La trêve reste fragile jeudi autour du port stratégique de Hodeida, dans l'ouest de Yémen, après de nouveaux combats sporadiques nocturnes, en attendant le déploiement d'observateurs des Nations unies visant à consolider le cessez-le-feu entre forces loyalistes et rebelles Houthis.

La trêve sur ce front actif de la guerre qui ravage ce pays pauvre de la péninsule arabique a été conclue il y a une semaine en Suède lors de pourparlers de paix interyéménites. Entrée en vigueur mardi, elle a donné lieu à de nombreuses pauses dans les opérations militaires sans empêcher toutefois des échanges de tirs mercredi.

La ville de Hodeida, dont le centre reste tenu par la rébellion, est restée calme jeudi, selon un responsable militaire loyaliste et des habitants.

Un responsable de la coalition dirigée par l'Arabie saoudite qui soutient militairement les forces gouvernementales a déclaré à l'AFP que le « niveau d'intensité » des attaques des rebelles avait diminué.

« C'est un signe positif, mais il est encore trop tôt pour en tirer des conclusions », a-t-il ajouté.

Mercredi, la coalition avait menacé implicitement de reprendre son offensive en cas de « violations » persistantes à Hodeida.

« Prévenir les violations »

Cette ville portuaire par où transite la majeure partie de l'aide humanitaire destinée au Yémen est un enjeu stratégique dans la guerre opposant depuis 2015 les Houthis, appuyés par l'Iran, aux forces progouvernementales soutenues militairement par une coalition conduite par l'Arabie saoudite.

Dans le sud de la province de Hodeida, les localités d'Al-Tahatya, de Hays, et de Beit al-Faqih ont connu durant la nuit de mercredi à jeudi des accrochages, selon le même responsable militaire progouvernemental.

L'ONU, qui a piloté les pourparlers en Suède, est pressée de contribuer à la mise en oeuvre dans les meilleurs délais des termes de l'accord.

Le commandant des observateurs de l'ONU, chargés de surveiller la trêve, est entré en contact avec le comité mixte yéménite qui doit l'appliquer sur le terrain, pour demander une désescalade, a par ailleurs indiqué jeudi à l'AFP un membre de ce comité.

« Le général Patrick Cammaert a demandé des efforts pour calmer la situation et prévenir les violations », a dit le général Ahmed al-Kawkabani, l'un des représentants du gouvernement au sein de cette instance qui comprend également des délégués des rebelles.

Patrick Cammaert a insisté, selon lui, sur « le désir de la communauté internationale de faire aboutir l'accord de trêve à Hodeida ».

Selon l'ONU, qui souhaite un déploiement rapide des observateurs, le général Cammaert est attendu vendredi à Amman à la tête de l'avant-garde des observateurs, avant de se rendre à Sanaa et à Hodeida à des dates non précisées.

« Son départ pour le Yémen dépendra des dispositions logistiques », a déclaré à l'AFP une source onusienne à Amman.  

Selon des diplomates, quelque 30 à 40 observateurs pourraient être déployés à Hodeida, une ville où vivent environ 600 000 personnes, sans attendre une résolution de l'ONU.

« Plein soutien à Cammaert »

Les membres du Conseil de sécurité tiennent depuis près d'une semaine des négociations ardues sur un projet de résolution visant à entériner les acquis des consultations interyéménites de Suède et à officialiser le déploiement dans le pays d'une avant-garde d'observateurs.

Selon une source diplomatique, un dernier point de blocage est apparu mercredi. Alors que les 15 membres de l'instance étaient d'accord pour le texte proposé par le Royaume-Uni, la Russie a objecté qu'il ne devait pas accuser spécifiquement des pays soutenant les Houthis.

Dans une étude publiée mercredi, le centre de réflexion International Crisis Group (ICG) a pour sa part mis en garde contre les conséquences d'un effondrement de la trêve.

« Sans un appui international fort, le cessez-le-feu de Hodeida échouera », et un tel échec entraînerait « une longue et destructrice bataille pour Hodeida et presque certainement une famine d'envergure » dans le pays, a-t-il noté.

Le responsable de la coalition dirigée par Riyad a répété jeudi son engagement dans les efforts de paix déployés par l'ONU, disant : « Nous apporterons notre plein soutien à Cammaert [...] et espérons voir des avancées positives ».

Le 8 décembre, l'ONU avait estimé que jusqu'à 20 millions de personnes étaient « en situation d'insécurité alimentaire » au Yémen, où la guerre a fait au moins 10 000 morts depuis plus de quatre ans.