Les forces gouvernementales syriennes ont lancé mardi une offensive majeure pour prendre en tenaille les quartiers rebelles d'Alep, le jour où l'ONU doit discuter d'un plan visant à geler les combats dans l'ancienne capitale économique du pays.

Une centaine de combattants des deux camps, ainsi que des civils, ont été tués dans les combats, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH).

«Alep est essentiel et cette bataille va continuer de manière intense car elle est très importante», a affirmé une source militaire syrienne à l'AFP.

Selon le directeur de l'OSDH, Rami Abdel Rahmane. Les forces du régime cherchent d'un côté à «couper la route reliant Alep et la frontière turque et imposer ainsi un siège total aux quartiers rebelles». Et, de l'autre, à «ouvrir la route menant à deux villages chiites pro-gouvernementaux Naboul et Zahra, assiégés par les rebelles depuis dix-huit mois».

L'armée, appuyée par des combattants iraniens et afghans ainsi que par le Hezbollah libanais, a pris les villages de Bashkoy et Rityan, à une dizaine de kilomètres au nord d'Alep. Des combats se déroulent plus au nord à Hardtenine tandis que l'artillerie gouvernementale bombarde deux localités rebelles sur la route menant aux deux villages chiites assiégés.

Cette offensive a commencé le jour même où le médiateur de l'ONU pour la Syrie Staffan de Mistura doit présenter au Conseil de sécurité de l'ONU un rapport sur sa mission visant à stopper la guerre ravageant ce pays depuis quatre ans.

Ancien coeur industriel de la Syrie, Alep est coupé en deux depuis juillet 2012: les rebelles se trouvent à l'est et le régime à l'ouest d'une ligne de démarcation qui balafre la ville du nord au sud.

Dans la province d'Alep, c'est l'inverse: les forces du régime sont présentes à l'est tandis que leurs adversaires assoient leur autorité sur le reste de la province.

«Ouvrir plusieurs fronts»

Pour le régime, «le principal objectif est de casser le siège d'Alep» par les rebelles qui contrôlent quasiment toute la province, à l'exception d'une petite portion à l'est de la ville, selon la source militaire syrienne.

Interrogée sur l'offensive gouvernementale dans le sud du pays, à la lisière des positions israéliennes sur le plateau du Golan, cette source a précisé que cette attaque n'était «pas liée» mais que l'opération militaire à Alep prouvait «la capacité de l'armée syrienne à ouvrir plusieurs fronts en même temps».

À Alep, des combats ont lieu dans différentes parties de la ville notamment dans le Vieil Alep au centre, à Rachidine à l'est et à Zahra à l'ouest, selon l'OSDH.

L'ONG a précisé que 45 rebelles avaient été tués dans la province et dans la ville ainsi que six civils dans les quartiers rebelles.

Cinquante soldats et supplétifs ont par ailleurs trouvé la mort dans les combats tandis que huit civils ont été tués par des obus rebelles sur Mocambo et Azizia, quartiers de l'ouest de la ville.

M. de Mistura avait proposé le 30 octobre de commencer par instaurer des zones de cessez-le-feu pour permettre la distribution de l'aide humanitaire à Alep. Il a suscité la colère de l'opposition et des rebelles en affirmant vendredi que le président Bachar al-Assad faisait «partie de la solution».

Pour Noah Bonsey, de l'International Crisis Group, «c'est une escalade du régime pour renforcer sa position concernant la proposition de gel des combats» à Alep. «Si le régime est capable de s'emparer de ces villes et de s'y maintenir et s'il est capable de briser les sièges de Naboul et Zahra, il s'agira d'un développement significatif. Mais cela fait beaucoup de "si"».

La reprise des combats à Alep «n'a rien à voir avec les discussions à l'ONU», a pour sa part estimé Fabrice Balanche, géographe spécialiste de la Syrie. «La stratégie militaire de Bachar al-Assad est complètement indépendante: il entend vaincre par la force et non par des négociations internationales.»

«Le moment est bien choisi dans le Nord, car avec l'offensive kurde sur les territoires tenus par (le groupe) État islamique, Assad sait que l'EI n'a pas les moyens d'attaquer ses positions à Alep», explique-t-il.

«En outre, le mois de février est propice aux attaques de l'armée régulière car l'hiver lui est davantage favorable qu'aux rebelles qui souffrent du froid et de l'humidité», souligne M. Balanche.