Un rapport officiel publié mardi en Israël accuse le premier ministre Benyamin Nétanyahou et ses généraux d'avoir mal préparé l'armée à la menace «stratégique» des tunnels de guerre du mouvement palestinien Hamas lors du conflit à Gaza en 2014.

«Les responsables politiques et militaires et les services de renseignements étaient informés de la menace représentée par les tunnels et l'avait même qualifiée de ''stratégique''», indique un rapport des services du contrôleur de l'État Yossef Shapira, chargé de surveiller l'action du gouvernement.

«Pourtant, les actions entreprises face à cette menace n'ont pas correspondu à cette définition», dit-il. «Le premier ministre, les anciens ministres de la Défense et chef d'état-major n'ont pas veillé à ce que l'armée dispose de plans opérationnels pour combattre les tunnels dans des zones urbaines».

Le rapport commencé au lendemain de la guerre de juillet-août 2014 dans le territoire palestinien gouverné par le mouvement islamiste Hamas a suscité une fiévreuse agitation dans la classe politique israélienne.

Le premier ministre s'est empressé d'en réfuter les conclusions. La guerre a porté au Hamas «le coup le plus dur de son histoire», a-t-il dit sur Facebook. La preuve en est le «calme sans précédent» depuis 1967 régnant sur la frontière avec Gaza.

Quant aux leçons de la guerre, elles ont déjà été appliquées discrètement sans même que le contrôleur de l'État en fasse état, a-t-il dit.

Le rapport revisite l'offensive israélienne «Bordure protectrice» de 2014 dans sa dimension non pas opérationnelle mais politique en examinant le processus de décision avant et pendant la campagne militaire, en particulier sur les tunnels.

Ces galeries creusées dans la bande de Gaza et sous la barrière de béton et de métal qui ferme hermétiquement les frontières israéliennes constituaient avec les roquettes l'une des armes essentielles du Hamas et des groupes combattants alliés contre Israël.

La destruction de ces tunnels s'est imposée comme l'un des objectifs primordiaux de l'offensive de 2014, avec l'arrêt des tirs de roquettes.

Les riverains israéliens de l'enclave vivent toujours dans la hantise des tunnels. Ils n'ont pas oublié la vidéo tournée par des combattants palestiniens se filmant en train de s'infiltrer par un tunnel en Israël et tuant cinq soldats le 28 juillet 2014.

«Menace constante»

Un autre évènement reste dans les mémoires israéliennes: la mort quelques jours plus tard du soldat Hadar Goldin, tué lors d'une opération de destruction de tunnels à l'intérieur de la bande de Gaza. Les Palestiniens détiendraient toujours son corps comme monnaie d'échange.

La menace des tunnels était connue de longue date. Pourtant, M. Nétanyahou  et son ministre de la Défense de l'époque Moshé Yaalon n'ont informé qu'en termes «épars et généraux» de la gravité de la menace les membres du cabinet restreint en charge des questions de sécurité.

Plus globalement, MM. Nétanyahou et Yaalon n'ont pas livré avant la guerre au cabinet de sécurité «des informations essentielles» nécessaires à des «décisions avisées» sur la situation à Gaza, dit le rapport.

À travers ce rapport, Israël revient sur le plus meurtrier des trois conflits livrés par l'armée à Gaza depuis que le Hamas, grand ennemi d'Israël, y a pris le pouvoir en 2007.

Depuis 2014, Israël et le Hamas se réarment en prévision d'une éventuelle prochaine confrontation. Israël a de nouveau répliqué lundi à un tir de roquette en provenance de Gaza où le Hamas affirme continuer à construire des tunnels pour la «résistance».

Rivaux et adversaires de M. Nétanyahou  ont beau jeu d'attaquer celui qui doit une grande partie de sa longévité à sa réputation d'efficacité en matière de sécurité. Il est sous la pression de la droite de son gouvernement et des investigations policières le visant pour des faits présumés de corruption, suscitant les spéculations sur la probabilité d'élections anticipées.

Le leader travailliste d'opposition, Isaac Herzog, a dénoncé la faillite de M. Nétanyahou «aussi bien sur le plan de la paix (avec les Palestiniens) que sur celui de la sécurité».

Favori des sondages pour succéder à M. Nétanyahou  en cas d'élections, le centriste Yaïr Lapid s'est alarmé que «rien (n'ait) été fait pour que cela ne se reproduise pas», alors que les riverains de Gaza «continuent à vivre sous la menace constante du terrorisme».

La guerre de 2014 a fait 2251 morts, dont 551 enfants côté palestinien selon l'ONU, et 74 morts côté israélien, dont 68 soldats.