L'armée israélienne a frappé mardi des dizaines de cibles dans la bande de Gaza en représailles à un feu nourri de roquettes et d'obus, la confrontation la plus sévère entre Israël et les groupes armés palestiniens depuis la guerre de 2014.

L'un de ces groupes, le Djihad islamique, a annoncé dans la soirée qu'un accord de cessez-le-feu avait été conclu entre les organisations palestiniennes et Israël sous les auspices de l'Égypte, autre voisin de la bande de Gaza et intermédiaire historique entre les deux camps.

«Pas de commentaire», a répondu l'armée israélienne. Peu de temps auparavant, l'armée disait poursuivre ses opérations dans la bande de Gaza, langue de terre coincée entre Israël, Égypte et la Méditerranée. Des explosions se faisaient encore entendre autour de minuit.

Ce nouvel accès de tensions après des semaines de violences le long de la frontière entre Israël et Gaza fait resurgir le spectre d'un nouveau conflit dans l'enclave qui a connu depuis 2008 trois guerres entre Israël d'une part, le mouvement islamiste Hamas et ses alliés, dont le Djihad islamique, de l'autre.

Les États-Unis, grand allié d'Israël, ont dénoncé les tirs palestiniens «contre des installations civiles» et demandé une réunion d'urgence du Conseil de sécurité, qui se tiendra mercredi à 15h00, selon des diplomates à l'ONU.

«Les dirigeants palestiniens doivent rendre des comptes pour ce qu'ils laissent faire à Gaza», a dénoncé l'ambassadrice américaine à l'ONU, Nikki Haley dans un communiqué.

Pour sa part, le Koweit, membre non permanent du Conseil de sécurité, a fait circuler un projet de résolution qui «appelle à envisager des mesures pour garantir la sécurité et la protection de la population civile palestinienne». Détail notable, ce texte modifié abandonne la demande d'envoi dans la bande de Gaza d'une «mission de protection internationale», faite initialement le 18 mai.

La Russie a exprimé «sa profonde inquiétude» et appelé «les deux parties à briser le cercle vicieux de la confrontation destructrice».

Le territoire israélien a essuyé pendant la journée son «plus important barrage de tirs d'obus de mortier et de roquettes» depuis 2014, a indiqué un porte-parole de l'armée, le lieutenant-colonel Jonathan Conricus.

Environ 70 roquettes et obus de mortier ont été tirés de la bande de Gaza vers Israël, a dit l'armée. Nombre de projectiles ont été interceptés par le système de défense anti-aérienne «Dôme de fer». Certains étaient de fabrication iranienne», a dit l'armée. Ennemi juré d'Israël, l'Iran soutient le Hamas et le Djihad islamique.

En représailles, Israël a apporté «la réplique la plus importante depuis 2014», son aviation et son artillerie frappant pas moins de 35 positions avant 16h00 et poursuivant ses opérations plus tard.

15 secondes pour réagir

L'armée a par ailleurs détruit un tunnel, le 10e depuis octobre 2017 selon elle, qui s'enfonçait à partir du sud de l'enclave en Égypte et, de là, revenait 900 mètres en territoire israélien.

La marine israélienne a en outre arraisonné au large de Gaza un bateau transportant une vingtaine de Palestiniens qui avaient pris la mer pour protester contre le blocus terrestre, aérien et maritime imposé depuis plus de 10 ans par Israël à l'enclave.

Trois soldats israéliens ont été légèrement blessés par les tirs palestiniens et ont été évacués, a dit l'armée. Aucune victime n'a été rapportée côté palestinien.

Côté israélien, l'escalade a ravivé chez les populations riveraines le souvenir des hostilités passées.

La cour d'un jardin d'enfants habituellement fréquenté par une trentaine de jeunes enfants a été atteinte par des obus peu avant l'ouverture, selon le lieutenant-colonel Conricus. Instruction a été donnée aux riverains de rester à moins de 15 secondes d'un abri.

Les sirènes d'alerte ont continué à retentir à plusieurs reprises dans les zones israéliennes limitrophes de l'enclave.

Fait rare indicatif du sérieux de la situation, les bras armés du Hamas et du Djihad islamique ont publié un communiqué commun pour revendiquer la responsabilité des tirs contre Israël, réponse selon eux à des attaques israéliennes contre leurs positions à Gaza, dont l'une avait encore tué dimanche trois membres du Djihad islamique.

Ces «crimes ne peuvent en aucun cas être tolérés», écrivent-ils, en déclarant que «toutes les options sont ouvertes».

C'est plus tard seulement que le Djihad islamique a annoncé un cessez-le-feu, dont la réalité reste à confirmer, mais qui associe également le Hamas selon lui.

«La façon dont les choses vont évoluer dans les prochains jours dépend des intentions du Hamas», avait dit plus tôt le porte-parole de l'armée israélienne.

Israël et le Hamas observent depuis 2014 un cessez-le-feu tendu, régulièrement remis en cause par des accès de tensions.

Ni Israël ni le Hamas, affaibli et isolé, ne passaient jusqu'alors pour avoir intérêt à une escalade. Mais diplomates et experts soulignent combien l'enfermement de Gaza, la crise économique qui y sévit et l'absence d'horizon politique rendent la situation volatile.

«Mourir la tête haute» 

La bande de Gaza est de nouveau en proie aux tensions depuis le 30 mars et le début d'une mobilisation appelée la «grande marche du retour», qui a donné lieu à des violences meurtrières le long de la frontière avec Israël.

Au moins 121 Palestiniens ont été tués par des tirs israéliens depuis cette date, la majorité dans des violences le long de la barrière de sécurité israélienne.

Le ministre israélien de la Sécurité intérieure, Guilad Erdan a affirmé à la chaîne 2 que «les dirigeants du Hamas et du Djihad islamique devraient craindre pour leur vie», ajoutant qu'il était temps selon lui «de reprendre la politique des assassinats ciblés».