À quelques heures d'une possible nouvelle séance de flagellation pour Raïf Badawi, plusieurs voix s'élèvent pour demander l'intervention directe du premier ministre Stephen Harper.

«L'état de santé de Raïf est précaire, et sa condition se détériore de plus en plus», a lâché son épouse arabophone, Ensaf Haidar, par l'entremise d'un interprète.

«Je suis très inquiète pour lui. C'est impossible pour un être humain de supporter 50 coups de fouet par semaine», a poursuivi la jeune femme, qui s'était déplacée à Ottawa, jeudi, afin d'accentuer la pression sur le gouvernement fédéral.

Raïf Badawi a été condamné en Arabie saoudite à recevoir 1000 coups de fouet au rythme de 50 par semaine durant 20 semaines consécutives pour avoir fait la promotion de réformes et demandé aux musulmans de faire preuve de davantage de tolérance par rapport aux non-musulmans.

La prochaine séance publique de flagellation du blogueur est prévue pour le vendredi 30 janvier.

Après les 50 premiers coups de fouet qu'a subis Raïf Badawi, le 9 janvier, la flagellation a été reportée en raison de son état de santé précaire.

Son sort a été dénoncé par le ministre canadien des Affaires étrangères, John Baird, ainsi que par le ministre du Développement international, Christian Paradis, mais jusqu'à présent, le premier ministre Harper ne l'a pas fait directement.

Invité à réagir à la demande d'intervention formulée par l'épouse du blogueur, le bureau de M. Harper a plaidé jeudi qu'il ne pouvait en faire beaucoup plus.

«Le châtiment administré à M. Badawi est une violation flagrante de la dignité humaine», a écrit dans un courriel Carl Vallée, l'attaché de presse du chef conservateur.

Mais «comme M. Badawi n'est pas citoyen canadien, nous sommes limités dans les mesures que nous pouvons prendre en son nom», a-t-il poursuivi.

En revanche, son épouse et ses enfants ont obtenu le statut de réfugié au Canada - ils habitent à Sherbrooke - a fait remarquer le député libéral Irwin Cotler.

«Il y a une connexion familiale. Nous avons une obligation comme pays, comme Parlement, d'être les défenseurs des droits et libertés (...) d'un prisonnier politique qui a exercé les droits fondamentaux qui sont ancrés dans notre Charte des droits et libertés», a plaidé l'élu.

Certes, au cours des dernières semaines, on a vu des députés dénoncer la situation, des citoyens se mobiliser ou encore des médias nationaux et internationaux traiter de l'enjeu, a reconnu M. Cotler.

«Mais maintenant, je pense qu'il est nécessaire d'avoir le leadership du premier ministre pour assurer la libération de M. Badawi», a-t-il soutenu en conférence de presse à Ottawa.

Amnistie internationale partage le même avis.

«Il faut libérer Raïf Badawi. S'il vous plaît, M. Harper, aidez-nous à réunir cette famille, car chaque jeudi, chaque vendredi, c'est une angoisse», a lancé la directrice de l'organisation au Canada francophone, Béatrice Vaugrante.