(Washington) Changement de ton à la Maison-Blanche : Donald Trump a loué lundi les efforts récents du Pakistan sur l’Afghanistan, au moment où Washington cherche à se désengager de ce pays après 18 ans d’intervention militaire.

« Nous avons fait beaucoup de progrès ces dernières semaines et le Pakistan nous a aidés », a déclaré le président américain en recevant pour la Première fois dans le bureau Ovale le premier ministre pakistanais Imran Khan.

« Je pense que le Pakistan va faire beaucoup », a ajouté le milliardaire républicain, qui a par le passé accusé Islamabad de « mensonges » et de « duplicité » dans la lutte contre le terrorisme.

Washington met les bouchées doubles pour arracher un accord politique avec les talibans avant l’élection présidentielle afghane, prévue fin septembre.

Une telle avancée pourrait ouvrir la voie à un retrait des troupes américaines, 18 ans après les attentats du 11-Septembre, qui avaient poussé les États-Unis à lancer une vaste offensive pour déloger le régime taliban au pouvoir à Kaboul.

Soulignant que, pendant de longues années, sous les mandats de ses prédécesseurs, Islamabad n’avait « rien fait » pour les États-Unis, M. Trump a insisté sur un changement notable au cours des mois écoulés, conséquence selon lui de sa fermeté. « Je pense que le Pakistan ne respectait pas les États-Unis et son président », a-t-il lancé.

« Nous sommes sur place en Afghanistan depuis 19 ans, c’est ridicule », a-t-il martelé, se montrant optimiste sur les négociations en cours avec les talibans. « Nous aurons des réponses sur l’Afghanistan très rapidement ».

M. Trump a par ailleurs affirmé que les États-Unis pourraient gagner en quelques jours la guerre en Afghanistan s’ils ne reculaient pas devant le nombre de victimes civiles.

« Je pourrais gagner cette guerre en une semaine », a-t-il dit, évoquant la possibilité de faire disparaître l’Afghanistan « de la surface de la Terre ». « Je ne veux tout simplement pas tuer 10 millions de personnes », a-t-il ajouté.

« Pas de solution militaire »

De son côté, Imran Khan a salué l’avancée des négociations en cours. « Il n’y a pas de solution militaire en Afghanistan », a-t-il martelé. « Nous n’avons jamais été aussi prêts d’un accord de paix », a-t-il ajouté. « Nous voulons la paix ».

PHOTO ALEX BRANDON, ASSOCIATED PRESS

Washington et Kaboul accusent régulièrement Islamabad de soutenir des groupes extrémistes armés comme le réseau Haqqani, allié des talibans, en lui fournissant des refuges dans ses régions frontalières avec l’Afghanistan.  

Le Pakistan nie un tel soutien, arguant à l’inverse des énormes sacrifices humains et financiers consentis dans sa lutte contre le terrorisme.

« Ce n’est pas un secret : nous sommes préoccupés par les liens entre certains groupes (terroristes) et l’armée et les services de renseignement pakistanais », résume un responsable américain.

Les talibans et divers hauts responsables afghans se sont engagés mi-juillet à Doha à tracer une « feuille de route pour la paix », fondée sur l’ouverture d’un processus de paix contrôlé, le retour des personnes déplacées à l’intérieur du pays et la non-ingérence des puissances régionales en Afghanistan.

Le texte prévoit aussi de « garantir les droits des femmes dans les domaines politique, social, économique, éducatif et culturel, conformément au cadre islamique des valeurs islamiques ».

A l’occasion de cette rencontre dans le bureau Ovale avec le premier ministre pakistanais, ancien champion de cricket, M. Trump a aussi proposé de jouer un rôle de « médiateur » entre l’Inde et le Pakistan.

La locataire de la Maison-Blanche a même assuré, à la surprise générale, avoir été sollicité en ce sens par le premier ministre indien Narendra Modi. « J’étais avec le premier ministre Modi il y a deux semaines. Il m’a dit : “Voudriez-vous être médiateur ? ».

Le démenti, cinglant, est tombé peu après. « Aucune requête en ce sens n’a été présentée par le premier ministre au président américain », a dit Raveesh Kumar, le porte-parole du ministre indien des Affaires étrangères, rappelant que l’Inde a toujours considéré que cette question devait se régler dans le cadre d’une discussion bilatérale avec Islamabad.  

Divisé de fait entre l’Inde et le Pakistan, l’ancien royaume du Cachemire est la poudrière du sous-continent depuis sa partition en 1947. Les deux puissances nucléaires d’Asie du Sud le revendiquent chacune dans son intégralité.

Les deux voisins avaient failli se livrer une nouvelle guerre en février dernier à la suite d’un sanglant attentat-suicide perpétré au Cachemire indien, qui avait été suivi d’une crise diplomatique et de brefs combats aériens.