Le pape François a appelé lundi à Jérusalem au dialogue entre musulmans, chrétiens et juifs, lors d'une dernière journée de voyage consacrée à la visite de sites hautement sensibles, auxquels il a ajouté une halte au mémorial des victimes israéliennes d'attentats.

Dimanche dans la ville palestinienne de Bethléem, il a marqué les esprits en touchant du doigt la réalité «inacceptable» du conflit israélo-palestinien avec une prière muette au pied du «mur» de séparation et son invitation aux dirigeants des deux camps à prier pour la paix avec lui au Vatican.

Sur l'esplanade des Mosquées à Jérusalem, lieu saint pour l'islam comme pour le judaïsme, le pape, accompagné du patriarche orthodoxe de Constantinople Bartholomée, a rappelé que les trois religions monothéistes se réclamaient du même patriarche, Abraham.

«Que personne n'instrumentalise par la violence le Nom de Dieu! Travaillons ensemble pour la justice et pour la paix», a déclaré François, en réponse au message d'accueil du grand mufti, cheikh Mohammad Hussein, à la mosquée Al-Aqsa.

Le mufti l'a pressé d'intervenir auprès d'Israël pour «arrêter l'agression contre notre peuple, notre terre, et nos lieux saints et permettre la liberté d'accès aux musulmans et chrétiens de notre peuple à leurs lieux saints d'Al-Aqsa et du Saint-Sépulcre».

Le pape François s'est ensuite recueilli devant le Mur des Lamentations, en contrebas de l'esplanade dans la Vieille ville de Jérusalem, où il a glissé, comme le veut la tradition, un message dans les interstices des pierres de ce lieu saint du judaïsme.

Il s'est approché seul du Mur, où il a posé une main durant plusieurs minutes de silence. Puis il a ouvert une enveloppe blanche et lu un court message, hors micros. Selon une source vaticane, le message contenait le «Notre Père» en espagnol.

Jorge Bergoglio a fraternellement embrassé le rabbin Abraham Skorka et le professeur musulman Omar Abboud, tous deux de proches amis argentins de Buenos Aires qui l'accompagnent dans ce voyage, dans une accolade symbolique pour les trois religions monothéistes et leurs quelque trois milliards de fidèles.

La Shoah, «tragédie incommensurable»

François s'est ensuite rendu au cimetière national du mont Herzl, où il a fait déposer une grande gerbe aux couleurs jaune et blanche du Vatican sur la tombe du père fondateur du sionisme Theodor Herzl, une première pour un pape, bien que des activistes palestiniens l'aient exhorté à «ne pas ternir sa visite par de tels gestes».

Dans un autre signe de solidarité avec Israël, François a fait un détour imprévu au mémorial des victimes israéliennes d'attentats. Selon la radio militaire israélienne, cet arrêt a eu lieu à la demande du premier ministre Benyamin Nétanyahou, qui l'accompagnait.

Selon le quotidien Yédiot Aharonot, Israël a exprimé son mécontentement au Vatican après le geste du pape devant le «mur» à Bethléem, déplorant que son service de presse ne l'ait pas accompagné d'une explication sur le fait que cette barrière visait à empêcher des attentats.

Au mémorial de la Shoah à Yad Vashem, le pape François a prononcé une longue méditation empreinte d'émotion sur «la tragédie incommensurable» de la Shoah et «l'abîme» qu'elle a constitué pour l'humanité, rallumant la flamme de mémorial et saluant des survivants du génocide nazi.

Le chef de l'Église catholique a ensuite été reçu par les deux Grands rabbins d'Israël, puis par le président Shimon Peres, avant d'accueillir à son tour M. Nétanyahou à Notre-Dame, une propriété du Vatican à la limite entre l'ouest et l'est de Jérusalem.

Il rencontrera également de nouveau des religieux de différentes confessions chrétiennes, en particulier orthodoxes, dans un rapprochement historique qui a justifié ce pèlerinage, 50 ans après le sommet historique à Jérusalem entre le pape Paul VI et le chef de l'Église orthodoxe de l'époque, Athénagoras.

Le patriarche maronite Bechara Raï, dont la visite en Israël avec le pape a soulevé de vives critiques au Liban, encore techniquement en guerre avec l'État hébreu, se joindra à cette prière au jardin de Gethsémani.

François conclura son pèlerinage par une messe au Cénacle, un site sacré pour les chrétiens, les juifs et les musulmans qui cristallise les tensions dans la Ville sainte, au grand dam d'extrémistes juifs qui en revendiquent l'exclusivité.