La campagne pour les premières élections ouvertes aux électrices comme aux candidates en Arabie saoudite s'est terminée jeudi, mais les perspectives de voir des femmes élues samedi sont très minces.

Plus de 900 femmes concourent avec quelque 6000 hommes pour siéger dans les 284 conseils municipaux du royaume, des assemblées chargées des rues, des parcs ou du ramassage des ordures.

Ce scrutin est considéré comme un petit pas en avant vers l'égalité des sexes dans ce royaume ultraconservateur qui était un des derniers au monde à refuser aux femmes le droit de vote.

Mais les Saoudiennes restent soumises à de nombreuses restrictions, comme l'interdiction de conduire, qui pourrait d'ailleurs empêcher une partie des électrices de se rendre dans les bureaux de vote.

Oum Mohammed, qui habite à la frontière du Koweït, indique qu'elle ne pourra y aller que si son mari l'y amène ou si elle loue avec d'autres habitantes une voiture avec chauffeur.

Cette quadragénaire est en revanche déjà sûre de voter pour un homme même si ses filles ont participé à la campagne d'une candidate. Elle a choisi son candidat «parce qu'il est de notre tribu et qu'il défendra nos droits. C'est une bonne personne dont on n'a jamais dit de mal».

Oum Mohammed précise que le fait que son mari ait été invité à dîner par le candidat sous sa tente de campagne a aidé le couple à conforter son choix.

Les grandes tentes traditionnelles où les hommes aiment à se rassembler sont l'un des principaux lieux où s'est déroulée la campagne. Car cette dernière est peu visible dans les rues et lieux publics, où afficher des photos des candidats est interdit.

«Énorme surprise»

Les Saoudiens ont déjà voté deux fois pour des municipales, en 2005 et 2011. C'est cette année-là, dans la foulée des Printemps arabes, que le roi Abdallah avait accordé aux Saoudiennes le droit de vote et d'éligibilité.

Deux ans plus tard, il avait nommé pour la première fois des femmes au Majlis al-Choura, un conseil consultatif.

Malgré ces avancées, seules 130 600 femmes se sont inscrites sur les listes électorales pour le scrutin de samedi, soit environ dix fois moins que d'hommes, selon des chiffres officiels.

Plusieurs candidates ont été disqualifiées tandis que d'autres se sont retirées sous la pression, notamment de responsables musulmans locaux.

Une femme du nord-est du pays a ainsi indiqué que la candidate pour laquelle elle voulait voter «a abandonné parce que des membres du clergé ont déclaré qu'il était interdit pour une femme de se présenter à une élection».

De toute façon, «je ne crois pas que les candidates auront une quelconque influence si elles sont élues», a ajouté cette habitante sous le couvert de l'anonymat.

Pour les hommes, le défi est de faire connaissance avec les candidates, et leur programme, car elles n'ont pu s'exprimer ou tenir de rassemblements devant un public masculin.

«Il est donc plus difficile de comprendre» ce que propose une candidate, témoigne un habitant de Hafr al-Batin, qui a en revanche pu partager un café ou un repas avec les candidats. «Je ne crois pas qu'un homme votera pour une femme».

Il précise qu'il déposera le bulletin d'un candidat issu de sa tribu parce que «je sais que c'est un homme bon».

Omar Mohammed, un comptable de 49 ans de Jeddah, sur les bords de la Mer rouge, reconnaît pour sa part n'avoir rencontré aucun militant faisant campagne pour une femme.

Pour un diplomate occidental, «ce serait une énorme surprise» si une candidate était élue samedi.

Mais il est possible que des femmes soient nommées dans les conseils municipaux, dont seuls les deux tiers des membres sont élus.