Un diplomate saoudien, enlevé il y a trois ans au Yémen, a été libéré lundi par Al-Qaïda, qui réclamait le versement d'une rançon et la libération de djihadistes détenus en Arabie saoudite.

Selon une source tribale, Abdallah al-Khalidi a pu retrouver la liberté en échange d'une rançon - dont le montant n'a pas été précisé - grâce à une médiation tribale menée durant trois semaines par des dignitaires de la province de Chabwa (sud).

Cette information n'a pas pu être confirmée par une autre source.

Le porte-parole du ministère saoudien de l'Intérieur a affirmé pour sa part que la libération de M. Khalidi était le fruit d'«efforts des services de renseignements saoudiens», sans plus de précision. Il n'a évoqué ni rançon ni libération de djihadistes.

Après sa remise en liberté par Al-Qaïda dans la péninsule arabique (AQPA), le diplomate saoudien a été rapatrié à Riyad, où il devait subir des examens médicaux avant de retrouver ses proches, selon le porte-parole du ministère, cité par l'agence officielle Spa.

M. Khalidi, vice-consul d'Arabie saoudite à Aden, dans le sud du Yémen, avait été enlevé dans cette ville le 28 mars 2012.

Selon le porte-parole, le diplomate avait été kidnappé devant sa résidence avant d'être remis, dans une «transaction douteuse», à des membres du «groupe déviant», ce qui désigne Al-Qaïda dans le langage officiel saoudien.

20 millions de dollars

Pendant sa longue détention, M. Khalidi est apparu au moins cinq fois sur des vidéos d'Al-Qaïda pour demander aux autorités saoudiennes, et notamment au roi Abdallah, désormais décédé, d'accéder aux demandes du réseau extrémiste pour qu'il puisse rentrer dans son pays.

Outre la libération de tous ses membres - dont des femmes - détenus en Arabie saoudite, le réseau extrémiste réclamait une rançon en échange du diplomate. Un médiateur tribal avait expliqué en août 2012 que les ravisseurs avaient demandé initialement 10 millions de dollars, avant de doubler la somme à 20 millions de dollars.

AQPA, née de la fusion des branches saoudienne et yéménite du réseau, est considérée par Washington comme l'aile la plus dangereuse de l'organisation.

Elle est soupçonnée de plusieurs opérations anti-saoudiennes au Yémen, comme un attentat qui avait coûté la vie à un membre de la section militaire de l'ambassade d'Arabie saoudite, abattu en plein jour le 28 novembre 2012 à Sanaa.

AQPA détient encore un diplomate iranien, Nour-Ahmad Nikbakht, enlevé en juillet dernier.

Selon Washington, AQPA a «assassiné» en décembre deux otages, l'Américain Luke Somers et le Sud-Africain Pierre Korkie, lors d'une opération des forces spéciales américaines visant à les libérer dans le sud du Yémen.

La remise en liberté de l'otage saoudien est de son côté intervenue quelques jours après une décision de l'Arabie saoudite de transférer son ambassade de Sanaa, capitale contrôlée par la milice chiite des Houthis, à Aden, en signe de soutien au président yéménite Abd Rabbo Mansour Hadi.

Riyad avait fermé son ambassade dans la capitale yéménite le 13 février, comme plusieurs pays arabes et occidentaux, après que les Houthis se sont emparés du pouvoir à Sanaa.

«Situation grave»

M. Hadi a réussi à fuir le 21 février la capitale, où il était assigné à résidence par les Houthis, pour s'établir à Aden, d'où il n'a cessé de clamer son statut de président «légitime» et de défier les miliciens chiites.

Le conseil des ministres saoudien, réuni lundi sous la présidence du nouveau roi Salmane, a «regretté la détérioration de la situation» au Yémen. Il a appelé les Yéménites à soutenir le président Hadi, à reprendre le processus de transition politique et à sortir leur pays de la «situation grave dans laquelle il se trouve».

Le chef de l'État yéménite a reçu lundi à Aden l'ambassadeur américain Matthew H. Tueller, qui lui a apporté le soutien sans faille de Washington. «M. Hadi demeure le président légitime du Yémen et un acteur clé pour garantir la marche du pays sur une voie pacifique et stable», a souligné le diplomate.

Le Yémen est un allié clé de Washington dans la lutte contre Al-Qaïda.

Ainsi, en dépit de la fermeture de leur ambassade à Sanaa, les États-Unis n'ont pas interrompu leurs attaques de drones contre le réseau extrémiste dans le pays. Un raid de ce type, le deuxième en trois jours, a coûté la vie dimanche soir à trois membres présumés d'Al-Qaïda dans le sud-est du Yémen.