Plusieurs bateaux de militants ont quitté les côtes européennes pour tenter de briser le blocus maritime sur la bande de Gaza, cinq ans après une tentative similaire qui s'était soldée par un raid meurtrier de l'armée israélienne.

La «Flottille de la Liberté III» doit amener d'ici la fin du mois des militants propalestiniens, au moins un parlementaire européen, un député arabe israélien et l'ex-président tunisien, Moncef Marzouki, sur la côte gazaouie.

Son but : attirer l'attention sur le blocus terrestre, aérien et maritime imposé par Israël à la bande de Gaza après l'enlèvement d'un de ses soldats en juin 2006 par le Hamas puis renforcé lors de la prise du pouvoir du mouvement islamiste un an plus tard. Actuellement, il est ainsi impossible de s'éloigner de plus de six miles nautiques de Gaza, ou de pénétrer dans les eaux gazaouies, sous peine d'essuyer des tirs de la marine israélienne.

Et les militants entendent bien mettre à profit le contexte actuel, alors qu'Israël fait face à des appels au boycottage et des pressions internationales, et que l'ONU vient d'accuser l'État hébreu, tout comme les groupes armés palestiniens, de possibles crimes de guerre durant le conflit qui a ravagé Gaza il y a un an.

«Ce que nous voulons, c'est maintenir la pression internationale pour mettre fin au blocus, car nous ne sommes pas les seuls à le considérer comme inhumain et illégal», assure ainsi à l'AFP Staffan Graner, un des militants à bord du navire suédois Marianne.

Au total, ce sont cinq bateaux qui devraient transporter environ 70 personnes, dont des élus, venant de plus de 20 pays vers la bande de Gaza, explique la Plateforme des ONG françaises pour la Palestine, qui soutient ce nouveau voyage.

Parmi ces élus, Bassel Ghattas, un député arabe israélien, s'est attiré les foudres de la classe politique en Israël l'accusant de trahison. «Il n'y a rien de plus grave pour un député israélien que de participer à cette flottille dont le but est d'aider l'organisation terroriste Hamas», a ainsi lancé le ministre de l'Immigration Zeev Elkin.

«Pacifique»

Dans une lettre ouverte au premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou, M. Ghattas écrit que la flottille, «civile et pacifique», a pour «but de mettre fin au siège en attirant l'attention de la communauté internationale sur le sort de 1,8 million de Palestiniens vivant dans des conditions honteuses et dignes d'une prison à cause du siège militaire imposé par Israël».

«Toute tentative de prise de contrôle pour empêcher la flottille d'arriver à destination impliquera à nouveau Israël dans une crise internationale ou un scandale», a-t-il ajouté, alors que les événements du Mavi Marmara, soldés par 10 morts, sont encore présents dans les esprits.

À plusieurs reprises, la marine israélienne a repoussé des flottilles anti-blocus, mais en mai 2010, elle lançait un raid sur le bateau Mavi Marmara, qui a fait 10 morts, tous Turcs, et ouvert une crise diplomatique avec Ankara. La Cour pénale internationale a conclu à de possibles crimes de guerre, mais estimé que l'affaire n'était pas suffisamment grave pour justifier des poursuites judiciaires.

À bord de la Flottille III toutefois, personne n'imagine qu'Israël se risquera à recourir à la force une nouvelle fois. «Israël a perdu beaucoup en utilisant la violence en 2010 et ça serait stupide de leur part de faire de même avec nous», affirme M. Graner, notamment peu après la publication de rapports l'accusant d'usage sans discrimination de la force lors des conflits à Gaza.

La dernière guerre, durant l'été 2014, a tué près de 2200 Palestiniens, en majorité des civils, et détruit les maisons de plus de 100 000 Gazaouis. Pour les détracteurs du blocus, seule sa levée totale et sans condition permettra de reconstruire l'enclave palestinienne afin d'y éviter un nouvel embrasement.