L'Arabie saoudite a affirmé avoir repoussé jeudi la première attaque rebelle d'ampleur contre sa frontière avec le Yémen, où elle mène depuis le 26 mars une campagne aérienne contre la rébellion chiite Houthi soutenue par l'Iran.

Téhéran, grand rival régional de Riyad, a toujours nié offrir un soutien logistique aux rebelles. Mais, selon un rapport confidentiel de l'ONU, l'Iran a commencé à les armer dès 2009, aux toutes premières heures de l'insurrection chiite.

Depuis le 26 mars, l'Arabie saoudite sunnite, dirige une coalition de neuf pays arabes qui bombardent par les airs les positions de rebelles chiites Houthis pour les empêcher de prendre le contrôle de l'ensemble du Yémen.

Jeudi, les troupes saoudiennes au sol «ont repoussé une attaque des milices Houthis à la frontière sud», selon un communiqué du ministère de la Défense saoudien. Le texte affirme que les Houthis étaient aidés par des troupes restées fidèles à l'ancien président du Yémen, Ali Abdallah Saleh, qui a quitté le pouvoir en 2012 dans la foulée des Printemps arabes.

Cette attaque qualifiée par Riyad d'«inhabituelle» survient quelques heures après une réunion des chefs de la diplomatie des pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG) à Riyad axée sur la crise au Yémen.

Cette réunion précédait un sommet consultatif du CCG prévu mardi à Riyad où est aussi attendu le président français François Hollande, premier chef d'État occidental à participer à une telle réunion.

Dans un communiqué paru à l'issue de la réunion, les ministres des pays du CCG (Arabie saoudite, Bahreïn, Émirats arabes unis, Koweït, Oman, Qatar) n'ont pas fermé la porte à des pourparlers, mais ont posé des conditions.

Ils ont notamment exigé que toute négociation pour un règlement au Yémen se tienne à Riyad, sous les auspices de leur groupement régional, rejetant les appels de Téhéran à des pourparlers internationaux hors de l'orbite saoudienne.

Les ministres ont aussi appelé à «la pleine mise en oeuvre de la résolution 2216» du Conseil de sécurité de l'ONU, adoptée le 14 avril qui somme les Houthis de se retirer de tous les territoires conquis depuis l'été 2014.

Urgence alimentaire 

Téhéran de son côté veut que d'éventuels pourparlers aient lieu «dans un endroit qui n'est pas impliqué dans le conflit», a répété mercredi son ministre des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif.

La position iranienne pourrait être affaiblie après la publication dans un rapport de l'ONU d'informations sur la fourniture d'armes aux rebelles par Téhéran.

Plus tôt dans la journée, le chef de la marine iranienne, l'amiral Habibollah Sayari, avait indiqué que deux contre-torpilleurs (destroyers) iraniens se trouvaient à l'entrée de Bab el-Mandeb, détroit stratégique entre le Yémen et Djibouti qui voit passer environ quatre millions de barils de brut par jour.

Selon lui, ces navires sont «dans le Golfe d'Aden (...) pour assurer la sécurité des navires marchands de notre pays face à la menace des pirates».

Sur le terrain, raids aériens et combats se poursuivent sans relâche. Des dizaines de rebelles et trois soldats saoudiens sont morts dans l'attaque sur la frontière sud de Narjan, selon Riyad.

Toujours sur la frontière, un soldat saoudien a été tué par un projectile, le 9e militaire à périr aux marches du royaume.

Dans le sud du Yémen, l'aviation de la coalition a bombardé intensément des positions rebelles à Aden, Taëz, Lahj et Abyane. Il y a eu huit morts à Aden, dont trois civils, selon un responsable local.

Des affrontements ont eu lieu également à Kirsh.

Par ailleurs, le groupe État islamique (EI) a mis en ligne une vidéo présentée comme la décapitation mi-avril de quatre soldats yéménites et l'exécution par balles de onze autres dans la province de Chabwa (sud-est).

Le conflit a fait depuis la mi-mars plus de mille morts, selon l'ONU qui vient de nommer un nouvel envoyé spécial au Yémen, le Mauritanien Ismaïl Ould Cheikh Ahmed.

La population est, elle, plongée dans une situation humanitaire critique, au moment où le Programme alimentaire mondial (PAM) annonce l'arrêt progressif, faute de carburant, de ses distributions de nourriture.

Ces deux dernières semaines, le PAM avait fourni une aide alimentaire d'urgence à 700 000 personnes à travers le Yémen, selon l'organisation, et désormais «de nombreuses familles ne savent pas d'où proviendra leur prochain repas».