Le niveau d'alerte restait au plus haut dimanche dans Kaboul, sonnée et en deuil au lendemain de l'attentat qui a fait plus de 100 morts et 235 blessés et conduit certaines organisations à préparer le départ du personnel international.

« De nombreux blessés sont décédés depuis leur transfert à l'hôpital le nombre de martyrs atteint désormais 103 morts et 235 blessés », dont une majorité de civils, a déclaré le ministre de l'Intérieur Wais Barmak lors d'une conférence de presse.

M. Barmak n'a pas cité leur nombre mais de nombreux policiers sont également décédés, dont « cinq morts à un seul barrage » et une trentaine ont été blessés.

La rue où s'est produite l'explosion de l'ambulance piégée est l'une des plus gardées de Kaboul : de nombreuses institutions et représentations étrangères y siègent, des bureaux du ministère de l'Intérieur et du chef de la Police de Kaboul.

Dans un rare exercice de transparence, le ministre - avec le patron des renseignements afghans, le NDS, Mohammad Masoom Stanekzai, à ses côtés - a dévoilé quelques détails sur l'attentat.

Selon lui, « des images aériennes » montrent deux ambulances se présentant l'une derrière l'autre au premier barrage. « La première a été vérifiée par la police : on voit le policier parler au conducteur avant de le laisser passer avec la deuxième ambulance, dont il a pensé qu'elle accompagnait la première ».

« Pas de manquement »

« Les deux sont allées se garer sur le stationnement de l'hôpital avant d'en ressortir 20 minutes plus tard » : c'est au deuxième barrage que l'explosion s'est produite, a-t-il raconté.

À ce stade, quatre personnes ont été arrêtées, avait-il indiqué samedi.

L'hôpital se trouve entre les deux points de contrôle, le second gardant l'accès à la délégation de l'Union européenne et aux ambassades d'Inde et de Suède notamment.

M. Stanekzai a défendu ses services, vivement mis en cause sur les réseaux sociaux qui dénonçaient l'inaction des autorités.

« Les renseignements ne sont pas toujours fiables à 100 % mais ça ne signifie pas qu'il y a eu manquement. Nous avons déjoué beaucoup d'attaques, certaines sont difficiles à prévoir », a-t-il plaidé.

« J'espère que les Afghans comprennent qu'il s'agit ici d'une guerre régionale et internationale contre le terrorisme », a-t-il ajouté, précisant que « 20 groupes terroristes opèrent » en territoire afghan.

La présidence a décrété dimanche une « journée de deuil national » et annoncé une journée chômée à Kaboul, lundi, « pour s'occuper des blessés ».

Mais la ville est restée anormalement calme, avec un trafic réduit mais une présence policière, tendue, renforcée aux barrages.

L'attentat, revendiqué par les talibans, l'un des pires à frapper Kaboul ces dernières années, est le troisième d'ampleur en huit jours en Afghanistan après l'attaque de l'hôtel Intercontinental le 20 janvier et celle de l'ONG Save The children à Jalalabad, mercredi.

Le chef du NDS a d'ailleurs annoncé l'arrestation de cinq personnes dans l'enquête sur l'attaque de l'hôtel et affirmé qu'une « sixième est passée de l'autre côté de la frontière » - dans une allusion au Pakistan, accusé d'abriter et même d'entretenir les talibans et le réseau terroriste Haqqani qui leur est affilié.

« Violence inhumaine »

Le niveau d'alerte en vigueur depuis une dizaine de jours reste maximal, selon une source de sécurité occidentale qui redoute de nouvelles attaques. 

Les étrangers sont particulièrement visés par les menaces ainsi que les lieux qu'ils fréquentent - hôtels, supermarchés... Les ambassades, l'ONU, sont pour la plupart placés en « lock down » (confinement sans sorties) ou se voient imposées de très fortes restrictions de déplacement.

Dimanche, plusieurs organisations étrangères ont décidé d'éloigner pour un temps leurs personnels expatriés « non essentiels » : la fondation Aga Khan qui conduit de nombreux projets humanitaires et culturels les a ainsi envoyés dans un pays voisin ; une ONG occidentale a préféré les mettre à l'abri en province.

« On se pose la question mais on ne veut pas surréagir » a confié le responsable d'une grosse ONG européenne à l'AFP.

« Combien de temps encore le peuple afghan devra-t-il supporter cette violence inhumaine ? » a demandé dimanche le pape François, se joignant aux condamnations internationales qu'a suscitées cet attentat, perpétré au moyen d'une ambulance bourrée d'explosifs.