Benyamin Nétanyahou a appelé lundi les Israéliens à ne pas se faire justice face à l'escalade des violences, après la mort d'un Érythréen pris pour l'auteur d'un attentat, dans un climat de nervosité que les appels à la retenue ne parviennent pas à calmer.

«Nous sommes un pays respectueux de la loi, personne n'a le droit d'appliquer ses propres lois», a déclaré le Premier ministre israélien, dans des propos diffusés par la radio publique.

Jérusalem-Est, partie palestinienne de Jérusalem annexée et occupée par Israël, et la Cisjordanie occupée sont en proie depuis le 1er octobre à une spirale qui fait craindre un nouveau soulèvement de grande ampleur.

Les affrontements entre lanceurs de pierres et soldats sont quotidiens, les agressions entre Palestiniens et colons permanentes. L'un des traits distinctifs de ces violences est la succession d'attentats commis le plus souvent à l'arme blanche par des Palestiniens isolés contre des soldats israéliens, des policiers ou des civils juifs jusqu'en Israël même.

Dimanche soir, un homme a de nouveau semé la panique en entrant armé d'un pistolet et d'un couteau dans la gare routière de Beersheba (sud d'Israël). Cet Arabe israélien de 21 ans a tué un soldat de 19 ans, s'est emparé de son fusil M-16 et a tiré sans discrimination, blessant une dizaine de personnes avant d'être abattu.

Dans la confusion, un agent de sécurité a ouvert le feu sur un Érythréen de 29 ans, Habtom Zarhum, qui essayait de se mettre à l'abri et qu'il a pris pour un assaillant.

Des vidéos montrent ensuite celui qui semble être Habtom Zarhum allongé dans son sang et des témoins lui mettre un banc sur le corps et lui asséner des coups de pied dans la tête. L'Érythréen a succombé plus tard à ses blessures.

L'hôpital, interrogé par l'AFP, a répondu ne pas être en mesure de dire si Habtom Zarhum aurait survécu s'il n'avait pas été battu.

«Tragique mais prévisible»

Sari Bashi, directeur local de l'organisation Human Rights Watch, a qualifié sa mort «de conséquence tragique mais prévisible dans un climat où certains politiciens israéliens encouragent les citoyens à se faire justice eux-mêmes».

La police israélienne a dit considérer comme «extrêmement grave» l'agression de cet homme et rechercher ceux qui l'ont frappé.

Habtom Zarhum, présenté par la presse comme un des milliers de demandeurs d'asile érythréens, est le premier abattu dans de telles circonstances en Israël depuis le début de la flambée de violences. A plusieurs reprises, des situations dans lesquelles des foules en colère cherchaient à se faire justice ont été rapportées. Les appels à la haine réciproque se multiplient.

Des Palestiniens, essentiellement de Jérusalem-Est, sont dans la très grande majorité les auteurs des attaques qui éprouvent les nerfs des Israéliens. Un petit nombre ont été le fait d'Arabes israéliens, qui possèdent la nationalité israélienne mais se considèrent généralement comme Palestiniens.

Les autorités peinent à contenir un mouvement essentiellement mené par des jeunes exaspérés de l'occupation israélienne et échappant à tout contrôle.

Dernière en date d'une série de mesures prises pour stopper les attaques, Israël a commencé à ériger un mur de béton entre un quartier palestinien et un quartier de colonisation juif à Jérusalem-Est.

«Opposition résolue»

Ce mur, qui devrait faire 300 mètres de long, sera temporaire, amovible et uniquement destiné à parer les jets de pierres et d'engins incendiaires sur les juifs dans un secteur tendu, affirment les autorités israéliennes.

Mais il a immédiatement suscité les comparaisons avec la barrière de séparation dont Israël a entrepris la construction pendant la deuxième intifada pour se protéger des attaques venues de la Cisjordanie occupée et qui est devenue pour les Palestiniens l'un des symboles détestés de l'occupation.

La communauté internationale, inquiète, cherche elle aussi à grand-peine les moyens de peser sur les évènements. Le secrétaire d'État américain John Kerry doit rencontrer cette semaine le premier ministre israélien en Allemagne, puis le président palestinien Mahmoud Abbas, peut-être en Jordanie.

Le Conseil de sécurité de l'ONU a, lui, commencé à examiner un projet français de déclaration, non contraignante, appelant à un retour au calme et au maintien des règles régissant l'ultra-sensible esplanade des Mosquées à Jérusalem.

L'une des idées avancées et attribuée par Israël à Paris est celle d'une présence internationale sur l'esplanade. Israël a convoqué l'ambassadeur de France en Israël, Patrick Maisonnave, et lui a dit l'«opposition résolue» de son pays à cette suggestion, ont rapporté les Affaires étrangères israéliennes.

Cette idée semble cependant compromise: M. Kerry a dit lundi que les États-Unis n'y étaient pas favorables.

Le ministère israélien des Affaires étrangères a indiqué avoir également convoqué lundi l'ambassadeur adjoint d'Afrique du Sud pour exprimer une «protestation ferme» concernant la venue du chef en exil du mouvement islamiste palestinien Hamas au pouvoir à Gaza.