(Jérusalem) Les membres du Likoud de Benyamin Nétanyahou ont voté pour désigner leur chef lors d’une primaire réclamée par le principal rival du premier ministre israélien, Gideon Saar, déterminé à lui ravir le parti.

Le vainqueur de la primaire aura la lourde tâche de mener la campagne de la formation de droite pour les législatives de mars, les troisièmes en moins d’un an.

Les bureaux de vote ont ouvert à 9h locales, et les quelque 116 000 membres du Likoud étaient appelés à voter jusqu’à 23 h.

À 23h, à la fermeture des urnes, le taux de participation était de 49%, selon le parti. Les résultats devraient être dévoilés au petit matin.

Sur Twitter, M. Nétanyahou, 70 ans, a appelé plus tôt ses partisans à voter en masse. «Le taux de participation est très bas, la victoire de la droite dépend de vous», a-t-il affirmé, alors que la participation n’atteignait que 30%.   

Il a également publié sur Facebook une vidéo le montrant en train de téléphoner à des membres du parti pour les convaincre de voter pour lui.

«Il faut un changement»

En arrivant au bureau où il a voté près de Tel Aviv, Gideon Saar estime qu’il s’agit d’«un jour fatidique» pour le Likoud et pour Israël. «Nous pouvons gagner aujourd’hui et emprunter un nouveau chemin qui nous permettra de former un gouvernement fort et stable», a-t-il dit.

La primaire, aux allures de référendum sur la popularité de M. Nétanyahou dans ses propres rangs, a peu de chances d’être remportée par le député Saar.

Mais si elle aboutit à un résultat serré, ce sera un coup dur pour le premier ministre, à la tête du Likoud depuis 1993 – hormis six ans lorsque le parti était dirigé par Ariel Sharon – et chef du gouvernement le plus pérenne de l’histoire d’Israël.

Cette consultation intervient également un peu plus d’un mois après l’inculpation de M. Nétanyahou pour corruption, fraude et abus de confiance. De «fausses accusations» selon lui.

Suite à cette inculpation, des rivaux au sein du Likoud, en tête desquels M. Saar, avaient appelé à la tenue de cette primaire.

«L’institution judiciaire a eu raison de Bibi […] Il faut un changement pour que le Likoud reste au pouvoir», déclare Yaron, 68 ans, un habitant de Jérusalem ayant voté pour Gideon Saar.  

REUTERS

Gideon Saar

Nathan Moati, 26 ans, assure que les partisans de Benyamin Nétanyahou ne sont pas troublés par ses poursuites judiciaires, et que seul «Bibi» peut remporter les législatives.

C’est pourquoi «il faut que tous les supporters du Likoud votent pour Nétanyahou aujourd’hui», affirme le jeune homme.

Au terme des élections anticipées d’avril, puis de septembre, ni M. Nétanyahou ni le centriste Benny Gantz – dont les partis sont arrivés coude-à-coude à deux reprises – n’ont réussi à rallier 61 députés, seuil de la majorité parlementaire pour former un gouvernement.

Le président Reuven Rivlin a ensuite confié cette tâche au Parlement lui-même, qui n’y est pas parvenu. D’où la nécessité d’un nouveau rendez-vous électoral.

Pour le sondeur Stephan Miller, «qu’importe le pourcentage qu’obtiendra Saar, ce sera la première fois en dix ans que des électeurs de droite expriment explicitement leur désir de se débarrasser de Nétanyahou».  

Selon M. Miller, si Gideon Saar, 53 ans, reçoit plus d’un tiers des votes, «cela portera un coup significatif à Nétanyahou».

Fronde

M. Saar a été plusieurs fois ministre, avant de mettre sa carrière politique entre parenthèses en 2014 après avoir été écarté par M. Nétanyahou.

Si M. Saar est encore plus marqué à droite que le premier ministre, notamment sur la question palestinienne, il joue la carte du rassembleur au-delà de son propre camp, en misant sur ses relations avec des chefs d’autres partis.

Il pourrait aussi bénéficier du fait que le parti Bleu-Blanc de Benny Gantz s’est refusé de partager le pouvoir avec un premier ministre inculpé.

AFP

Benny Gantz

En attendant, selon de récents sondages, un Likoud dirigé par M. Saar remporterait moins de sièges aux législatives que s’il était dirigé par M. Nétanyahou.

Toutefois, si M. Saar l’emporte à la primaire, des électeurs du Likoud pourraient se tourner vers d’autres partis de droite, ceux qui n’avaient pas atteint le seuil de 3,5% des votes pour entrer au Parlement lors des précédents scrutins.

Dans ce cas, le camp de droite pourrait potentiellement atteindre le seuil de la majorité parlementaire nécessaire pour former un gouvernement.

Pour M. Nétanyahou, il est essentiel de rester au pouvoir : la loi prévoit que tout ministre poursuivi pénalement doit démissionner, mais cela ne s’applique pas au premier ministre.