La force de l'OTAN en Afghanistan, essentiellement composée de troupes américaines, a invoqué mardi l'«erreur humaine» après l'émoi provoqué par la classification de données sur l'influence des talibans dans le pays, qui étaient jusque-là dans le domaine public.

Mardi, le SIGAR - l'organisme public chargé de contrôler l'action américaine en Afghanistan - a affirmé que le Pentagone lui avait interdit de publier, contrairement à ce qui s'est fait précédemment, le nombre de districts contrôlés par les rebelles et la proportion de la population afghane se trouvant plus ou moins sous leur autorité.

La capitaine de vaisseau Tom Gresback, un porte-parole pour «Soutien Résolu» - la mission de soutien de l'OTAN au gouvernement afghan - a cependant affirmé qu'il n'y avait aucune intention de rendre secrètes des données qui auparavant étaient publiques.

«Le système de classification, qui incorpore les règles de l'OTAN et des États-Unis peut-être être complexe et une erreur a été commise. Les données ne sont pas classées et il n'y avait aucune intention de les cacher sans raison», a affirmé l'officier basé à Kaboul.

Le SIGAR, dont les rapports sont souvent fort critiques sur la manière dont les États-Unis mènent la plus longue guerre de leur histoire, avait décidé de rendre l'affaire publique.

John Sopko, le contrôleur général, parlait de «développement troublant» dans le rapport trimestriel du SIGAR. 

56% du pays sous contrôle 

Le Pentagone avait affirmé dès lundi soir n'avoir rien demandé au SIGAR.

L'OTAN a indiqué qu'à fin octobre 2017, 56% des 407 districts du pays étaient sous le contrôle ou l'influence des autorités afghanes, 30% étaient contestés entre les différentes parties et 14% étaient contrôlées ou influencés par les insurgés.

Selon le SIGAR, le Pentagone lui a aussi demandé - et ce pour la première fois depuis 2009 - de ne pas publier non plus le nombre de tués et de blessés des forces de sécurité afghanes.

«Historiquement, le nombre de districts contrôlés ou sous l'influence du gouvernement a baissé depuis que SIGAR a commencé à publier les chiffres, tandis que le nombre de districts contrôlés ou sous l'influence des rebelles a augmenté, une donnée qui ne devrait qu'accentuer l'inquiétude que suscite le fait de cacher les chiffres et de les retirer de la discussion publique», a souligné John Sopko.

Malgré l'annonce d'une nouvelle stratégie par le président Donald Trump, qui ne s'éloigne guère de celle de son prédécesseur Barack Obama, les talibans --et de plus en plus souvent la branche afghane du groupe État islamique-- semblent avoir l'initiative sur le terrain.

Pas de dialogue avec les talibans 

À cela s'ajoutent les lourdes pertes des forces gouvernementales, police ou armée, et la corruption, ce qui pèse sur le moral et conduit à de nombreuses désertions.

Les attentats se sont multipliés ces derniers mois y compris à Kaboul, qui est pourtant censée être une véritable forteresse avec ses nombreux barrages, ses murs anti-explosion et une forte présence des forces de l'ordre.

Face au carnage de samedi (plus de 100 morts au coeur de Kaboul), le président américain a exclu lundi toute discussion avec les talibans à ce stade.

«Nous ne sommes pas prêts à parler à ce stade», a lancé M. Trump lors d'une réunion à la Maison-Blanche en présence des ambassadeurs des pays membres du Conseil de sécurité de l'ONU.

«Ils tuent des gens de partout, des innocents, ils font exploser des bombes au milieu des enfants, au milieu des familles, ils tuent à travers tout l'Afghanistan», a-t-il poursuivi.

«Nous ne voulons pas parler avec les talibans. Le moment viendra peut-être mais cela va prendre longtemps», a-t-il ajouté.