Les tractations à l'ONU pour mettre au point une résolution sur le conflit israélo-palestinien piétinent dans l'attente d'une réponse des États-Unis à des propositions européennes et sur fond de campagne électorale en Israël.

Le secrétaire d'État américain John Kerry doit rencontrer dimanche ou lundi à Rome le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou pour évoquer les «initiatives en cours devant les Nations unies», selon le département d'État.

Le mois dernier la Jordanie, seul membre arabe du Conseil de sécurité, a fait circuler au nom des Palestiniens un projet de résolution qui fixe novembre 2016 comme date limite pour la fin de l'occupation israélienne. Selon de nombreux diplomates, ce texte n'a aucune chance de recueillir un large soutien et il sera certainement bloqué par un veto américain s'il arrive sur la table du Conseil.

En guise de compromis, la France a lancé depuis plusieurs semaines des consultations avec Londres et Berlin, puis avec Washington et Amman, pour mettre au point un texte de consensus.

Celui-ci appellerait à la reprise rapide des négociations israélo-palestiniennes, selon une série de grands principes comme la coexistence pacifique d'Israël et d'un État palestinien. Il fixerait une échéance, peut-être deux ans, pour la fin de ces négociations.

Dans une deuxième étape, Paris envisage une conférence internationale pour encadrer et soutenir les négociations, avec la participation des pays arabes.

Pour les promoteurs de cette initiative, il s'agit d'obtenir le feu vert ou au moins la neutralité bienveillante de Washington pour que le Conseil puisse enfin faire entendre sa voix sur ce dossier, pour la première fois depuis 2009.

«Il y a une opportunité à saisir», souligne un diplomate européen. Il estime que les Américains, après avoir martelé que seules des négociations directes israélo-palestiniennes peuvent régler le conflit, sont désormais prêts à s'engager de manière prudente à l'ONU.

Israël en campagne électorale 

Mais si les Américains n'ont pas fermé la porte ils tardent à donner une réponse claire, déplore un autre diplomate: «ils semblent disposés à se lancer, mais se demandent toujours si c'est le bon moment pour le faire».

Les points litigieux du projet de texte n'ont toujours pas été réglés: faut-il fixer une échéance précise, et laquelle? faut-il tenir compte, et comment, de la volonté de Benyamin Nétanyahou de faire d'Israël un État «juif»?

Dans ces conditions, si les discussions aboutissaient avant la fin de l'année, ce serait «une sorte de miracle», estiment en choeur deux des négociateurs.

La proximité des élections anticipées en Israël, fixées au 17 mars, complique encore la donne. Washington n'a pas demandé formellement aux Européens d'attendre le résultat du scrutin, mais le doute subsiste sur sa capacité à forcer la main à son allié israélien en pleine campagne électorale.

De leur côté, les Européens plaident l'urgence: plus le scrutin approche, soulignent-ils, plus un accord sera difficile et le moindre incident sur place peut dégénérer et tout faire capoter.

Autre paramètre: la composition du Conseil, qui change en janvier avec l'entrée de nouveaux membres non permanents. Plusieurs des nouveaux arrivants, en particulier le Venezuela, bête noire des États-Unis en Amérique latine, sont réputés plus favorables aux Palestiniens.

S'ils n'obtiennent pas le vote d'une résolution qui leur convienne, les Palestiniens menacent d'adhérer à la Cour pénale internationale (CPI), comme leur statut d'État observateur non membre à l'ONU, obtenu en novembre 2012, leur en donne le droit. Ce qui ouvrirait la voie à des plaintes contre Israël pour crimes de guerre à Gaza.

Le représentant palestinien à l'ONU Ryad Mansour a cependant nuancé ces menaces jeudi devant des journalistes: le vote de la résolution et l'adhésion à la CPI «ne sont pas nécessairement liés», a-t-il expliqué.

Les Palestiniens peuvent aussi s'appuyer sur une vague de décisions, même si elles sont non contraignantes, de la part de parlements en Europe (France, Royaume-Uni, Espagne, Irlande, Portugal) qui invitent leurs gouvernements à reconnaitre un État palestinien.