Le camp de réfugiés Zaatari, l'un des plus grands du monde, compte près de 10 000 abonnés sur le réseau social Twitter. «On se figure souvent qu'un réfugié est là pour être nourri et logé sous la tente, explique Nasreddine Touaibia, responsable des réseaux sociaux du camp de l'ONU. Nous voulons montrer que ce sont des gens normaux qui veulent avoir une vie.»

Au coeur du désert jordanien, dans le camp de réfugiés Zaatari, plus de 82 000 hommes, femmes et enfants tentent de passer l'hiver au chaud.

«Nous distribuons des draps, des couvertures, des systèmes de chauffage et du gaz», explique au téléphone Nasreddine Touaibia, responsable des communications pour le camp Zaatari.

Grâce à Twitter, ce moment dans la vie des quelque 14 000 familles du camp s'est immiscé, comme bien d'autres, dans le quotidien de milliers de personnes à travers le monde.

Sur le compte Twitter du camp Zaatari, on voit de jeunes Syriens qui jouent, loin de la guerre qui sévit dans leur pays natal. On voit des femmes qui cousent à la machine des vêtements qui seront distribués dans les écoles et les hôpitaux du camp. On voit des fillettes en kimono qui suivent des cours de taekwondo.

«Nous voulons montrer le quotidien et parler de la situation d'exil des réfugiés syriens, explique M. Touaibia, qui s'occupe seul d'alimenter depuis un peu plus d'un an le compte Twitter du camp, lancé à l'initiative du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR). Beaucoup de médias dans le monde retweetent ce que nous diffusons, et ça fait parler de nous.»

Une ville informelle

Créé en 2012 près de la frontière avec la Syrie, le camp Zaatari a grossi de façon exponentielle, pour atteindre 3,3 kilomètres carrés aujourd'hui. On y trouve des artères principales et secondaires, des restaurants, des boutiques de location de robes de mariées. De cinq à dix nouveau-nés naissent dans les dispensaires du camp chaque mois.

Le camp abrite un secteur commercial avec 3000 petits magasins tenus par des réfugiés. «Au total, ils ont un chiffre d'affaires de 13 ou 14 millions US par mois, dit M. Touaibia. C'est immense.»

À 90%, le camp est lié à un réseau d'électricité, ce qui n'est pas le cas de tous les camps de réfugiés, dit M. Touaibia. «Plus de 80% de la population vit dans des modules préfabriqués, et non pas sous des tentes.»

Les enfants sont souvent présents dans les photos diffusées sur Twitter, et ce n'est pas par hasard: ils sont majoritaires au camp. À Zaatari, 57% de la population a moins de 18 ans et 20% moins de 5 ans.

Le 13 octobre dernier, M. Touaibia a diffusé la photo d'une lettre manuscrite crève-coeur écrite dans un anglais parfait par un résidant du camp âgé de 21 ans, qui étudiait en littérature anglaise à l'Université de Damas quand la guerre a éclaté.

«Ma soeur, qui vient de passer trois ans sans étudier, pleure jour et nuit, lit-on dans la lettre. Elle est dans un piteux état, étendue dans la caravane. Elle et moi avons perdu la chose la plus précieuse de notre vie: nos études.»

Le jeune homme dit vouloir aller avec sa soeur vivre «dans n'importe quel pays d'Europe, aux États-Unis, en Australie, au Canada, afin que nous puissions continuer nos études».

La lettre a touché une corde sensible sur les réseaux sociaux, et le jeune homme a donné des entrevues à plusieurs médias des États-Unis, de France, d'Australie, d'Allemagne, d'Italie. Il a depuis reçu une bourse d'études de l'ONU pour étudier en Jordanie ou au Liban.

Le jeune ne voulait pas laisser sa soeur derrière lui au camp, mais des coordonnateurs l'ont persuadé d'accepter l'offre.

Pour faire un don d'urgence aux réfugiés syriens: donate.unhcr.ca

Le camp Zaatari sur Twitter: twitter.com/ZaatariCamp

Photo Muhammad Hamed, archives Reuters

Les enfants sont majoritaires au camp Zaarari: 57% de la population a moins de 18 ans et 20% moins de 5 ans.

Photo Adam Ferguson, archives The New York Times

Une scène de rue se reflète dans la vitrine d'une boutique du camp Zaatari, en Jordanie, dont le secteur commercial compte quelque 3000 petits magasins tenus par des réfugiés.