnes, dont des femmes serrant leurs bébés et des hommes blessés juchés sur des béquilles, ont quitté l'ultime réduit du « califat » proclamé par l'EI, qui se vide de ses derniers survivants, a pu constater une journaliste de l'AFP.

Sur une plaine aride près de Baghouz, des dizaines d'hommes attendaient en file indienne d'être fouillés par les combattants des FDS qui tentent d'identifier les potentiels djihadistes, selon la même source.

Parmi les personnes évacuées, plusieurs enfants, dont sept yézidis, une minorité particulièrement touchée par les exactions de l'EI.

« Chaque fois que nous pensons que c'est la dernière vague, il y a de nouvelles sorties » du réduit djihadiste, a affirmé à l'AFP un responsable des FDS, sous le couvert de l'anonymat. En attendant, les combats piétinent.  

Sur le toit d'un immeuble de Baghouz, des combattants des FDS sont à l'affût du moindre mouvement dans la poche djihadiste, formée de quelques pâtés de maisons accolés à un campement informel, a constaté une journaliste de l'AFP.

Les avions de la coalition internationale emmenée par Washington ne quittent pas le ciel, selon la même source, mais ils ne mènent pas de raids.

Entre la position des FDS et le campement, des dizaines de carcasses de voitures carbonisées gisent sur des terrains agricoles déserts. Dans le campement, des hommes courent entre les tentes.

400 djihadistes arrêtés

Ces nouvelles sorties viennent s'ajouter à l'évacuation d'environ 3500 personnes, dont 500 djihadistes ayant capitulé, selon l'alliance arabo-kurde.

Par ailleurs, 400 combattants de l'EI ont été arrêtés mardi soir alors qu'ils tentaient de fuir leur ultime réduit, a précisé le responsable des FDS.

Ils ont tenté de « fuir à pied » par le biais « d'un réseau » qui cherchait à les sortir et à les transporter vers des régions éloignées, a souligné la même source, sans fournir plus de détails.

Après une montée en puissance fulgurante en 2014, l'EI avait proclamé en juin de la même année un « califat » sur des pans entiers de la Syrie et de l'Irak voisin.

Des milliers d'étrangers, dont des Européens, l'avaient alors rejoint.  Mais face à plusieurs offensives ces deux dernières années, les djihadistes ont vu leur territoire se réduire comme peau de chagrin.

Près de 58 000 personnes, principalement des familles de djihadistes, ont déjà quitté l'ultime réduit depuis début décembre, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH). Parmi elles, plus de 6000 djihadistes ont été arrêtés, d'après cette source.

« Besoins urgents »

Les civils évacués, dont les épouses et les enfants de djihadistes étrangers, sont transférés vers des camps de déplacés du nord-est syrien. Notamment celui d'Al-Hol, où des dizaines de milliers de personnes s'entassent dans des conditions difficiles, dénoncées par des ONG.

« Les besoins les plus urgents restent les abris », mais aussi apporter une assistance médicale « physique et psychologique », « particulièrement aux groupes vulnérables, comme les femmes enceintes, les enfants et les personnes âgées », soulignait lundi le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) de l'ONU en Syrie.

« Le suivi des nombreux cas d'enfants non accompagnés et séparés (de leur famille) reste une priorité », ajoutait l'agence.

Si l'EI perd sa dernière poche de Baghouz, cela signerait la fin territoriale du « califat » en Syrie, après sa défaite en Irak en 2017.

Mais le groupe a déjà entamé sa mue en organisation clandestine. Il a toujours des combattants disséminés dans le vaste désert du centre syrien, et ses cellules dormantes mènent toujours des attentats meurtriers dans les territoires perdus.

La bataille contre l'EI représente aujourd'hui le principal front de la guerre en Syrie qui a fait plus de 360 000 morts depuis 2011, au moment où le régime, soutenu par la Russie et l'Iran, a repris le contrôle de près des deux tiers du pays.